Climat et décarbonation : et si l'on ne faisait rien ?
Quand un aréopage d’experts du climat, d’économistes, d’historiens et d’ingénieurs se réunissent pour signer une tribune, on se précipite, avide de connaître leurs solutions. Mais au bout du bout de leur texte, ils ne proposent, pour décarboner nos routes, que des actions déjà entreprises ou en voie de l’être et la création d’un énième comité Théodule pour réfléchir à la question. Autant ne rien faire.
Enfin, toute la communauté scientifique s’en mêle. Pensez donc, autour de François Gemmene, coauteur du dernier rapport du Giec, ils sont 12, et pas des moindres. L’on retrouve Mathieu Flonneau, l’historien spécialiste des transports, Anna Creti, professeure d’économie à Dauphine, ou encore Fabien Leurent, professeur à l’école des Ponts Paris Tech. Du beau monde pour une belle cause : la décarbonation de la route, pour laquelle ils souhaitent s’allier dans le but de résoudre ce problème insondable.
Du coup, on s’enthousiasme, on adhère d’avance et on se précipite vers la tribune qu’ils ont signé d’une seule main dans le dernier JDD, quelques jours avant la grève des journalistes du Journal Du Dimanche. Alors on lit, avide de trouver enfin des solutions à ce qui nous préoccupe tous. On lit même jusqu’au bout, et on a n’en trouvés aucune. Ou plutôt si : « l’électrification des voitures, le déploiement massif de bornes de recharge sur les réseaux routiers, le développement du covoiturage et du transport collectif sur route et autoroute, adaptation des infrastructures et des services à la multimodalité ». Mazette.
Des solutions dignes de Chat GPT
Devant tant d’innovations on en reste pantois et un poil estomaqué par cet enfilage de déjà-vu qui semble tout droit sorti d’une réponse livrée par une IA à une question du genre « dis, Chat GPT, comment réduire l’empreinte carbone de la bagnole ? » L’électrification des autos ? Dieu sait qu’elle est en marche. Le déploiement des bornes ? La France vient de franchir la barre des 100 000 au mois d’avril. Le covoiturage ? Il explose. Évidemment, la multimodalité a du plomb dans l’aile et tous ceux qui ont tenté de réserver un TGV récemment en sont conscients. Mais Jean-Pierre Farandou, le président de la SNCF n’a pas été convié pour signer la tribune.
Tout le monde s’attelle donc à ces problèmes qui ne sont pas encore résolus et ne le seront pas d’un simple coup de baguette magique et électrique. Pas grave pour nos éminents qui semblent le découvrir et qui, eux, contrairement aux politiques de tous crins, vont pouvoir le résoudre. Comment ? « Nous proposons de constituer une Alliance pour la décarbonation de la route. Plateforme d’échanges et de propositions pour sensibiliser et agir, celle-ci doit servir à rassembler les idées et les expertises. ». Voilà donc constitué un énième comité Théodule chargé de réfléchir à la question.
Un mille feuilles de commissions
Vous avez aimé le mille-feuille climatique constitué d’une couche de commission européenne, de crème au beurre de plusieurs ministères français chargés du dossier, surplombé de nappages de Cop 26 et bientôt 27 et de quelques ONG ? Vous allez adorer cette couche supplémentaire, cette « alliance pour la décarbonation de la route », jusqu’à l’indigestion.
Mais pendant ce temps-là, l’urgence est réelle et seuls quelques climatosceptiques n’en ont pas conscience. Jacques Chirac expliquait que « la maison brûle, mais on regarde ailleurs. » Georges Clémenceau, s’il avait été son contemporain, lui aurait répondu, « en France quand on veut enterrer une décision, on crée une commission ».
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