2. BMW M5 G90 Hybride - La conduite : bluffante, du moins sur route…
Le programme de la présentation avait de quoi nourrir quelques inquiétudes : aucun passage sur circuit avec la nouvelle M5. Pourtant, nous avions eu droit à quelques tours du circuit d'Ascari (Espagne) lors de la sortie de la génération F10 en 2011 (j'y étais pour un autre média, Caradisiac aussi). Et de celui d'Estoril (Portugal) pour la mouture F90 qui suivit en 2018. Mais là, rien : un peu d'autobahn illimitée en partant de Munich pour jauger les capacités de reprises, puis quelques lacets du réseau secondaire, rien de plus.
Forcément, le doute plane sur les réelles capacités sportives de l'engin… Qu'aurait-on pu constater sur piste ? Un évanouissement des freins malgré l'option céramique ? Pas impossible. L'agonie des pneus Michelin Pilot Sport S 5 ? Probable. Des performances en chute une fois la batterie vide ? Sans doute...
727 ch sous conditions…
Parlons-en justement, des performances… BMW nous les annonce meilleures qu'avant, avec un 80 à 120 km/h en 5e en 2s9, soit 3 dixièmes plus vite qu'avec la CS. Effectivement, nous ressentons bien un effet "3e turbo" à mi-régime, grâce à la fée électricité. Sauf qu'en 4e, le gain n'est plus que d'un dixième.
Après tout, ne se moque-t-on pas des capacités de reprises dans les abysses du compte-tours sur une sportive à boîte auto nantie de palettes au volant ? Le meilleur juge de paix des performances n'est-il pas un long test d'accélération tels que le 0 à 200 km/h ? Assurément ! Et là, les modèles précédents reprennent des couleurs. Alors que la nouvelle M5 réclame 10s9 sur cet exercice (ce qui est déjà beau !), la F90 CS le signe en 10s4. Logique, puisque son rapport poids/puissance était meilleur, avec 2,87 kg/ch, contre 3,35 kg/ch pour le nouveau modèle.
Et nous comparons ces performances quand la nouvelle M5 est au mieux de sa forme, c’est-à-dire avec 727 ch cumulés. Or on sait, et les ingénieurs confirment quand on creuse la question, que la M5 G90 perd quelque peu ses moyens batterie vide (comme toutes les PHEV), surtout sur circuit.
Car si sur route, la récupération d’énergie cinétique est suffisamment importante (jusqu'à 60 kW annoncés) pour ralentir efficacement l’auto et redonner du peps en sortie de virage tout en limitant la conso à moins de 20 l/100 km, elle déclarera forfait sur piste pour passer le relais au système de freinage classique, plus mordant. Avec pour conséquence un manque d’alimentation en énergie pour le moteur électrique qui ne pourra plus épauler le V8, dont les 585 ch se sentiront bien seuls face poids de l’engin : sans aide de l'électromoteur, le rapport poids/puissance grimpe à 4,16 kg/ch…
Artificiellement bluffante
Reste l'épineuse question du comportement routier. Pour être honnête, la M5 en a bluffé plus d'un sur route ouverte. Honnêtement, si l'on n'annonce pas au conducteur le poids du bestiau, il ne s'en apercevra pas. À moins d'être un pilote chevronné ou de descendre de l'ancien modèle, la G90 parvient à tromper son monde, grâce notamment à une direction très directe (environ 2 tours de butée à butée) qui agit à la fois sur les roues avant mais également sur celles de derrière, ces dernières contrebraquant dans le serré pour plus de maniabilité, et suivant celles de devant dans les courbes rapides pour plus de stabilité, avec 1,5° d'angle maxi dans les deux cas.
La réactivité à l'inscription est même surprenante, d'autant que les mouvements de caisse sont parfaitement contenus par la suspension pilotée, surtout en mode Sport. Les Michelin Pilot Sport S 5 (en 285/40 R20 à l'avant et 295/35 R21 à l'arrière, au grip remarquable, ne sont pas pour rien dans cette prouesse.
Il convient toutefois de ne pas s'emballer. Certes, la M5 parvient à faire oublier son poids sur route, mais le plaisir est toutefois limité. Déjà, direction et pédale de frein manquent de feeling, ce qui peut stresser quand on conduit une voiture aussi lourde sur une petite route comportant quelques tâches humides dans les passages boisés.
Et alors que la précédente M5 pouvait se montrer mobile mais équilibrée à l'inscription pour aider à tourner, la nouvelle apparaît sous-vireuse dans les passages qui se referment, avec un avant débordé par le poids et un arrière rivé qui refuse de filer un coup de main.
Circuit à éviter…
D'autre part, le typage majoritairement vers l'arrière de la transmission xDrive peut compliquer les sorties, avec des ruades du postérieur qui peuvent surprendre, d'autant qu'il y a de la masse à relancer, même si cela garantit un peu de pouvoir directionnel aux plus adroits. À ce sujet, les funambules pourront, comme sur l'ancien modèle, déconnecter les roues avant pour passer en simple propulsion, à condition d’avoir préalablement déconnecté toutes les aides à la conduite. Habileté plus que jamais recommandée pour faire danser les 2,5 tonnes de l’ensemble voiture/conducteur.
Enfin, le gabarit freine les ardeurs : car avec 5,10 m de long pour 1,97 m de large, la nouvelle M5 occupe trop d'espace pour pouvoir profiter sans arrière-pensée de ses performances sur route ouverte.
Une réflexion que je me suis faite en reprenant le volant des générations e39 et e60, en marge de cette présentation (vous aurez le droit à quelques articles, et shorts YouTube d'ailleurs) : si elles nous paraissaient imposantes à l'époque, les mamies avaient le mérite de passer à peu près partout.
Puis elles pouvaient se rendre sur piste… Là, ce n'est même pas la peine d'y penser. Un ingénieur confirme : "elle n'est pas faite pour cela". On le craignait avec une puissance fluctuante, et surtout les 2,5 tonnes qui risquent de pulvériser les gommes en quelques tours. Quant aux freins… même si l'option carbone/céramique de notre modèle d'essai laisse imaginer un peu de répit, on peut imaginer une usure prématurée et coûteuse. Et l'on ne parle pas des modèles acier de série, dont BMW n'a jamais été un spécialiste.
Qu'on se le dise, la M5 est passée de sportive polyvalente à grosse GT confortable, même si la boîte auto ne se montre pas toujours douce en mode confort (ni très rapide en Sport d'ailleurs...), d'autant que l'amortissement se montre prévenant malgré quelques trépidations. Et à une espèce de niche fiscale pour amateurs de V8 performants…
Photos (21)
Sommaire
Déposer un commentaire
Alerte de modération
Alerte de modération