2. Sur la route : le Jaguar sort ses griffes

Jaguar arrive avec un retard conséquent à la petite fête des SUV premium mais cela a cependant quelques avantages, comme pouvoir observer avec du recul les qualités de la référence du segment pour se donner comme objectif de les égaler, voire de les surpasser. Et en matière de dynamisme, le titre revient sans aucun doute au Porsche Macan, dont une photo servait probablement de cible de fléchettes aux ingénieurs développant le F-Pace. Est-ce que le but est atteint ? On en est très près, grâce à un châssis que Jaguar nous promet directement dérivé de celui de la F-Type et l'utilisation massive d'aluminium.

Après nous être fait la main le premier jour des essais presse avec la série spéciale de lancement Premiere Edition équipée du V6 3,0 l à compresseur de 380 ch dont les photos illustrent cet article, nous nous sommes focalisés avant tout lors de la seconde journée sur l'entrée de gamme avec le 2,0 l D de 180 ch qui fera, nous l'avons vu, le gros des ventes du F-Pace. Notre modèle était plus précisément une finition R Sport, avec les quatre roues motrices, la boîte de vitesses automatique ZF à huit rapports et entre autres l'option des suspensions adaptatives incluses dans un pack à 1 250 €, ce qui aboutit à une configuration à 58 600 €. Ce moteur fait partie de la famille Ingenium réalisée entièrement maison, ici dans sa version 180 ch à 4 000 tr/min et 430 Nm de 1 750 à 2 500 tr/min qui nous avait déjà séduit dans la XE. Comment s'en sort-il avec une transmission intégrale et surtout 1 775 kg sur la balance ? C'est surprenant mais très bien, voire même mieux à bas régimes que la version V6 essence suralimentée grâce à un couple maximum très proche mais disponible bien plus tôt, avec une ZF brillante dans son rôle de faire-valoir. Jaguar annonce ici un 0 à 100 km/h en 8,7 s qui paraît tout à fait crédible, et une consommation mixte de 5,3 l/100 km qui le semble beaucoup moins face au près de 10 litres annoncés par l'ordinateur de bord, mais il faut dire que notre parcours au Monténégro empruntait la fameuse et très enthousiasmante P1 entre Cetinje et Kotor composée de 16 épingles sur 8,3 km avec un dénivelé de 423 m.

Si ce n'est pas le meilleur profil de route pour faire des records de sobriété, c'est par contre parfait pour déterminer très rapidement les qualités d'un châssis. Et celui du F-Pace n'en manque pas, à commencer par sa direction. Comment on peut arriver à une telle précision et de telles remontées d'information avec des pneus allant jusqu'à du 265 de large en 22 pouces et une garde au sol surélevée tient du mystère, voire de la sorcellerie, mais le résultat est extraordinaire pour un SUV. Le comportement typé tout de même propulsion avec 90 % du couple envoyé à l'arrière en conditions optimales est équilibré, avec un excellent compromis entre la prise de roulis excessive et la fermeté exagérée, les différences entre les modes de conduite semblant extrêmement minces, laissant penser que l'option des suspensions adaptatives n'est peut-être pas incontournable. Dynamique donc, mais aussi tout à fait confortable. On avait dans ce domaine tout à craindre des colossales jantes allant jusqu'à 22 pouces, cependant les répercussions sèches des imperfections de la route jusque dans l'habitacle se font extrêmement rares grâce à un flanc de pneus à l'épaisseur très proche de ceux équipant les jantes de « seulement » 20 pouces du Macan, taille avec laquelle le Jaguar est alors un véritable tapis volant.

Est-il au final aussi efficace que le concurrent de chez Porsche ? C'est en fait avant tout une question de curseur : le britannique atteint 90 % du dynamisme de l'allemand, mais ce dernier n'est qu'à 90 % aussi confortable que son rival d'outre-Manche.

Pour la présentation, Jaguar avait aussi organisé un bref passage off road pour essayer le système ASPC livré de série sur tous les modèles à boîte automatique. Il s'agit en fait d'un régulateur de vitesse spécialement conçu pour les situations à faible motricité, fonctionnant de 3,6 à 30 km/h en montée comme en descente et permettant au conducteur de se focaliser exclusivement sur la direction. Le F-Pace se sort tout à fait honorablement du parcours proposé, mais comme pour ses concurrents allemands premium, on se doute bien que la quasi-intégralité de la clientèle restera exclusivement sur le bitume, le peu restant se tournant plutôt vers Land Rover.