L’Oldsmobile Toronado, la traction la plus puissante de l’Histoire
En 60 ans, on n’a toujours pas commercialisé de voiture à roues avant motrices plus musclée que l’invraisemblable Toronado de 1965, dont le V8 a développé jusqu’à 406 ch…

Souvent considéré comme une solution pour petite voiture, la traction a, en réalité, d’abord été commercialisée sur des modèles de haut de gamme. Si la première fut la très confidentielle Tracta, un roadster français apparu en 1926, c’est aux Etats-Unis que la formule s’est répandue dès 1929 sur la luxueuse Cord L-29, en 1929.
On est cinq ans avant la Citroën 7 CV de 1934 ! L’idée des roues avant motrices, souvent considérées comme incompatibles avec des fortes puissances, sera carrément battue en brèche par la Cord 812 en 1937, forte de 170 ch. Un chiffre alors énorme. Mais bien faible face à ce qui va arriver en 1965, toujours aux USA.

A l’époque, GM ne s’est pas encore fourvoyé dans la standardisation à outrances, le terrifiant badge engneering, donc laisse quelque latitude de mouvement à ses marques, qui peuvent concevoir leurs propres moteurs par exemple. Chez Oldsmobile, on ira beaucoup plus loin ! On planche depuis 1958 sur une traction, imaginée initialement comme un modèle de taille moyenne. Le but est de se donner une grande avance sur la concurrence par la technologie, idée qu’Audi reprendra bien plus tard…

Seulement, cette solution, bien plus sophistiquée que l’architecture moteur avant/propulsion, coûte cher, John B. Beltz, l’ingénieur en chef d’Oldsmobile, aussi va-t-il l’attribuer à un modèle de haut de gamme : la Toronado, dont nous vous avons présenté un exemplaire à Rétromobile. Cette américaine hors norme bénéficie d’une plate-forme spécifique, ultra-rigide, mais aussi de trains roulants originaux, à barres de torsion avant et lames arrière, combinées à des amortisseurs verticaux mais aussi horizontaux.

Mais c’est sous le capot qu’on s’aventure dans le bizarre. Pour s’éviter d’avoir à concevoir une nouvelle boîte, adaptée à la traction, on place une bien connue unité automatique Hydra-Matic non pas devant le moteur mais à côté, se liant au vilebrequin par une chaîne. Le V8 Rocket est lui aussi une vieille connaissance, et forme avec la transmission un ensemble très compact appelé UPP (Unitized Power Package). Le tout s’habille d’une carrosserie au moins aussi décalée que cette architecture mécanique, toute en courbes à une époque où les USA se passionnent pour les angles, due à David R. North.

La voiture sort en 1965 pour le millésime 1966, et s’attire bien des louanges. Dotée d’un 7,0 l de 375 ch, la Toronado est rapide (217 km/h), accélère de 0 à 60 mph (96 km/h) en 7,5 s mais étonne surtout par sa tenue de route exceptionnelle ! Également d’un grand confort, elle est élue Car of the year 1966 par le magazine Motor Trend, qui se soucie peu de son freinage évanescent. L’Europe non plus, qui placera l’américaine 3e à son élection de la Voiture de l'année. En france, l'américaine coûte une fortune : 52 088 F, soit le prix de trois Citroën DS 21 Pallas !

En effet, ce monstre de 5,36 m et de plus de 2 tonnes s’en remet à quatre tambours de frein. Peu importe, les ventes sont excellentes, passant les 40 000 unités en 1966. Comme quoi, la traction peut ne pas gêner une clientèle haut de gamme. Seulement, dans un souci de rentabilité, GM a permis à Cadillac d’utiliser la plate-forme de la Toronado pour son Eldorado lancée un an plus tard. Et celle-ci va s’avérer une redoutable concurrente, à tel point que l’Olds verra ses commandes chuter de 40 % en 1967.

Pas grave, pour 1968, on prévoit un restylage et surtout une option W34 qui porte la puissance du moteur à quelque 406 ch ! Ce chiffre, certes exprimé selon la norme SAE, ne sera plus jamais atteint ni par la Toronado qui entre dans sa 2e génération en 1970 avec moins de watts sous le capot, ni aucune traction de série. En marge de tout ça, elle donne sa plate-forme facile à étirer à un camping-car fascinant, le GMC Motorhome. Cette solution des roues avant motrices signalera les hauts de gamme de GM jusqu'au début des années 2000. Comme quoi, les Américains sont bien plus ouverts d'esprit qu'on ne l'imagine en matière d'automobile...
Déposer un commentaire
Alerte de modération
Alerte de modération