Baisser la TVA à 5,5 % sur le carburant : l'impossible promesse du RN de Jordan Bardella
Au soir du 30 juin, le Rassemblement National, avec Jordan Bardella en tête de file, sort vainqueur du premier tour des élections législatives. Parmi les promesses du programme du parti, celle de baisser la TVA sur les carburants de 20 % à 5,5 %. Alléchant, mais impossible, selon les règles de L'Union européenne.
La promesse est alléchante, pour tous ceux qui ne peuvent se passer de voiture, roulent beaucoup et/ou ont du mal à boucler les fins de mois. Car oui, le Rassemblement National, avec à sa tête Jordan Bardella, propose dans son programme politique, et avec une application "dès cet été" avant les départs en vacances, de baisser la TVA (Taxe sur la valeur ajoutée) de 20 % à 5,5 % sur "tous les produits énergétiques". Dont les carburants font évidemment partie.
C'est une des mesures fortes qui concernent le pouvoir d'achat des Français, avec celle de baisser le prix du gaz et de l'électricité. Cela ferait passer le prix du litre de sans-plomb 95-e10 de 1,83 € en moyenne à 1,55 €, celui du gazole de 1,76 € à 1,48 €. Soit une économie d'environ 14 € sur un plein de 50 litres. Pas négligeable.
Au-delà du débat qui consiste à se poser la question de savoir si cela est souhaitable pour accompagner la transition écologique, il est une autre question qui est celle de la faisabilité de la chose. En résumé : cette promesse est-elle tenable ? Les règles de l'Union européenne répondent en réalité non à cette question.
En effet, pour parvenir à respecter ses engagements climatiques et en matière de baisses des émissions de CO2, l'UE a émis des lois et règlements. Et si en effet pour le gaz ou l'électricité, la possibilité est ouverte de baisser la TVA, y compris à 5,5 %, ce n'est pas la même histoire pour les carburants.
Baisser la TVA à 5,5 % serait complètement illégal sans revoir les textes européens
En effet, une directive européenne de 2006, révisée en 2022, prévoit, pour harmoniser la fiscalité au sein de l'Europe, que le taux de TVA normal soit au minimum de 15 %. Il existe la possibilité de déroger à cette règle pour 29 catégories de bien et services, et de descendre alors à 5 % minimum, sans devoir demander de dérogation à Bruxelles, et ce sans limite de temps. Mais vous l'aurez compris, les carburants n'en font pas partie !
Baisser la TVA à 5,5 % sur les carburants en France serait donc illégal en l'état actuel des choses. Il faudrait changer les règles. Sur l'antenne de nos confrères de RTL, Jean-Philippe Tanguy, le "monsieur économie" du RN affirmait qu'il anticipait "une négociation "ardue"" avec Bruxelles pour obtenir une dérogation temporaire, avant d'obtenir une dérogation définitive. Or, dans les textes européens, il n'est pas prévu de possibilité de demander une dérogation pour les carburants, a observé Vincent Couronne, enseignant en droit à l'Université de Versailles-St-Quentin-en -Yvelines, interrogé par l'AFP (Agence France presse).
Le RN affirme que si, prenant en exemple la Pologne, qui a obtenu une dérogation et baissé la TVA sur le carburant dans le pays de 23 % à 8,5 % pendant 18 mois. En réalité, cela a été le cas pendant 10 mois, entre février et décembre 2022, au début du conflit entre Russie et Ukraine. Une mesure exceptionnelle, dans un contexte exceptionnel de flambée des prix de l'essence, dont la France a pâti aussi. Il n'y avait à l'époque plus besoin de dérogation. Mais depuis, le taux est revenu à 23 %.
Le RN pourrait donc éventuellement baisser la TVA sur les carburants aux 15 % minimum fixés par l'UE (Marine Le Pen l'a affirmé à nos confrères du Monde le 25 juin) mais pas à 5,5 %. Et ils pourraient baisser la TICPE (taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques), qui est un droit d'accise (un impôt indirect) et non une taxe. Mais selon Vincent Couronne, cette procédure prendrait des mois.
Impossible donc de tenir la promesse, ni en termes de timing, ni en termes de baisse. Il risque donc d'y avoir des déçus. Sauf dans le camp écologiste.
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