La toute première émotion qui vient lorsqu’on entre dans un Cayman n’est ni la joie, ni l’enthousiasme. Une Porsche n’engendre pas ce genre de sentiment (à l’arrêt tout du moins), non, on ressent comme un mélange de satisfaction et de soulagement lorsqu’on se glisse dans ce baquet. Sans surprise et de bon goût (germanique quoi !), cet habitacle s’amuse à intégrer des équipements technologiques modernes dans un habillage dont une des qualités est de s’inscrire dans l’histoire. Les 3 cadrans ronds, la clé à insérer à gauche, la position de conduite parfaite, la jante du volant juste comme il faut, on sait être dans une Porsche, on est rassuré et prêt à prendre la route. En fait, tout respire la réflexion et ce n’est pas le système de porte-gobelets extrêmement sophistiqué ou le vide-poches ouvrant qui prouveront le contraire. À l’allumage – à la clé – le flat6 s’ébroue sans bruit. Ou plutôt si, c’est un bruit sans aucun intérêt.


Accro(ché) au bitume


Essai vidéo - Porsche Cayman et Cayman S (type 981) : prédateurs à sang froid

Nos autos d’essai ne sont pas équipées de l’échappement sport qui est une option à 2 176,72€ mais sont par contre attifées du Pack Sport Chrono (Suspension du bloc moteur-boîte pour contrecarrer l’inertie en courbe, touche Sport Plus qui s'ajoute à la touche Sport, Chronomètre central, Launch Control avec PDK seulement et réglages spécifiques de la suspension et de l’ESP) à 1 600 €, du PASM (suspension active et réduction de 1 cm de la garde au sol) à 1 435,20 € et du PTV+ à 1 300 €, un système de vecteur de couple qui gère la répartition de la puissance en continu (et jusqu’à 100 %) sur les roues arrière pour améliorer la motricité en sortie de courbe mais également l’inscription.


Comme nous avons aussi droit à la monte pneumatique optionnelle de 20 pouces (Pirelli P Zero 265/35) contre des 18’’ (235/45) d’origine, autant dire tout de suite que sur le Cayman PDK 2,7 l 275 ch, nous n’avons jamais réussi à prendre la motricité en défaut. Et pourtant, il a flotté toute la journée et ce ne fut pas faute d'avoir soudé la pédale de droite à la corde des larges et grandes enfilades au-dessus des Baux de Provence. Bien qu’assez expressif pour offrir un 0-100 km/h en 5.6s, le flat6 2,7 l accouplé à la PDK et au PTV+ ne parvient jamais à dépasser la capacité de grip de l’essieu arrière. C’est étonnant au point de douter que l’on a préalablement désactivé le PSM (Porsche Stability Management, un ESP amélioré). L’efficacité même sur sol pourri est incroyablement bluffante pour un engin que j’imaginais autrement plus joueur. En fait, ce Cayman évolue avec une sérénité absolue quel que soit le terrain, les amorces de dérobade sont tout de suite contrées par le PTV+ et avant cela, le freinage bêtement classique (disques de 330 mm, étriers fixes 4 pistons, refroidissement amélioré et assistance ABS et ABD) aura œuvré pour consolider la réputation de grande freineuse des Porsche. Dès lors, bien aidées également par l’augmentation des voies avant de 40 mm, les vitesses de passage en courbe atteignent très vite le déraisonnable… pour le reste de la population automobile mais sûrement pas pour le conducteur, qui ne transpire pas ou si peu ! Le comportement du 3,4 l 325 ch est identique à peu de chose près à son homologue d'entrée de gamme, un « peu de chose » que l’on peut facilement quantifier en soustrayant 275 à 325 ch, soit 50 ch. Un bonus de puissance qui ne parvient à déborder le grip des Pirelli de 20'' que sur les premiers rapports et en exagérant franchement. Ce grip phénoménal est-il dû à l'action du PTV+ et à la monte large, c'est une question à laquelle je ne pourrai pas répondre puisque nous n'avons pas essayé d'autre configuration.



Moteurs : l'élastique c'est fantastique


Ces deux moteurs se caractérisent par une allonge étonnante caractéristique des atmosphériques « super carré » (faible course) en pleine santé. Ils prennent tous deux 7 800 tr/mn avant que le passage au rapport suivant devienne obligatoire. Revers de la médaille, pour en tirer la quintessence, il faut en permanence surfer très haut entre 4 500 (valeur de couple maximale) et 7 400 tr/mn (valeur de puissance maximale). On note à ce sujet que le calibrage sonore est parfaitement en accord avec le caractère moteur puisque lorsque le flat6 se met à chanter, c’est que vous entrez dans la « bonne » plage. En dehors de cela, il reste très discret et c'est parfait comme ça. Seule la vigueur de la prise de vitesse est différente avec le 3,4 l plus coupleux (370 Nm à 4 500 tr/mn contre 290 Nm) qui consent par moments à déborder l’essieu arrière. Mais quand cela arrive, la reprise de grip est parfois violente et on imagine alors que le même modèle en roues de 19’’ livrées d’origine sur le Cayman S doit offrir une plus grande progressivité. Un choix qui se trouve appuyé par le fait que l’embrayage (boîte manuelle sur notre Cayman S) a visiblement eu du mal à supporter ce grip phénoménal lors d’un usage intensif d’une semaine par différents journalistes. Cette boîte manuelle bien guidée est plutôt ferme à l’usage et propose une fonction qui donne un petit coup de gaz au rétrogradage déjà vue sur le Nissan 370Z. Toutefois, pour en bénéficier, vous devez basculer en mode Sport Plus (pack Sport Chrono) et laisser le contrôle de stabilité actif ! Porsche doit donc estimer que si vous roulez sans ESP, c’est que vous savez faire le talon pointe !


Essai vidéo - Porsche Cayman et Cayman S (type 981) : prédateurs à sang froid

Autre source de satisfaction sur ces deux flat6, la consommation réelle ne s'abandonne pas dans des excès surréalistes comme c'est le cas parfois lorsqu'on triple presque les valeurs d'homologation sur d'autres moteurs. Ici, sur un essai de plus de 220 km où l'on a alterné dans des proportions à peu près égales conduite en ville et sur nationale aux allures légales et séquences nettement plus vigoureuses où il vaut mieux regarder la route plutôt que son compteur, la consommation du Cayman 2,7 PDK s'établit à 13,8 l/100 km, celle du Cayman S en boîte manuelle réclamant à peu près 2 l/100 km de plus pour le même type de parcours. En utilisation quotidienne, cela doit pouvoir tourner autour de 10 l.


PDK de K-li-T


Essai vidéo - Porsche Cayman et Cayman S (type 981) : prédateurs à sang froid

Concernant la boîte PDK, il sera préférable de la commander via les palettes solidaires au volant (au clic délicieusement mécanique) car le levier présente deux petits défauts. D’une part, son maniement s’opère en opposition aux transferts de masse naturels, il faut tirer pour rétrograder et pousser pour monter les rapports puis, lorsque vous êtes en mode Drive et que vous pensez par erreur être en mode Manuel, l’action de pousser le levier vers l’avant pour monter un rapport vous fait automatiquement passer au point mort puisqu’aucun verrouillage n'empêche de passer de Drive à Neutral. S’ensuit une montée rageuse dans les tours pas franchement attendue qui, lorsqu’elle survient au moment de dépasser un autre véhicule, surprend tout le monde, vous le premier (qui passez accessoirement pour un baltringue auprès du gars doublé qui ne comprend pas pourquoi la voiture à sa gauche hurle à la mort et n’avance plus !). Hormis cela, cette PDK améliorée ne mérite plus sa mauvaise réputation, elle est parfaite dans quasiment tous les cas de figure d’utilisation, même les plus sportifs, et tellement plus reposante que la boîte manuelle au maniement franchement viril qui fatiguera très vite les « petits mollets » en ville. Et comme elle offre une fonction Launch Control (avec l’option Pack Sport Chrono qu’il faut prendre en plus !) qui fait tomber les chronos de 3 dixièmes, elle devient vite incontournable.


Cayman des villes et des champs (et des pistes)


Le plus étonnant dans le tableau global qu’offre le Cayman reste finalement sa polyvalence d’usage, rien moins qu’hallucinante. La première mouture était réputée pour cela, cette deuxième affine encore la donne. Aussi fou que cela puisse paraître pour des amateurs de sportives, parler du Porsche Cayman, c’est aussi parler de sa contenance de coffre. Oui, impossible de passer sous silence les 425 l et un peu plus de capacité de chargement répartis entre avant (150 l, un homme peut entrer dedans !) et arrière (275 l + 162 l si l'on charge jusqu'au plafond !), un volume supérieur à une berline de segment C ! Une 911 n’offre que 150 l… et deux embryons de places arrière aussi, il est vrai. Certes, vous n’irez pas acheter votre buffet de salon chez Ikea avec votre Cayman mais vos tables de chevet oui ! Autre faculté étonnante du Cayman absolument indispensable pour un usage quotidien, le compromis de suspension. Nos autos équipées du PASM optionnel (Porsche Active Suspension Management à ne pas confondre avec le PSM qui est l’ESP) proposaient ainsi une touche modifiant la fermeté de l’amortissement qui eut la délicatesse (c’est le mot) de ne jamais être cassant. Le mode « Normal » se montre capable d’avaler joyeusement toutes les cochonneries qui se présentent (en tout bien tout honneur évidemment) sans jamais vous enfoncer le cou entre les omoplates ! Et comme cette capacité d’absorption aidée des assistances électroniques vous permet de garder également du pouvoir directionnel et que le freinage se révèle encore efficace sur les bosses, vous arrivez à prendre des vitesses inavouables sur de petites routes défoncées sans que jamais la goutte ne perle à votre front. Et croyez-moi, ça n’est pas donné à tout le monde dans la catégorie.


Quant à la nouvelle direction électromécanique qui permet quelques économies de carburant, rien à redire, on l’oublie très vite puisqu’elle répond à vos exigences les plus précises sans aucune approximation, ni retard. Tout ce qu'on lui demande en somme.