« Oui, mais de toutes façons, la pollution, c’est surtout à cause des industriels. Et puis, ce sont les américains qui polluent le plus. Et attendez que la Chine et l’Inde s’y mettent vraiment aussi. En plus, mon voisin vidange sa voiture dans son jardin, alors hein… ». Des discussions comme ça, on peut en entendre tous les jours, et pas qu’au bistrot. Elles arrivent généralement quand on tente de modifier les habitudes de consommation des français. Le pollueur, c’est toujours l’autre, c’est facile et pas cher.
Pourtant, nous arrivons à un stade où la pollution devient le problème de tous, de l’industriel texan à l’agriculteur picard, en passant par le lecteur fidèle de Caradisiac : chaque effort allant dans le bon sens, aussi petit soit-il, est appréciable.
Cela commence par des gestes simples : trier ses ordures, économiser l’énergie et l’eau chez soi (l’étape avant « économiser » étant « arrêter de gaspiller »), favoriser les transports en commun et faire la hola quand Nicolas Hulot apparaît à la télévision. Dès le 1er Janvier 2007, un autre moyen de réduire son empreinte carbonique sera offert au particulier français : l’E85
L’E85 en questions
L’E85 : qu’est-ce que c’est ?
L’E85 est ce qu’on appelle un biocarburant constitué à 85% d’éthanol (d’où son nom) et 15% d’essence d’origine fossile indispensable pour l’instant pour autoriser les démarrages à froid. Cet éthanol peut être produit à partir de l’amidon contenu dans les végétaux : blé et orge en Suède, canne à sucre au Brésil, maïs aux Etats-Unis. Cette solution fait frémir nos écologistes à œillères qui voient en ce mode de production la porte ouverte à la famine mondiale et à l’agriculture intensive avec force pesticides et organismes génétiquement modifiés. Que cela ne tienne, on peut aussi obtenir de l’éthanol avec de la cellulose venant de paille, de copeaux de bois ou de résidus forestiers, avec à la clé des rendements supérieurs et une transformation qui nécessite moins d’énergie.
En 2004, l’agence internationale de l’énergie, qui fait partie de l’OCDE, a d’ailleurs publié une étude estimant que les ressources mondiales en biomasse suffisent pour permettre aux biocarburants tels que l'éthanol de répondre aux deux-tiers des besoins en énergie actuels du transport dans le monde. Cependant, produire de l’E85, c’est bien, mais il faut que cette production elle-même ne soit pas déjà une source de pollution. Cela fait partie des priorités des producteurs qui visent le « zéro émission » d’un bout à l’autre de la chaîne, reposant sur le choix du type de la biomasse utilisé comme matière première et du processus de production. Est-ce pour autant la solution miracle que tout le monde attend ?
L’E85 : à quoi ça sert ?
Un véhicule fonctionnant à l’E85 émet autant de CO2 qu’un autre roulant à l’essence. Je vous vois froncer les sourcils, une pratique exprimant votre incompréhension et favorisant malheureusement l’apparition prématurée de rides disgracieuses sur votre visage poupin. Détendez-vous, l’explication arrive.
Il y a en fait du bon et du mauvais CO2, comme il existe du bon et du mauvais cholestérol, les bons chasseurs et les mauvais chasseurs. L’éthanol est produit principalement à base de végétaux. Ces derniers ont toute leur vie absorber goulûment du CO2, et c’est ce même CO2 qui est relâché dans l’air lors de la combustion de l’éthanol, ce qui forme un cycle fermé. C’est donc du bon CO2, qui a d’abord été consommé puis rejeté. Celui créé à la combustion d’essence d’origine fossile ne fait par contre partie d’aucun cycle, il est tout simplement libéré. C’est le mauvais CO2.
Non, ce n’est donc pas une solution miracle, mais en 2006, c’est ce qu’il y a de plus abouti et de plus facile à mettre en place dans le domaine de la réduction des émissions de gaz à effet de serre pour les véhicules. Faut-il pour autant l’ignorer et attendre patiemment la fin du développement des voitures à hydrogène dans 10 ou 20 ans ? L’E85 reste la seule solution à court et à moyen terme.
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