Plans de Mobilité : les transports alternatifs se développent, avec ou sans eux…
Servir de cadre réglementaire pour favoriser la mobilité durable et par conséquent, limiter le trafic routier et la pollution dans les zones urbaines, tel est le sens des Plans de Mobilité (PDM) instaurés en janvier 2018. Qu’en est-il de leur mise en application deux ans plus tard ? Quelles offres de déplacements alternatives se sont développées, avec ou sans leur concours ? Éléments de réponse.
C’est l'article 51 de la Loi de transition énergétique pour la croissance verte (août 2015) qui avait posé les bases des Plans de Mobilité (PDM). Ceux-ci ont pour but de favoriser l’usage des modes de transport alternatifs à la voiture individuelle, expose l’Ademe, l’Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Énergie, établissement public dépendant à la fois du Ministère de la Transition écologique et du Ministère de l'Enseignement supérieur.
Une obligation légale à ce jour peu respectée
Depuis le 1er janvier 2018, les entreprises rassemblant plus de 100 travailleurs sur un même site et qui sont implantées dans le périmètre d’un Plan de Déplacements Urbains* (PDU) ont l’obligation d’élaborer un Plan de Mobilité. Objectif : optimiser l'efficacité des déplacements liés à leur activité économique, réduire le trafic routier et diminuer les émissions polluantes, tout cela à travers un ensemble d’actions concrètes et pérennes.
En théorie, selon les chiffres de l’Ademe, 17 348 établissements en France seraient concernés par cette réglementation. Sauf que sur le terrain, la majorité des entreprises ciblées n’ont pas encore rempli leurs obligations.
En janvier dernier, soit un an après l’entrée en vigueur de la législation, l’Ademe annonçait un taux de conformité de seulement 8 %. De son côté, François Piot, Président de l’Arval Mobility Observatory (AMO) remarque que 30 % des entreprises interrogées dans un questionnaire daté de mars 2019 « disaient » avoir respecté la loi. C’est 16 points de mieux qu’en 2018 selon le baromètre de l’AMO. Il y aurait donc du mieux quant à l’adhésion, mais on est semble-t-il encore loin du compte…
Des solutions paradoxalement en plein essor
Pendant ce temps, les offres de mobilité durable déploient leurs ailes avec de plus en plus de conviction. Dans la plupart des entreprises qui jouent le jeu, l’application des PDM s’est traduite sur le terrain non seulement par un encouragement à utiliser les transports publics, mais surtout par la multiplication de services tel que le covoiturage d’entreprise.
Plusieurs acteurs se partagent le marché français, avec des applications souvent éponymes comme Weepil, Karos, BlaBlaLines ou encore Klaxit. Klaxit, actuel leader français et européen du covoiturage sur les trajets domicile-travail, compte 270 entreprises clientes, parmi lesquelles la moitié des groupes du CAC40 (Carrefour, Renault, Orange, entre autres), mais aussi une trentaine de collectivités locales, dont Nantes Métropole par exemple.
Forte demande pour le covoiturage d’entreprise
L’impact provoqué par les Plans de Mobilité, la start-up fondée en 2014 confie l’avoir ressenti. « Nous avons constaté que 40 % des entreprises qui ont souscrit notre solution depuis 2018 ont effectué la démarche en lien notamment avec l’obligation du Plan de Mobilité », constate Julien Honnart, Président et fondateur de Klaxit. « Nous avons d’autant plus de demandes (de la part d’entreprises ou de groupements d’entreprises) que notre solution arrive à maturité et que le covoiturage en entreprise devient de plus en plus la norme. Les entreprises peu ou mal desservies par les transports en commun et ne proposant pas une alternative telle que le covoiturage sont aujourd’hui de plus en rares, au risque d’être mal perçues par leurs salariés. » Des salariés qui, selon Klaxit, y trouvent leur compte en mutualisant leurs véhicules personnels. « En étant conducteur, vous économisez jusqu’à 2000 €/an sur votre budget auto », argumente le fournisseur de services.
Télétravail, vélo et autopartage, avec ou sans PDM…
Parmi les autres idées qui se développent actuellement figure le télétravail, une solution finalement complémentaire à l’usage des transports alternatifs. Cette forme d’organisation est adoptée notamment par les grands comptes (Axa ou Lyreco pour ne citer qu’eux). Dans une récente étude de l’Arval Mobility Observatory, 71 % des sondés ont placé le télétravail en tête des solutions découlant directement des Plans de Mobilité, ex aequo avec le covoiturage.
Parallèlement, on note un intérêt toujours plus prononcé pour le vélopartage, porté par des sociétés telles que B2eBike, Green-On ou encore Mobility Tech Green. Celle-ci s’illustre d’ailleurs également sur le champ de l’autopartage, une formule qui se classe au troisième rang des alternatives plébiscitées.
L’instauration des Plans de Mobilité a-t-elle dynamisé la demande pour cette société implantée à Rennes depuis 2009 ? « Oui, la demande s’est accélérée mais je dirais que les PDM ne sont pas les seuls vecteurs d’explication, il y a aussi l’effet des Plans de Déplacements Urbains », ajoute Alexandre Fournier, Directeur Marketing & Communication, qui assure que les entreprises qui optent pour l’autopartage « réduisent la taille de leurs parcs de 25 % en moyenne, ce qui est vraiment intéressant en termes de budget. » Numéro 1 européen sur la cible B2B (Business to Business), Mobility Tech Green affiche un objectif de 10 000 véhicules intégrés dans les flottes dès 2020. Notez que plusieurs autres marques sont aujourd’hui expertes dans l’autopartage en entreprise, à l’image de Free2Move, Car2Use ou encore Drive & City.
Les « forfaits mobilité » pour valoriser les « plans » ?
Bien que les solutions alternatives à l’usage de la voiture individuelle confirment leur attrait, leur évolution ne découle pour l’instant que partiellement des Plans de Mobilité. Pour beaucoup d’observateurs, le principal écueil que rencontrent les Plans de Mobilité, c’est leur déficit de notoriété. En effet, il y a encore beaucoup d’entreprises qui ne connaissent pas cette obligation ou, lorsqu’elles en ont entendu parler, ne savent pas vraiment ce qu’elle recoupe.
Le petit coup de pouce qui, potentiellement, permettrait aux Plans de Mobilité de gagner davantage en visibilité pourrait émaner d’une autre législation, de la Loi d’Orientation des Mobilités. Le projet de loi LOM contient en effet une mesure sans doute plus parlante et incitative, qui s’intégrerait en définitive à ces fameux Plans de Mobilité. Il s’agit de l’instauration des « Forfaits mobilité durable », applicables théoriquement à partir du 1er janvier 2020. Ces forfaits donneront la possibilité aux établissements comptant plus de 50 salariés de verser jusqu'à 400 €/an sans charges ni fiscalité à chacun de leur collaborateur utilisant le covoiturage ou le vélo pour se rendre au travail.
*Un PDU est un document de planification obligatoire dans les agglomérations de plus de 100 000 habitants, qui détermine pour une durée de 5 à 10 ans l’organisation du transport des personnes et des marchandises, la circulation et le stationnement. (Source Ademe)
L’Ademe et les CCI en soutien aux Plans de Mobilité
Différents soutiens techniques et financiers sont proposés aux entreprises pour les aider dans le montage d'un projet de Plan de Mobilité. L’Ademe rappelle ainsi que le conseil en mobilité de chaque collectivité locale est chargé d’accompagner la mise en œuvre des PDM et qu’à ce titre, cette Autorité Organisatrice de la Mobilité, connue aussi sous le sigle AOM, peut faciliter les aménagements et améliorer l’offre de mobilité alternative.
L’Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Énergie précise d’autre part que le réseau des Chambres de Commerce et d’Industrie (CCI) peut jouer un rôle complémentaire en termes de conseil et d’animation.
En guise de méthode pédagogique, les deux organismes, en partenariat avec le Réseau Action Climat France, ont édité dès 2018 un guide pratique de 25 pages à destination des dirigeants d’entreprises. On y apprend entres autres que de nombreuses collectivités locales ont mis en place des dispositifs et labels visant à promouvoir les Plans de Mobilité d’Entreprises sur leurs territoires.
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