Voitures pré-1997 interdites à Paris : pourquoi c'est une injustice ? (reportage vidéo)
À partir de vendredi 1er juillet, les voitures immatriculées avant le 1er janvier 1997 n'auront plus le droit de rouler en semaine de 8 heures à 20 heures du lundi au vendredi. Une mesure dont la portée écologique fait débat, et qui suscite la polémique en frappant les automobilistes les plus modestes
Jean-Noël, automobiliste parisien et possesseur d'une BMW Série 3 essence de 1995 régulièrement acceptée au contrôle technique et dont il est très content, n'en revient toujours pas: "à partir de vendredi, je vais être considéré comme un paria alors même que ma voiture fonctionne encore parfaitement. Je fais des aller-retour en lointaine banlieue deux à trois fois par semaine, dans une zone inaccessible par les transports en commun, et on veut m'empêcher de circuler au prétexte de pseudo-arguments écologiques? C'est dégueulasse, je n'ai pas les moyens de changer de voiture. Ils frappent les plus faibles, comme d'habitude. Quand je pense que j'ai voté pour cette majorité municipale dite de gauche..."
Comme Jean-Noël, ils sont quelques milliers d'automobilistes concernés par l'interdiction de circuler qui entre en vigueur ce vendredi 1er juillet. Combien exactement? Le Monde rappelle que sur un total de 750 000 voitures particulières immatriculées, Paris compte 50 000 voitures d’avant 1997 (pour 420 000 en Ile-de-France). Quant à la mairie de Paris, elle estime que les restrictions de circulation ne concerneront que 4 400 voitures individuelles sur les 400 000 circulant chaque jour dans la capitale. Oui, 4 400 voitures qui ne circulent pas tous les jours et dont les propriétaires n’ont pas forcément les moyens de procéder au remplacement. Et ce sont eux, les moins argentés, qui se trouvent pénalisés par une mesure à la portée écologie purement symbolique. Dur !
Même si des mouvements fédérant les mécontents se sont formés, de la "Ronde des bannies" (à l'initiative du magazine Youngtimers) à l'association 40 millions d'automobilistes qui a lancé la pétition en ligne "Rembourse ma bagnole", les mesures sont bel et bien entrées en vigueur ce matin. Une première phase de sensibilisation courra jusqu'au mois d'octobre, à la suite de laquelle les forces de l'ordre procèderont à la verbalisation des contrevenants (35 € dans un premier temps).
Et en attendant, que faire? Jean-Noël, lui, a choisi la voie de la résistance: "Je vais emprunter des axes moins fréquentés pour sortir et rentrer dans Paris, en espérant ne pas croiser les forces de l'ordre ou en espérant que celles-ci se montreront indulgentes. J'ai d'ailleurs parlé avec un policier tout à l'heure qui m'a dit être dans la même situation que moi. Je n'habite pas trop loin du périph', on verra bien. Heureusement qu'il est là, ce périphérique. Il bloque la pollution dans Paris comme la frontière française le nuage de Tchernobyl..."
Même bien entrenues et satisfaisant aux contrôles antipollution en vigueur, les voitures un peu âgées ne sont plus les bienvenues à Paris. Précisons toutefois que les voitures de collection (âgées de plus de trente ans) ne sont pas concernées par ces mesures d'interdiction. (photo Pierre Desjardins)
Marché de l’occasion : les effets de l’interdiction
Si la mesure prise par Paris fait débat sur le plan de son impact écologique réel, elle n’en fera aucun concernant celui sur le marché de l’occasion.
En effet, c’est très simple. Les voitures d’avant le 1 janvier 1997 ne peuvent plus circuler dans Paris en semaine ? Eh bien la valeur en occasion de ces véhicules, possédés par les parisiens bien sûr, mais aussi plus largement par les habitants d’Ile-de-France, est aujourd’hui réduite à peau de chagrin.
Il sera impossible, sauf miracle, de revendre ce type de véhicule à un parisien ou à un francilien se rendant régulièrement dans la capitale. De ce côté, point de salut. Tout juste pourra-t-on envisager de revendre son auto, dont la valeur, même pour ces années-là, peut atteindre 2 500 à 3 000 € (on ne parle pas bien entendu des véhicules de collection…), à un automobiliste résidant en province, peu amené à se rendre dans Paris.
Mais là encore, il ne faut pas sous-estimer l’effet psychologique du « voiture interdite » au global, sur la cote. Tout comme les secondes mains à gros moteur, pourtant non concernées, avaient pâtit de la mise en place du bonus/malus sur les neuves. Et cela deviendra un argument utilisé à coup sûr par les acheteurs pour faire baisser le prix, même à Tulle ou Cambrai.
Concrètement, pour un francilien, revendre à un autre sera quasi-impossible, le véhicule aura une valeur 0 ou approchant. Et pour les ventes hors Ile-de-France, la valeur des véhicules d’avant 1997 sera réduite, selon nos estimations, d’au moins 20 %, jusqu’à 50 %, et la décote sera d’autant plus importante que l’on s’approchera de la capitale. Pour une auto valant encore 3 000 € avant la mesure, la perte financière n’est pas négligeable ! A tel point que l’association 40 millions d’automobilistes a lancé un site, pour que les concernés puissent demander à Anne Hidalgo le remboursement de leur auto, invendable : http://www.remboursemabagnole.com/
Parisiens, franciliens ! Vos Clio 1 de 1996 ne valent plus rien (exemple parmi tant d’autres), sachez-le. Alors gardez-les pour ne les utiliser que le week-end ou faites un beau geste en les donnant à votre famille provinciale. Mais vous y serez de votre poche si vous êtes contraint de racheter un véhicule plus récent.
Justement, soyez vigilants dans ce cas, ne vous précipitez pas sur une voiture de 97 ou de 98 (dont les cotes pourraient justement s’apprécier, du fait d’une demande plus forte). Car la mesure sera sévérisée dès l’an prochain… En juillet 2017, ce sont tous les diesels d’avant janvier 2001 qui seront bannis. Ce qui fera encore chuter les prix des occasions concernées.
Finalement, il n’y a que du côté des acheteurs de province que c’est une bonne nouvelle. De bonnes affaires seront à faire !
Manuel Cailliot
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