La Peugeot 9X8 victime du règlement ?
Les performances décevantes de la Peugeot 9X8 s’expliquent-elles par l’évolution de la réglementation du championnat WEC après le développement de son concept technique ? C’est ce que laisse entendre le directeur du programme chez Peugeot Sport.
Lancée en course à la fin de la dernière saison, la Peugeot 9X8 peine pour l’instant à se mettre au niveau des machines les plus performantes dans la catégorie reine de l’endurance. Le joli proto français n’a jamais réussi à suivre les invincibles Toyota ou les prometteuses Ferrari cette année. Alors qu’elle commence à bénéficier d’une relative expérience, elle a aussi souffert de nombreux problèmes de fiabilité au début de l’année. Les choses se sont nettement améliorées au sujet de cette fiabilité lors de la dernière épreuve des 6 Heures de Spa, mais l’auto reste assez loin du rythme des meilleures LMH. De quoi susciter des nombreuses critiques auprès des fans et des médias, Peugeot étant attendu comme un potentiel vainqueur après avoir déjà remporté les 24 Heures du Mans au siècle dernier avec sa 905 et en 2009 avec sa 908 diesel. L’équipe de Peugeot Sport fait-elle du mauvais travail ou bien doit-elle composer avec des obstacles indépendants de sa volonté ?
Comme l’explique le directeur du programme de la 9X8 chez Peugeot Sport Olivier Jansonnie aux journalistes anglais de Motorsport, le concept aérodynamique très particulier de la 9X8 a été imaginé sur la base du règlement technique originel de la nouvelle catégorie LMH. Mais entre le moment où la 9X8 a été conçue et celui où la voiture a débuté en compétition, ce règlement technique a évolué sur des points importants : initialement, la largeur des pneus devait être de 31 cm pour les voitures utilisant une transmission intégrale (comme la Peugeot 9X8 ou la Toyota GR010) mais de 29 cm à l’avant et de 34 cm à l’arrière pour les pures propulsions (comme la Glickenhaus par exemple). Le châssis et l’aérodynamisme de la 9X8 ont été conçus sur la base de ces règles, fixant aussi la masse minimale obligatoire et la vitesse à partir de laquelle les autos à quatre roues motrices ont le droit de faire fonctionner leurs roues avant motrices.
Or, le règlement technique a ensuite évolué dans ces domaines. Toutes les autos peuvent désormais chausser des pneus larges de 29 cm à l’avant et 34 cm à l’arrière, ce qui induit un gros avantage de motricité. Toyota a adapté sa voiture en conséquence mais pas Peugeot : il se trouve que le concept aérodynamique très pointu de la 9X8 a été imaginé autour de ces pneus plus fins : « Cette règle pneumatique a conditionné toute l’architecture de l’auto jusqu’à l’absence de l’aileron arrière », explique Olivier Jansonnie. « Nous ne pourrions pas simplement changer les roues et les suspensions sans nuire à l’efficacité de ce concept. Le changement réglementaire est arrivé trop tard pour que l’on puisse l’intégrer à temps en 2022. Si on avait été mis au courant plus tôt de ce changement réglementaire, nous aurions orienté différemment le développement de la voiture ». Bref, Peugeot Sport s’est retrouvé piégé par ce contexte réglementaire.
Pas de sacrifices sur l’autel de la beauté
Il a aussi été dit que la Peugeot 9X8 a été conçue par les designers et les spécialistes du marketing avant les ingénieurs, l’auto affichant un design sculptural et une silhouette marquante. Olivier Jansonnie assume ce parti pris de concevoir une belle voiture, mais il se défend que cela se soit fait au détriment des performances de la voiture. Il rappelle aussi que le plus urgent est d’arriver à fiabiliser totalement la 9X8 et se montre optimiste quant au potentiel de performance de la voiture. Dans moins d’un mois, on saura si ce concept audacieux (bien qu’altéré par les modifications réglementaires) est compétitif sur le grand circuit du Mans. Sinon, peut-être que Peugeot devra ensuite revoir ce concept en profondeur pour développer une machine différente. Mais il faudra alors négocier avec les instances réglementaires car il n’est théoriquement pas permis de faire de grosses modifications sur la voiture pendant cinq ans après son homologation.
Peugeot pourrait également bénéficier après les 24 Heures du Mans d’un ajustement de la BoP, un système mis au point pour niveler le niveau des performances entre toutes les voitures. Mais cette BoP n’a malheureusement pas grand-chose de sportif dans l’esprit.
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