Interview : Bruno nous résume l'aventure des Marluches
Depuis 4 ans, le team Les Marluches avait en tête de participer à la légendaire course de côte de Pikes-Peak. Mais faute de moyen, le projet n'avait pas abouti. Mais il y a un an, l'idée de participer à cette course est revenu et toute l'équipe s'est donnée les moyens de réaliser un rêve vieux de plusieurs années. En 2008, Bruno et Sylvie se sont donc offert un joli cadeau d'anniversaire puisqu'ils fêtaient respectivement leur 50 et 40 ans : prendre le départ de Pikes Peak Hill Climbing. Une aventure que vous avez pu suivre sur Caradisiac Moto. Résultat : victoire dans la catégorie Side-car à 2 secondes du record de la catégorie. Il était donc normal d'avoir les réactions du pilote et de sa passagère après leur retour en France.
Bonjour Bruno. Tu as dû ramener de ton voyage un nombre incalculable de souvenirs. Quel est le meilleur ?
"Le plus beau souvenir ? C'est difficile, il y en a tellement. Franchement, c'est quand tu passes l'arrivée et que tu vois le drapeau à damier agité par le papy qui fait ça depuis des années, c'est fantastique. C'est une image que j'ai en tête depuis des année et là c'était nous. J'ai revu des photos ce soir et en fait, on tend le bras tous les 2 quand on passe la ligne, c'est vraiment très fort. "
Comment s'est passé la première semaine avant la course ?
"La première semaine, c'était vraiment vacances et nous avons essayé de résoudre tous les petits problèmes dans la préparation. Malgré tout ce que j'ai fait par mail avant notre arrivée nous avons eu pleins de petits soucis et des trucs pénibles à gérer. Par exemple, il me fallait une remorque de 6 pieds de large. J'en ai trouvé par mail, c'était réglé mais seulement, le loueur ne m'avait pas dit que la porte arrière était plus petite et du coup, le side ne rentrait pas. Et puis, il a fallu trouver un crochet d'attelage pour la voiture. Du coup, j'ai fini par trouver une remorque au bout de 3 jours mais ça prend beaucoup de temps et surtout beaucoup d'énergie. Et puis, il a fallu retrouver du bois et des vis pour réparer la caisse. Ce sont des petits soucis mais qui embêtent un peu surtout avec la barrière de la langue.
Le reste du temps, nous avons joué les touristes. Le Colorado est vraiment magnifique. Ils ont gardé la culture Far-west et tout est resté comme avant. C'est une ville très verte et vraiment joli. Les gens sont super sympas partout où nous sommes allés. "
Est-ce que c'est parce que vous veniez au Pikes Peak ?
"Non, c'est dans leur nature. Chez eux la course, est vraiment naturel. Le Pikes Peak est plus connu en Europe que chez eux. C'est un peu comme une foire de village. Au bout de 86 ans, ils sont un peu blasés. Pikes Peak est beaucoup plus connu en Europe que là-bas. La vidéo de Vatanen a vraiment marqué les esprits. Par exemple, en rentrant, j'étais assis à côté d'un jeune de 20 ans et il voit que j'ai un tee-shirt Pikes Peak. Il me demande si j'ai été le voir et je lui répond que non, j'y ai participé. Et il me répond, « oh génial, c'est la course avec la 405 en travers ». C'est génial parce qu'il n'était même pas né quand la vidéo a été faite mais il l'a connaît quand même. "
Cela vous fait un superbe cadeau ?
"Oui c'est sûr même si on est déçu pour l'histoire du record. "
Quand tu passes la ligne, est-ce que tu connais déjà ton temps ?
"Non, malheureusement non, on l'a reçu un peu plus tard. Ce qui nous a surpris, c'est que les pilotes voitures sont venus nous féliciter alors je ne sais pas si eux ont appris le temps mais je n'ai pas bien compris. Que les pilotes motos viennent nous féliciter, encore, j'aurai compris mais pour les pilotes autos, je ne sais pas trop. C'est après, quand on a vu le temps qu'on a fait que j'ai mieux compris. On a fait le 20e temps sur 70 au scratch voiture et 37e en moto sur 127. Je suis très content car le niveau était très élevé. Il y avait des grosses équipes officielles comme Buell, Aprilia, Ducati. "
Pourtant, en additionnant les meilleurs chronos des essais, vous étiez largement en dessous du record ?
"Oui, c'est vrai mais entre chaque section, il y a une partie que l'on ne fait pas et qui n'est pas chronométrée. C'est parce qu'il y a une zone de freinage et de parking pour l'arrivée de notre zone et il y a la même chose pour la zone suivante. En tout, il y a un bon kilomètre non chronométré aux essais. Du coup pendant la course, c'est la surprise puisque tu déboules dans une section que tu n'as jamais faite. Et puis, il y a eu un gros problème de chrono au premier passage de la dernière section.
Les pilotes qui avaient de l'expérience savaient qu'ils montraient 20 à 30 secondes moins vite et c'est ce qu'il s'est passé mais nous, on ne le savait pas. Ce qui c'est passé c'est que les derniers kilomètres de la piste était très abimés parce qu'il ont fait des travaux et les engins de terrassement ont défoncé la piste dans sa partie supérieure "
Est-ce que votre expérience de Rallye vous a aidé ?
"Les Top pilotes ont aussi trouvé la partie bitume glissante alors que nous, nous n'avons rien senti de particulier. Mais effectivement nous sommes des rallyman, on a l'habitude de gérer ce genre de truc comme de partir avec des pneus froids etc. Je pense que notre expérience nous a beaucoup aidé par rapport à un pilote de circuit ou de moto-cross. "
Vous avez raté le record pour 2 petites secondes sur plus de 13 minutes de courses. Il ne manquait pas grand chose ?
"Lors des essais, nous nous sommes aperçu que la dernier portion était moins bonne. Il y avait de grosses saignées ce qui l'a rendait dangereuse. Donc je n'ai pas voulu prendre de risque et j'ai rendu à 2 ou 3 endroits et les 2 secondes qui nous manquent sont largement dedans. Sur le coup, j'étais super content parce quand on est arrivé, il y a Monsieur Tajima qui est venu nous féliciter, ça nous a fait chaud au cœur, ensuite, on a bu un verre et nous avons eu notre chrono grâce à un mec d'une télévision. Quand j'ai vu qu'il nous manquait 2 secondes, j'avais les boules. Après, je me remémorais, tiens, j'ai coupé là et là etc mais c'était fait, c'était trop tard. Ensuite, quand on a vu qu'on était allé plus vite que des pro-truck de 600 ch, on était super contents. "
Lors des différentes montées, vous êtes-vous fait des frayeurs ?
"Oui, une seule petite aux essais le 2eme jours dans Devils Playgrounds. Il y a un gauche qui resserrait après une accélération en 3eme et a la première montée on est arrivé un peu vite, j'ai freiné fort et le side a fait une petite glisse pas bien méchante mais y avait 600m de vide en face. On a eu une petite montée d'adrénaline mais nous avons vite corrigé au passage suivant. Par contre, quand je vois les vidéos, je me fait peur. J'ai l'habitude de voir du rallye mais ça va très vite. A 140, tout en glisse dans la terre à voir que j'en remet, ça fait waouhh, c'est impressionnant. Mais j'étais vraiment à l'aise, le side a été merveilleux. "
As-tu la banane sous le casque ou tu es vraiment concentré ?
"Non, j'ai une banane terrible. Quand tu traverses la piste de long en large, tout en glisse, c'est un bonheur sans nom. "
Lors des essais, vous faites 5 à 6 passages sur chaque section. Est-ce que cela suffit pour apprendre la piste ?
"Oui complètement. Nous faisions les 1ères montées tranquilles. Et pendant les descentes on s'arrêtait pour voir les saignées, les trous etc. Le souci pour la course, c'est que les voitures partaient avant nous donc la piste avait un peu changée. A certains endroits, on a l'impression que c'est du bitume mais en fait c'est de la terre très tassée. Pendant une montée d'essai, on a été pris d'un fou rire parce qu'on a réussi à faire crisser les pneus sur la terre. "
Les pneus pluies retaillés étaient le bon choix alors ?
"Oui, j'avais bien analysé les vidéos et les photos et j'ai fait le bon choix. Je n'avais jamais roulé avec un pneu pluie à l'arrière mais ça s'est bien passé. La carcasse est plus molle donc l'arrière était plus flou mais nous avons bien géré la situation. "
As-tu senti la perte de puissance annoncée ?
"Ah oui, c'est terrible à partir de 3900 m, on sent bien la perte de puissance. Et puis, il y a une section où la pente est à plus de 11%, c'est un mur. L'aiguille de température était au ras du rouge. Il y a des voitures qui sont équipées de système d'aspersion d'eau sur les radiateurs. Même M. Tajima en a un. Mais si on doit y retourner, on changera les rapports de boite pour pouvoir prendre les épingles en 2 au lieu de remettre la 1ère sans arrêt. Je pense qu'il faudrait changer la couronne. "
Et physiquement, comment cela s'est-il passé ?
"Quand nous sommes allé visiter à pied le Pikes Peak, on avait du mal à faire 20 m dans les rochers. On avait l'impression d'être saouls. Mais aux essais, nous n'avons pas ressenti de douleur, pas de fatigue même si c'était des petites sections de 3 à 6 minutes. Par contre, le jour de la course j'ai souffert de l'assèchement. Nous avons eu très chaud en bas, il faisait 37°C et on est resté 1h30 là-bas. J'ai peut-être fait une erreur, je n'ai pas bu assez. En roulant, je passe les virages en apnée et du coup, je prend des grandes inspirations par la bouche et je me suis asséché la gorge. J'ai eu du mal à faire le dernier kilomètre mais physiquement, je n'ai pas souffert. Mais on a une bonne hygiène de vie donc ça aide.
Et puis nous avons l'habitude de rouler très détendus. En montant, je voyais gazelle faire des trucs sans trop comprendre mais en fait, en revoyant les vidéos, j'ai vu qu'elle faisait coucou à tout le monde. Elle est hyper détendue, je ne l'a sens pas du tout, c'est un vrai chat dans le panier."
Vous avez dû rencontrer plein de personnes ?
"C'est sûr que nous avons rencontré plein de gens sympas. Les gens de chez Apex Sport, les commissaires et tous les bénévoles qui organisent Pikes Peak. Dans l'hôtel, on s'est retrouvé avec des pilotes américains de renom comme Eddy Meurlay. C'est lui qui a gagné la catégorie Vintage. Il a un palmarès énorme. On a pris les repas ensemble, on a beaucoup discuté etc. M Tajima est super gentil aussi. C'est un grand champion japonais aussi et c'est le directeur de Suzuki Sport. Il a fait 19 fois Pikes-Peak.
C'est un trip géant et c'est difficile à exprimer. Tu vois par exemple, dans la descente, c'est super émouvant parce que tu as 7.000 spectateurs qui te font la haie d'honneur, qui te tapent dans la main, qui te disent 2 ou 3 mots en français. Gazelle était debout dans la panier. On n'a pas arrêté de pleurer pendant 3 jours après et c'est même émouvant d'en reparler. Ce sont 4 ans de rêve et 1 an de travail qui se terminent. Et pourtant, 13 minutes ça passe très vite alors qu'on ne roule jamais aussi longtemps en rallye. "
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