Enquête - Comment les Français passent (doucement) au vert
Une fois n’est pas coutume, livrons-nous à un exercice d’autosatisfaction pour constater que les automobilistes français passent (doucement) au vert. Les choses se font progressivement, et on se gardera bien de verser dans un greenwashing idiot, mais les tendances sont là et doivent être encouragées.
L’automobile est un élément quasi-indispensable à la vie moderne, tant dans le cadre familial que professionnel : selon une étude Ipsos/Vinci Autoroutes, 75% d’entre nous utilisent celle-ci pour se rendre sur leur lieu de travail, valeur qui s’élève même à 89% en milieu rural. Dans le même temps, ses détracteurs ne cessent de nous rappeler les conséquences néfastes qu'exerce l' «automobilisme » sur la planète, et notamment dans les grandes agglomérations où la pollution de l’air serait responsable de diverses maladies respiratoires, comme ces 4 millions de nouveaux cas d'asthme infantle répertoriés chaque année.
Nos chères voitures apparaissent donc aujourd’hui comme un mal nécessaire, en attendant le jour (lointain) où, parmi d’autres mesures, les entreprises du tertiaire se convertiront massivement au télétravail et où les professionnels se déplaceront exclusivement en véhicule électrique.
Dans l’intervalle, il faudra bien continuer à rouler. Mais le faire de façon plus raisonnée, et avec des véhicules plus propres. La bonne nouvelle, c’est que cette tendance est bel et bien initiée au niveau européen, ce qui se traduit dans l’hexagone par les évolutions que nous vous détaillons ci-dessous. Ainsi :
Les Français roulent plus…mais consomment moins de carburant
Le chiffre : +8,3% de kilométrage annuel moyen, mais -1,8% de consommation de carburant
D’après les données compilées par l’Union routière de France (URF), il apparaît que le kilométrage annuel moyen des français a augmenté de 8,3 % entre 2007 et 2017, pour atteindre un total de 429 milliards de kilomètres parcourus par les voitures particulières immatriculées en France. Le parc automobile aura crû de 1,8% sur la période, pour atteindre une densité de 503 voitures particulières pour 1 000 habitants.
Malgré ces augmentations, la consommation globale de carburant a baissé dans le même temps de 1,8%, ceci étant dû d’une part à la diésélisation du parc, et d’autre part aux progrès réalisés par les motoristes pour abaisser les consommations des véhicules.
Certes, on ne peut pas classer l’appétence pour le diesel comme une victoire environnementale, mais le fait est que cette technologie contribue à économiser la ressource-pétrole et à la réduction des émissions de CO2. La maîtrise desdites émissions s’annonce d’ailleurs comme un des défis des années à venir, à mesure que les motorisations essence reviennent en force, même sur des SUV par nature plus gloutons en carburant.
Les Français s’électrisent
Le chiffre : les électriques et hybrides représentent 6,8% du marché
Le marché de la mobilité électrique a ceci de particulier que l’offre crée la demande. On l’a encore constaté récemment avec l’arrivée de la Tesla Model 3, qui grâce à son démarrage foudroyant a pris la tête du marché européen des véhicules premium (toutes carrosseries confondues) au mois de mars. L’électrique accélère, et cela se traduit chez nous par des ventes qui progressent de façon spectaculaire avec 3 915 véhicules légers électriques immatriculés en avril. Ce chiffre traduit une progression de + 71 % par rapport à avril 2018. Dans le même temps, les hybrides rechargeables augmentent de 55% (1 307 immatriculations). « Les immatriculations de voitures particulières électriques augmentent de manière significative depuis septembre 2018. Cette tendance se confirme sur ce début 2019 avec une progression cumulée de + 50 % en un an ! », se réjouit Cécile Goubet, Secrétaire générale de l’Avere (Association nationale pour le développement de la mobilité électrique). Au premier trimestre, les voitures à moteur électrique et hybride ont représenté 6,8% du marché français, contre 5,9% un an plus tôt.
Les Français achètent des modèles récents (donc plus propres)
Le chiffre : 8 000 demandes hebdomadaires de prime à la conversion
Invité de RTL le 7 mai dernier, le ministre de la Transition écologique et solidaire François de Rugy s’y est réjoui du succès de la prime à la conversion, laquelle « n’a jamais aussi bien marché » : « on est à 8 000 demandes par semaine. Si l'on continue comme ça, ça fera plus de 400 000 Français qui bénéficieront d'une aide » (contre un peu plus de 260 000 l’an dernier, NDLR).
Rappelons que le montant de cette aide peut atteindre jusqu'à 4 000 € pour l'achat d'un véhicule thermique neuf ou d'occasion (émissions de CO2 inférieures ou égales à 122 g/km), et même 5 000 € pour l'achat d'un véhicule électrique ou hybride rechargeable neuf ou d'occasion. La seule condition pour bénéficier de ce coup de pouce est la mise au rebut d’un modèle essence pré-1997 ou un diesel pré-2001.
Les Français roulent (un peu) moins vite
Le chiffre : 80 (km/h...)
Inutile de consulter de grandes études pour constater que les Français roulent de moins en moins vite : entre le déploiement massif de radars et la mise en place de réglementations toujours plus strictes, dont les 80 km/h sont le symbole, tout concourt à un allégement du pied droit (et donc à une baisse de la consommation de carburant). Dans la dernière édition de son Observatoire des vitesses, la Sécurité routière précise ainsi que « de façon générale, les vitesses moyennes pratiquées en 2017 (avant les 80 km/h, NDLR) par les véhicules de tourisme et les véhicules utilitaires légers évoluent légèrement à la baisse par rapport à l’année 2016; on observe ainsi selon le type de réseau routier une stabilité de la vitesse moyenne ou une baisse de l’ordre de 1km/h. » Pas énorme, certes, mais à l’échelle du parc automobile, une baisse globale des vitesses ne peut être que bénéfique à l’environnement.
Les Français sont partageurs
Le chiffre : 15 millions d’adeptes du covoiturage
L’engouement pour le covoiturage va croissant, même si l’on manque de données globales pour mesurer l’ampleur du phénomène. On se référera toutefois à celles communiquées par BlaBlaCar, leader français (et mondial) du secteur avec 70 millions de membres dans 22 pays, dont 15 millions en France, dans l’étude qu’il a rendue publique en mars dernier. En 2018, les conducteurs et passagers BlaBlaCar ont permis d’économiser au total 1,6 million de tonnes de CO2, « soit l’équivalent des émissions générées par les transports à Paris en 1 an ! »
Mieux : chaque véhicule "BlaBlaCar" embarquerait en moyenne 3,5 personnes, valeur trois fois supérieure à l’usage normal. A l’échelle française, enfin, l’entreprise indique que ses activités ont permis l'an dernier l’économie de 272 746 tonnes de CO (émissions directes, induites et indirectes).
Bilan
Vert pâle (mais vert and même)
Un immense défi climatique nous fait face, et le secteur des transports (au sens le plus large) a encore de nombreux progrès à faire pour être à la hauteur des enjeux. On pourra objecter que les choses avancent encore bien trop lentement, mais force est de constater que la mobilité des Français évolue peu à peu dans le bon sens, avec un usage plus raisonné d'une automobile de moins en moins polluante.
Les progrès reposent sur plusieurs facteurs, qui vont de la diversification de l’offre de transport dans les agglomérations aux avancées technologiques de nos voitures. Mieux : on constate que les motorisations électriques et hybrides connaissent un engouement croissant, comme l’illustre la ruée sur la Tesla model 3 ou le démarrage spectaculaire de la Volkswagen ID.3, dont les pré-réservations ont commencé cette semaine. Sur ce marché, on l’a dit, l’offre crée la demande.
Quant à ceux d’entre nous qui, pour quelque raison que ce soit, n’ont pas les moyens ou l’envie de troquer un ancien véhicule contre un autre plus récent, qu’ils se consolent : en limitant le nombre de déchets, ils participent à leur manière à l’effort collectif pour un monde plus vert…
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