En BYD Seal à Courchevel : facile ?
Parce qu’une berline familiale électrique doit être non seulement capable d’emmener une petite troupe en vacances mais aussi d’affronter les conditions hivernales compliquées, nous avons décidé de partir à la montagne en BYD Seal, précisément à Courchevel, à environ 740 km.
En bref :
Berline familiale électrique
530 ch, deux moteurs
4 roues motrices
à partir de 49 990 €
Autonomie mixte constructeur : 520 km
Les spécialistes de l’automobile le savent : si le constructeur chinois BYD (pour Build Your Dreams – construis tes rêves en anglais) débarque tout juste en France, il est loin d’être débutant dans l’automobile, au contraire. C’est même, avant tout, un fabricant de batterie qui s'est ensuite diversifiée dans la mobilité, plus particulièrement électrique. Une trajectoire qui lui a permis d'atteindre des chiffres de ventes exceptionnelles, d'abord en Chine, puis à l'échelle mondiale, au point de faire trembler un poids lourd de la catégorie tel que Tesla depuis 2023…
L’arrivée de ce géant de l’industrie dans l’Hexagone soulève donc de nombreuses questions. D’autant plus qu’après le lancement d’une compacte Dolphin perfectible, la firme retente sa chance avec une familiale Seal plus prometteuse. Au programme : des proportions proches de celles des références Tesla Model 3 et BMW i4 (4,80 m de long), et surtout une batterie Lithium-fer-phosphate généreuse de 82,5 kWh brute (valeur utile non communiquée) qui, conjuguée à une aérodynamique peaufinée (Cx de 0,219), laisse augurer une autonomie respectable.
Mieux, elle propose, pour un tarif relativement contenu de 49 990 €, deux moteurs distribuant de concert 530 ch aux quatre roues dans cette déclinaison 3.8s, dont l’appellation fait référence à sa capacité d’accélération sensationnelle de 0 à 100 km/h. Une excellente voyageuse donc, du moins sur le papier… À confirmer dans la pratique, et dans les conditions hivernales, forcément plus compliquées pour la batterie… C’est ce que nous allons faire en partant du nord de Paris (plus précisément de l’Oise) pour nous rendre à Courchevel, environ 740 km plus bas, en compagnie (du moins au début du trajet), des autres membres de la rédaction qui ont également choisi des stars ou nouveautés importantes "zéro émission"pour se rendre à la montagne.
Bien entendu, impossible d’envisager l’autonomie moyenne annoncée de 520 km (qui signifierait un seul ravitaillement) en roulant majoritairement à 130 km/h, avec 20 °C à bord, pour grimper ensuite à 1 850 mètres d’altitude. Faute de planificateur de trajet intégré au système multimédia (carton jaune dès le départ !), je me laisse guider par l’application A Better Route Planner qui ne prévoit pas une seule mais trois recharges, par des températures avoisinant zéro, pour atteindre notre destination avec 14 % de batterie. Forcément, le moral baisse, sachant qu’il faudra passer au total plus de 1 h 30 dans les stations rapides des grands axes.
Mais en ce départ matinal, les conditions sont propices à la préservation de la batterie. Certes, il fait froid, mais les rocades limitées à 90 km/h autour de Paris, puis une première portion d’autoroute A6 à la circulation dense mais jamais embouteillée, permettent de passer le premier péage (à Fleury en Bière) avec 69 % de batterie, et une autonomie affichée de 360 km. J'espère donc toujours deux arrêts en tout seulement, sachant qu’il ne reste plus que 600 km à couvrir…
Sauf qu’en passant à 130 km/h, la consommation grimpe de 19,5 kWh à environ 25 kWh/100 km. De fait, alors que je pensais atteindre l’Aire du Chien Blanc un peu avant Pouilly-en-Auxois, je dois me résoudre à suivre l’indication de mon application qui prévoyait légitimement un premier arrêt à la station Tesla d’Avallon. J’y arrive avec 16 % de batterie, après 291 km parcourus, en même temps que mon collègue Alexandre Bataille et sa Tesla Model 3.
S’il m’est impossible d’atteindre la puissance maximale de charge annoncée de 150 kW (en courant continu DC), j’obtiens 104 kW jusqu'à 50 %, puis plus de 80 kW y compris après le seuil critique de 80 % de batterie où la puissance est censée chuter. Je reste donc un peu plus, et repars avec 86 % de charge, après quand même 40 minutes de pause. Le ventre vide hélas, l’hôtel Ibis situé juste à côté ne proposant plus de service de restauration depuis quelque temps !
L'espoir de deux recharges en tout…
Le moral est toutefois au beau fixe puisque l’ordinateur de bord indique un rayon d’action de 450 km. Sachant qu'il me reste à peine plus à couvrir, j’ai bon espoir de ne m’arrêter qu’une seule et dernière fois. Et puis le trajet est somme toute agréable : on note bien quelques bruits d'air, mais la sécheresse de suspension que l'on peut ressentir à basse vitesse s'envole sur les axes rapides. En outre, on est parfaitement installé dans des fauteuils au maintien parfait. En revanche, il faut rester doux avec la direction, trop sensible lors des changements de file d'autant plus que le châssis se montre très (trop ?) réactif.
Mais c'est surtout l'ergonomie qui dérange. Certes, le système multimédia se montre réactif et fiable (pas de déconnexion de la réplication du smartphone à craindre), mais on se surprend à naviguer constamment dans les sous-menus, d'autant plus que le chauffage ne se pilote que par son intermédiaire, y compris… l'orientation des bouches d'aération ! Comme chez Tesla donc, mais en moins pratique.
Par ailleurs, il faut appuyer à divers endroits pour désactiver des aides à la conduite comme l'avertisseur sonore de dépassement de vitesse : non pas que je souhaite défier la loi, mais le capteur de la voiture ayant tendance à lire tout et n'importe quoi, y compris les limitations collées aux derrières des camions, on devient vite fou. De fait, on quitte souvent la route des yeux.
La montée du Col de Bessey-en-Chaume (565 m d’altitude) fait grimper la consommation à plus de 28 kWh/100 km et chuter l’autonomie en conséquence, mais je longe Chalon-sur-Saône avec environ 50 % de batterie, et imagine passer Lyon avant mon deuxième branchement. Et effectivement, je suis à un jet de pierre de la préfecture du Rhône quand j’atteins la station Ionity qui me donne l'espoir d'atteindre les sommets enneigés en une traite.
L'habitabilité est correcte, mais le coffre juste avec 400 dm3. Un bac de 53 litres sous le capot permet toutefois d'isoler le câble de charge.
J’ai été joueur, bien plus en tout cas que l’application qui me conseillait de m’arrêter avant, puisqu’il me reste seulement 6 % de batterie quand je me branche. J'ai parcouru environ 260 km avec 80 %, donc consommé un peu plus qu'au début mais c'est logique : j'ai roulé plus longtemps à 130 km/h. Je quitte l'aire avec 80 % de la batterie après 35 minutes. Toujours un peu long, mais j'espère ne plus m'arrêter… Hélas, mon application, une fois actualisée manuellement, m’indique une arrivée à Courchevel avec très peu d'autonomie.
Des chevaux qui s'évanouissent !
Alors qu'il me reste 43 % de batterie à environ 65 km de l'arrivée, je décide de réaliser une dernière halte de sécurité à la borne Ionity de l'aire de Val-Gelon sur l’A43. Un peu déçu, sachant qu’avec un bon diesel, je ne me serais arrêté qu’une fois dix minutes, voire pas du tout, et qu’un bambin aurait sans doute commencé à râler face à ce papa qui, pour rouler en électrique, recule autant l’arrivée sur le lieu de vacances. Mais je me console en me disant que les enfants se plaignent aussi quand on s'arrête peu. Quoi qu'il en soit, cette halte de 25 minutes passe vite, et je redécolle avec 80 %.
Troisième et dernier arrêt (toujours un peu long, hélas) pour notre Seal qui aurait pu s'en passer si nous avions été sûrs de trouver une borne de recharge à destination.
Je repars pour une heure de route. Le paysage se fait plus admirable, et la route tortueuse. J'en profite pour libérer la cavalerie à plusieurs reprises. La poussée ressentie donne du crédit à l'appellation qui trône sur la malle, et le châssis suit le rythme : les mouvements de caisse contenus assurent une bonne réactivité à l'inscription et, malgré deux tonnes à guider et des gommes larges (235/45 R19) mais estivales et à faible résistance au roulement (Continental EcoContact 6), les roues avant parviennent à diriger l'ensemble sans trop de peine sur un sol froid et glissant. Hélas, l'agrément est limité par une direction avare en sensations et… une batterie qui chauffe, la majorité des 530 ch s'évanouissant au bout de cinq minutes. 3.8s, oui, mais seulement au début !
Une station de Courchevel avare en bornes de recharge !
Il est temps de lever le pied car nous arrivons à Courchevel Village, et la consommation a grimpé à plus de 38 kWh/100 km durant l'ascension. Il me reste 50 % en arrivant sur mon lieu de destination à 1 850 m, ce qui prouve que j'aurais pu finir mon parcours sans charger une dernière fois, surtout si je n'avais pas haussé le rythme. Mais il valait mieux assurer, sachant que la station ne regorge pas de bornes : l'office de tourisme répertorie seulement 4 prises de 22 kW (soit environ 8 heures pour charger notre Seal qui n'accepte pas plus de 11 kW sur le courant alternatif AC), et une poignée en 3 kW seulement (soit 24 heures de branchement !), dont une bonne partie sur des parkings payants.
À retenir : 10 heures sans fatigue !
Finalement, il m'a fallu un peu plus de 10 heures pour effectuer mon trajet. Et si je n'avais pas ravitaillé une dernière fois, j'aurais mis 9 h 40, soit une bonne heure de plus qu'une voiture thermique qui ne s'arrêterait pas. Trop pour certains, mais en consultant mes collègues lors de nos retrouvailles à Aix-les-Bains, je m'aperçois que je ne suis pas à plaindre. Certains d'entre eux se sont arrêtés bien plus : quasiment toutes les heures dans les pires cas, et cela avec des véhicules à vocation familiale. En fait, pour faciliter encore le trajet de ma BYD vers les Alpes, il faut surtout attendre que les stations de ski, et notamment celle de Courchevel, s'équipent correctement. En redescendant, la voiture ne consomme pas un kWh, et récupère même de l'énergie. De fait, la consommation moyenne à la montagne descend à 19 kWh/100 km, soit entre 350 et 400 km en imaginant une capacité de batterie utile de 75 kWh.
La Seal est donc une bonne compagne de route, capable de traverser la France sans trop de contraintes grâce à un confort de bon aloi et surtout une autonomie correcte, y compris par grand froid. Mais pour convaincre totalement, BYD devrait envisager sérieusement un planificateur de trajet dynamique intégré (avec préconditionnement de la batterie bien sûr) qui permettrait d'optimiser et raccourcir les charges. Imposer l'utilisation d'une application de smartphone nous apparaît indigne d'une grande berline, même à ce prix, de même que des pauses avoisinant souvent les 40 minutes. Mais la marque nous annonce une mise à jour prochaine du système de navigation. Revoir l'ergonomie tactile pour plus de simplicité est une autre paire de manches…
Notre voyage en chiffres
BYD Seal 3.8s Excellence-AWD | |
Km parcourus Oise/Courchevel 1 850 | 740 km |
Temps de parcours total | 10 heures |
Temps de parcours vs moteur thermique | +1 h 40 (1 h 10 possible) |
Nombre d'arrêts pour recharger | 3 (dont un facultatif) |
Temps d'arrêt | 1 h 40 |
Coût recharge domestique de 10 à 100 % avant départ (0,20 €/kWh en heures creuses) | 15 € (estimé) |
Coût recharge pendant le trajet | 95 € (dont 22,50 € pour la charge facultative) |
Consommation moyenne autoroute | 23,5 kWh/100 km |
Consommation montée station de ski | 38,1 kWh/100 km |
Autonomie réelle autoroute | 260 à 300 km environ |
Autonomie réelle montagne | 300 km environ |
Les consommations relevées à l'ordinateur de bord ne paraissent pas excessives pour une familiale de 4,80 m de long, 530 ch et quatre roues motrices à pneus larges. Hélas, la marque ne communiquant que la capacité brute de la pile et non la valeur nette, impossible d'en déduire une autonomie très précise. Mais après tout qu'importe : un long trajet permet de la trouver tout seul : en grignotant la pile de 100 à 16 % sur un parcours mêlant portions de voies rapides limitées à 90 puis 110 km/h (parfois encombrées), et enfin 130 km/h (fluides), la Seal a parcouru 291 km. On peut donc arrondir l'autonomie maxi à 300 km, voire un peu plus. Ensuite, sur une portion majoritairement empruntée à 130 km/h, elle a couvert environ 260 km en passant de 86 à 6 % (donc avec 80 % de la pile). Correct…
Faute de capacité de batterie nette toujours, impossible d'évaluer précisément le coût du plein domestique (avec un prix moyen du kWh à 20 centimes d'euros actuellement) avant le départ. Mais en estimant une charge de 10 à 100 % à 15 € pour une batterie brute de 82,5 kWh, on doit être proche du vrai à l'euro près, hors pertes. Pour le reste du trajet, il suffit d'additionner les factures des trois stations : on arrive à 95 €, dont les 22,50 € à la dernière borne facultative. Sans cette dernière, nous serions arrivés à destination avec 10 % de batterie, pour un coût de 72,50 € aux bornes rapides, auquel vient s'ajouter le plein domestique de 15 €, soit 102,50 €. Hélas, faute de capacité nette une nouvelle fois, impossible de mesurer précisément les pertes aux recharges. Ceci dit, elles doivent être importantes puisque, à titre d'exemple, Tesla nous a facturé 65,93 kWh pour passer de 16 à 86 %, donc pour 70 % de la pile. Pour 100 %, on aurait donc payé environ 94 kWh au total, soit une valeur supérieure de 14 % à la capacité brute.
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Chiffres clés *
- Longueur : 4,80 m
- Largeur : 1,87 m
- Hauteur : 1,46 m
- Nombre de places : 5 places
- Volume du coffre : 400 l / NC
- Boite de vitesse : NC
- Carburant : Electrique
- Taux d'émission de CO2 : NC
- Bonus / Malus : NC
- Date de commercialisation du modèle : Juillet 2023
* pour la version 82.5 KWH 530 AWD EXCELLENCE.
Le bonus / malus affiché est celui en vigueur au moment de la publication de l'article.
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