Arabie Saoudite : Ce jour où les femmes ont enfin obtenu le droit de conduire
Le 24 juin 2018 marqua un jour historique pour les femmes d'Arabie Saoudite. Ce jour-là, après des décennies d'interdiction, le régime ultra conservateur de cette monarchie régie par le wahhabisme autorisa enfin ses concitoyennes à prendre le volant.

Ce dimanche 24 juin 2018, dans les rues de Riyad, de Djeddah et des autres grandes métropoles du royaume, l’affluence est clairement inhabituelle. Depuis minuit, des centaines de voitures, berlines et SUV haut de gamme surtout, ont pris possession des principales avenues pour célébrer un jour historique.
Pour la première fois en effet, les Saoudiennes ont enfin le droit de conduire dans leur pays. Un plaisir et un moment symbolique que Huda, Widad, Fahda et tant d'autres s’empressent de partager, activant le klaxon, saluant les passants et manifestant leur joie en mimant le « V » de la victoire au volant de leurs véhicules de marques américaines, allemandes ou japonaises, conscientes d’avoir acquis une nouvelle voie vers la liberté.
La marche avant des femmes

Jusqu’alors, en Arabie Saoudite, la conduite était interdite aux femmes, pour des prétextes mêlant religion et ordre public. Ainsi, pour leurs déplacements personnels ou pour se rendre au travail, ces dernières étaient soit restreintes aux places passagers des voitures de la famille, soient contraintes de voyager à l’arrière des taxis.
Jamais donc, elles n’avaient encore pu se déplacer en ville et sur les routes du pays de façon autonome, seules au volant, sans être conduites par un homme, sans la contrainte d’une présence masculine pour les « chaperonner », qu’il s’agisse d’un membre de leur entourage ou d’un chauffeur privé.
Cette interdiction avait fait du plus vaste territoire du Moyen-Orient un cas unique sur la scène internationale. Une singularité propre à cette monarchie ultra conservatrice, une réalité arbitraire si critiquée à l’échelle planétaire qu’elle avait incité le Prince héritier Mohammed Ben Salmane, 31 ans, à lâcher du lest dès son accession au pouvoir.
C’est dans un décret publié fin septembre 2017 que le souverain et Premier ministre actuel avait annoncé sa décision de faire délivrer des permis de conduire aux femmes. Une manière pour lui d’adresser au monde l’image d’une Arabie Saoudite prête à une forme de changement et à davantage de modernité.
Signe d'une visibilité croissante

Neuf mois plus tard, le 24 juin 2018, la mise en pratique du décret fut saluée par les capitales étrangères et bien sûr par une immense majorité de Saoudiennes. Elle signa surtout une victoire symbolique pour les courageuses activistes (Manal-Al Sharif et Loujain Al-Hathloul entre autres cheffes de file) qui, notamment depuis 2011, avaient été persécutées, emprisonnées et souvent forcées à l’exil pour précisément avoir milité en faveur du droit à conduire.
Sept ans après l’entrée en vigueur de la réforme, en dépit d’une tutelle masculine toujours prédominante et de droits humains encore trop souvent bafoués, les Saoudiennes semblent en apparence avoir acquis depuis ce " feu vert " à circuler librement une visibilité croissante dans le cadre du plan de développement Vision 2030 prôné par Mohammed Ben Salmane.
Bien plus présentes qu’elles ne l’étaient hier dans les rouages de l’économie, représentant désormais environ 37 % de la population active (contre seulement 15 % il y a dix ans), certaines ont aujourd’hui fondé leur propre auto-école. D’autres sont devenues chauffeurs de taxis ou conductrices du TGV qui relie La Mecque à Médine. D’autres encore ont par ailleurs pu accéder à de hautes fonctions dans le domaine bancaire ou la sphère publique.
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