Ce qui est révoltant, c’est le cynisme affiché par les autorités en la matière. Il a fallu attendre vingt ans pour que le ministère des Transports se préoccupe sérieusement du problème des glissières de sécurité qui décapitaient les motards. Aujourd’hui, devant le discours autophobe et systématiquement répressif, le mot d’ordre semble être "c’est de la faute à l’automobiliste".
Les Gendarmeries contribuent involontairement à cet état de fait puisque, en cas d’accident, l’Officier de Police Judiciaire mentionne systématiquement "défaut de maîtrise du véhicule", afin d’ouvrir une procédure judiciaire. Cette formule prévue au Code de la Route permet de sanctionner tout et n’importe quoi. Elle masque surtout les responsabilités des infrastructures.
Pourtant le Livre Blanc de la Sécurité Routière publié en 1999 avait bien prévu un audit systématique des infrastructures routières. Face au montant de l’addition (plusieurs dizaines de milliards de francs), le Parlement et le ministère ont renoncé. Pourtant, les instituts d’étude et de recherches du ministère des Transports rappellent l’importance d’une telle étude : il faut « engager un processus de contrôle de sécurité des projets à grande échelle sur le réseau routier national. La DSCR (Direction de la sécurité routière) et la Direction des routes ont approuvé, en 2000, le lancement à grande échelle » d’une étude sur le réseau national. Les premiers audits démarrent fin 2000. "En 2001, il s’agit de réussir l’appropriation de la démarche et des outils par tous les acteurs du réseau national et de mettre à disposition des collectivités locales qui le souhaitent outils et formations. Nous proposons également de réfléchir à un " IQSR " (indice de qualité de sécurité routière) sur le réseau routier national dans le but d’auditer et de qualifier le réseau existant".
Sain mais tardif réflexe. "Pour les infrastructures existantes, le Livre Blanc sur la sécurité routière proposait la mise en œuvre d’un contrôle de sécurité. Pour les nouveaux aménagements, les Comités interministériels de la sécurité routière de 1997 et de 1999 ont décidé de lancer les études et procédures nécessaires à l’instauration progressive du contrôle des sécurité des projets. En 1999, une méthode de contrôle avant mise en service d’une infrastructure a été mise au point et testée dans plusieurs villes. Dès l’an 2000, il devrait être possible de développer les contrôles à ce stade, en commençant par les opérations réalisées sur le réseau routier national."
Le drame, c’est que ce travail est appelé à s’échelonner sur plusieurs décennies, au fur et à mesure des renouvellements ou refontes d’ouvrages. Autant dire que ce n’est pas demain la veille que les "pièges" seront tous recensés ou éliminés.
Ce n’est pas grave, on n’aura qu’à multiplier les contrôles de vitesse, au moins ça rapporte ! Quant aux victimes de ces errements technocratiques, si elles en ont le courage, et sont assistées d’un avocat, elles peuvent toujours entamer une procédure devant les tribunaux de l’ordre administratif. Mais il faudra alors prouver que les ouvrages incriminés n’ont pas été réalisés conformément aux prescriptions réglementaires du ministère.
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