Huit jours en Caterham R300 Superlight, c'est le rêve de beaucoup. Mais peut-on utiliser cette baignoire à réaction comme véhicule quotidien, en ville, sur routes et autoroutes et par tous les temps ? C'est la question ô combien capitale à laquelle nous avons tenté de répondre.

Épisodes précédents :

Caterham R300 Superlight au quotidien : jour 1, la découverte

Caterham R300 Superlight au quotidien : jour 2, Paris s'éveille


Jour 3


Sur le chemin de notre comparatif mystère du jour, le vent frais du petit matin s'engouffre dans l'habitacle et me frappe le visage de plein fouet, ma vision est légèrement troublée et je peine à respirer. 120 km/h sur l'autoroute, ce n'est pas une sinécure dans une Caterham sans toit ni portes, au cas où vous ne l'auriez pas deviné tout seul. À cette vitesse précise, le compte-tours indique exactement 4 000 tr/min en sixième, ce qui démontre à quel point elle tire court (première : 2.69:1, seconde : 2.01:1, troisième : 1.59:1, quatrième : 1.32:1, cinquième :1.13:1, sixième : 1.00:1 avec un rapport de pont de 3.62:1, si vous êtes fétichistes des chiffres).


Le bon côté des choses, si l'on peut dire, c'est que je développe maintenant une surdité symétrique, l'échappement hurlant dans mon oreille droite formant un duo avec l'air giflant mon oreille gauche. Le shift light affiche encore une diode verte, signe qu'on est encore dans une plage de régime civilisée, mais la jauge ne semble pas être de cet avis et descend rapidement, avec une aiguille qui ne bouge pas pendant une cinquantaine de kilomètres puis tombe soudainement de plusieurs crans. Entamant le dernier quart, je préfère m'arrêter à la première station-service pour refaire le plein de sans-plomb 98, ce n'est pas parce qu'elle ne fait que 515 kg que j'ai envie de la pousser. Le pistolet de la pompe claque à... huit litres. Après recherche sur l'internet mondial, il semblerait que le réservoir totalise 36 litres. Donc non, une jauge à essence de Caterham n'est absolument pas précise, mais elle a au moins l'avantage d'être pessimiste.

Caterham R300 Superlight au quotidien : jour 3, la campagne, ça vous gagne
Caterham R300 Superlight au quotidien : jour 3, la campagne, ça vous gagne
Caterham R300 Superlight au quotidien : jour 3, la campagne, ça vous gagne


J'arrive sur le lieu du rendez-vous avec une bonne heure d'avance. Que faire en attendant ? Jouer à nouveau avec la capote, pardi ! Et c'est l’Épiphanie. Les sangles des arceaux sont en fait réglables, on peut donc les détendre temporairement, ce qui permet de donner du mou, de mettre tous les boutons pressions et de retendre ensuite depuis l'intérieur. Je découvre aussi qu'il y a un « tunnel » de tissu refermé par un scratch sur la face intérieure de la capote pour la fixer à l'un des arceaux. Au final, le toit, tendu comme un tambour, pourrait donner des leçons à bien d'autres cabriolets à capote souple, même s'il réclame tout de même quelques minutes pour être installé. Les portes présentent une double lèvre dans leur partie supérieure prenant en sandwich la gouttière du toit afin de préserver au mieux l'étanchéité. C'est drôlement bien fichu, mais l'ouverture pour accéder à l'intérieur est alors des plus réduites. Heureusement, le volant est démontable, ce qui donne un peu plus d'espace, mais un peu de souplesse est tout de même nécessaire pour s'installer à bord, en gardant toujours en tête de ne pas s'asseoir sur la boucle du harnais. Et de re-régler le rétroviseur central que vous aurez immanquablement bousculé avec votre tête. Mais ce n'est pas le pire. Le pire, c'est pour ressortir, puisqu'il faut combiner le décollage du fond du baquet avec un plié/délié pour s'extraire de l'habitacle, une technique proche du Fosbury qui demande un temps de réflexion certain sans céder à une crise de claustrophobie, comme le démontrent mes commentaires live sur Facebook ci-dessous.


Caterham R300 Superlight au quotidien : jour 3, la campagne, ça vous gagne

Il faut donc « sortir la jambe gauche d'abord », pousser ses mains, une sur le tunnel de transmission, l'autre sur la ceinture de caisse, en penchant le haut du buste vers l'intérieur de l'habitacle, sortir en reculant le derrière en avant, en finissant par la tête. Comme ça, ça a l'air bien compliqué, mais une fois la chorégraphie répétée quelques fois, cela se fait sans même réfléchir. Et en vrai, ça donne ça.

Caterham R300 Superlight au quotidien : jour 3, la campagne, ça vous gagne

Observez le piège à rotule incarné par la colonne de direction et le rétroviseur décoiffeur dans leur habitat naturel


En attendant qu'il pleuve, redécapotons et enlevons les portes, qu'on peut bêtement dégonder comme celles de votre petit chez vous.


La seconde voiture du comparatif, dont vous découvrirez l'identité dans quelques semaines, finit par arriver avec à son volant Alexandre Bataille. Adieu l'autoroute, direction les nationales et départementales. Et la première chose qui frappe, ce sont les graviers. Dans la figure. Avoir des roues avant en dehors de la carrosserie, c'est bien mignon, c'est rigolo à voir tourner mais c'est sans pitié question projections, malgré les magnifiques ailes en fibre de carbone que je ne me lasse pas d'admirer. Pour la même raison, on apprend aussi vite à doubler les distances de sécurité avec la voiture vous précédant, ou à vite la doubler, c'est selon.


Bravant les cailloux en pleine moustache, il est temps tout de même de voir ce que la R300 a dans le ventre sur des routes lui permettant d'exprimer un peu plus son véritable potentiel, tout en gardant en tête quelques détails : cette automobile n'a non seulement aucune aide à la conduite, mais sa sécurité passive se résume à un harnais et un arceau tous deux à quatre points. En cas de choc latéral, la barre de renfort est composée de votre radius et cubitus. Le pare-brise n'est pas porteur. Vos jambes sont sur le côté du moteur. Le réservoir d'essence est juste derrière vous. Il convient donc de rester particulièrement humble dans son apprentissage. Heureusement, malgré un tel rapport poids/puissance, la Caterham n'est pas une voiture méchante (tout du moins sur le sec) : elle fera fidèlement ce que vous lui dites de faire, tant que vous restez raisonnable. Assis sur le train arrière équipé en option d'un autobloquant, vous êtes d'ailleurs aux premières loges pour sentir les dérobades qui ne manqueront pas d'arriver, car la R300 a un derrière mobile, qui aime se placer un peu plus à l'extérieur en élargissant à peine la trajectoire par rapport à son homologue à l'avant. Et pour peu que vous ayez un excès d'optimisme, la direction ultra rapide et précise (et bien sûr non assistée) vous permet de revenir dans le droit chemin avec aisance. Certes, on vous dira qu'elle est équipée d'un antique pont de Dion guidé par un parallélogramme de Watts alors qu'à l'avant vous avez des triangles superposés avec barre antiroulis bien plus modernes, mais peu importent les ingrédients de la recette, puisque cela fonctionne.

Caterham R300 Superlight au quotidien : jour 3, la campagne, ça vous gagne
Caterham R300 Superlight au quotidien : jour 3, la campagne, ça vous gagne
Caterham R300 Superlight au quotidien : jour 3, la campagne, ça vous gagne

Et surtout cela fonctionne en parfaite adéquation avec le reste : le moteur se déchaîne après 5 000 tr/min jusqu'à... Pour être honnête, je ne sais pas vraiment : le compte-tours ne présente pas de zone rouge et à ces régimes, il est plutôt indispensable de ne pas perdre de vue la route une seconde et tenir fermement le petit volant de ses deux mains jusqu'à ce que le shift light vous intime l'ordre en clignotant de rentrer le rapport supérieur à la volée. Et l'accélération reprend sans faiblir avec la même sauvagerie jusqu'à des vitesses totalement inavouables, la Caterham semblant s'affranchir totalement de la résistance de l'air, contrairement à son conducteur. La boîte de vitesses est proche de la perfection, avec un maniement viril et une course des plus réduites permettant des passages éclair. Proche « seulement », parce que le pommeau en aluminium est un peu trop gros et devient glissant quand on a la main moite (ce qui vous arrivera forcément, croyez-moi).


Étrangement, ce qui me donnera le plus de fil à retordre, ce sont les freins. Quatre disques, ventilés et avec étriers à quatre pistons à l'avant, pas d'ABS, mais surtout pas d'assistance, ce qui nécessite l'apprentissage le plus long. À la prise en main, c'est bien simple, vous avez l'impression qu'elle freine comme une Golf GTI de première génération, avec une course d'un centimètre aboutissant à un mordant médiocre. Quelques frayeurs plus tard, et vous finissez par saisir. Il faut véritablement taper dedans, en prenant de l'élan si possible, et là, oui, le harnais vous coupe enfin le souffle. Pas la peine de se soucier de l'absence d'ABS, en huit jours et 2 000 bornes, je n'ai bloqué les roues qu'une fois, en faisant exprès, pour voir, et c'est le train avant qui a le bon goût de céder en premier.


Et demain, qu'est-ce qu'on fait ? Eh bien on doit terminer la séance photo de notre comparatif le matin, quant à l'après-midi, on reprendra l'autoroute pour 500 kilomètres, direction le circuit le plus connu du monde.


Épisodes suivants :

Caterham R300 Superlight au quotidien : jour 4, direction le Nürburgring

Caterham R300 Superlight au quotidien : jour 5, soufflons un peu

Caterham R300 Superlight au quotidien : jour 6, au cœur de l'Enfer Vert

Caterham R300 Superlight au quotidien : jour 7, direction Folembray

Caterham R300 Superlight au quotidien : jour 8, il est temps de se dire adieu

Vidéo - Caterham R300 Superlight au quotidien : à l'assaut du Nürburgring


Twitter : @PierreDdeG