Voiture autonome : le hold-up chinois ?
Les constructeurs sont sceptiques quant à l’avenir des autos qui roulent toutes seules. PSA l’avoue et nombre d’autres sont tiraillés, comme Volkswagen qui pourrait bien déléguer les recherches en la matière à des entreprises chinoises. L’Empire du milieu serait-il en train de refaire le coup de la voiture électrique sur laquelle il détient désormais une mainmise planétaire ?
Pas question de contrarier notre confrère Jean Savary qui, ici même, semblait défendre il y a quelques jours le plaisir de conduire, même dans un avenir lointain. Pourtant, les nuages qui s’amoncellent au-dessus de la voiture autonome, et le refus d’obstacle de nombre de dirigeants automobiles, s’ils semblent lui donner raison, ne sont pas la meilleure nouvelle en provenance de cette industrie ces temps-ci. Car si moult patrons des grandes firmes se disent sceptiques sur l’avenir de ces autos qui roulent toutes seules, ou qui sont à « délégation de conduite » comme on dit pour ne pas trop effrayer les accros au cerceau et à la pédale de gaz, on peut s’interroger sur leur vision à long terme.
Volkswagen délègue la délégation de conduite
Après les déclarations de Carlos Tavarès au salon de Genève début mars, renonçant à dépasser le niveau 3 de l’autonomie, parce qu’au-delà, les technologies sont trop coûteuses, c’est au tour de Volkswagen de jeter partiellement l’éponge. Pas de renoncement chez l’Allemand, mais une délégation des recherches.
Sauf que ce passage de relais ne se fait pas à n’importe qui. Selon Reuters, « Une partie du travail de développement de logiciels peut être réalisée, par exemple, dans des installations chinoises situées en dehors du groupe Volkswagen en Chine ». Celui qui s’exprime ainsi auprès de l’agence, n’est pas un simple observateur, mais le type le mieux placé au monde pour savoir de quoi il en retourne : Stephan Woellenstein, le patron de Volkswagen en Chine. Le groupe allemand ne justifie pas cette délégation en raison du coût trop élevé de ces recherches, on a son honneur à Wolfsburg, mais en raison des difficultés à trouver des personnes qualifiées pour les mettre en œuvre.
Autonomie et électricité : les nouvelles spécialités chinoises
La Chine future tête de pont de la voiture autonome ? Voilà une idée qui ne semble pas effrayer grand monde, et pourtant, cet acte volontariste de la part des autorités comme des entreprises du pays, en rappelle un autre : celui de la voiture électrique, dont le cœur (la batterie) est ultra majoritairement made in China, que ce soit au niveau des composants de base ou de sa fabrication finale.
L’empire ayant raté le coche du moteur thermique, il s’est rapidement jeté sur l’électrique et, une fois ses fameuses batteries au point, s’est dépêché de les imposer à la planète entière le plus simplement du monde : en imposant des quotas de voitures électriques sur son propre sol. Une manière, lorsque l’on est le premier marché international, de dicter sa loi à tous les autres, qui se retrouvent bien obligés d’électrifier leurs modèles pour continuer à exister dans l’eldorado oriental.
Le piège se referme sur les constructeurs
Une électrisation forcenée dictée par la Chine qui plombe suffisamment les investissements des constructeurs pour qu’ils aient quelque mal à trouver des subsides supplémentaires pour l’autre chantier du futur : la voiture autonome. Ce double investissement ne semble pas outre mesure inquiéter les entreprises chinoises, qui peuvent ainsi refermer leur piège à innovation. Au vieux monde la vieille industrie, au nouveau la nouvelle, et lorsque les autos qui roulent seules seront au point, que le consommateur aura enfin levé ses réticences, nos marques automobiles, du moins celles qui subsisteront, n’auront qu’à acheter les technologies chinoises au prix fort.
Volkswagen en Chine, Toyota dans la Silicon Valley
Évidemment, ce piège, certains s’en méfient, comme Toyota. Sa longue expérience du marché chinois lui a peut-être évité d’y tomber. Mais n’est ce pas pour se laisser attraper par un autre filet tendu ? Car le Japonais vient de s’acoquiner avec l’américain Uber en renforçant sa participation dans le capital du roi des VTC qui mise à fond sur le développement de l’autonome. Sauf que, en comptant ses investissements passés dans le capital de l’américain et en y ajoutant les nouvelles sommes allouées, on dépasse difficilement le milliard de dollars. C’est beaucoup ? C’est assez peu au regard de la capitalisation escomptée par Uber lors de son entrée prochaine en bourse : entre 90 et 100 milliards de dollars.
Coincés entre les géants de la nouvelle économie et le géant chinois, nos ex-géants de l’automobile semblent quelque peu rapetisser.
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