Un marché automobile placé en soins palliatifs ?
Plongé dans une profonde léthargie, le marché automobile en général et celui des flottes en particulier paye les conséquences de crises anciennes aux répercussions durables. À qui la faute ?

Manque de visibilité, incessante bougeotte fiscale, droits de douane, guerre en Ukraine, inflation, COVID… Les périodes de crises, sanitaires, fiscales et économiques se succèdent les unes aux autres depuis 2020.
Leurs conséquences n’en finissent pas de perturber le marché automobile en général et celui des flottes en particulier. Avec 62 % des véhicules neufs immatriculés, le marché à entreprises assure aux constructeurs un volume d’unités vendus conséquent. Mais, depuis plus d’un an le marché est à l’arrêt.
En 2024, le marché à entreprise a plongé - 4,38 %. Et 2025 commence de la pire des façons. Le premier trimestre s’est terminé avec un retard de 10 % par rapport aux trois premiers mois de l’année précédente. Un repli supérieur (-8,36 %) à celui du marché global. La crise est profonde.
Pour les leasers et les constructeurs automobiles, unis dans un lobby d’intérêts, les fautifs sont tout trouvés. L’Europe et à la fiscalité trop changeante d’un État français impécunieux serait les principaux perturbateurs du secteur automobile en général et de celui des flottes en particulier.
Allongement des délais de détention
« Face à la fiscalité, on s’aperçoit que non seulement les entreprises retardent leurs investissements afin de bien comprendre les enjeux financiers, mais que les délais de détention s’allongent également », explique au Figaro (31/03/2025) Guillaume Maureau, directeur général adjoint commerce France d’Ayvens. Ceux-ci seraient passés de 36 mois à 48 mois. La faute aux nouvelles taxes à l’immatriculation qui poussent les entreprises à « réduire fortement l’achat de modèles à forte valeur ajoutée », prévient Guillaume Maureau dans la Figaro
Sollicité par Caradisiac pour analyser les raisons du crash et ses conséquences, Ayvens a répondu ne « pas pouvoir répondre favorablement à cette demande. » Surpris, par cette fin de non-recevoir, Caradisiac a cherché à savoir si les racines du mal n’allaient pas au-delà des simples questions fiscales pointées par Ayvens. Un petit retour en arrière, apporte un éclairage intéressant.
Des entreprises un temps méprisées
Au sortir du COVID, la baisse de l’offre, a poussé les constructeurs automobiles à privilégier les clients particuliers, au détriment des entreprises. Préférant jouer les marges aux volumes. Celles-ci ont vu leurs commandes repoussées et ont dû patienter de long mois, voire plus d’une année pour certaines avant de recevoir leurs véhicules. En parallèles, les remises catalogues ont été orientées à la baisse. Les prix véhicules ont augmenté et les budgets ont été orientés à la hausse. Face à ces impondérables, les entreprises ont dû optimiser leurs contrats et garder plus longtemps leurs véhicules en parc. En auraient-elles gardé quelques réflexes et une approche plus raisonnable de gestion de parc ? Ces dernières années le renouvellement trop rapide des véhicules, a été remplacé par une approche d’optimisation de la durée.
Par ailleurs, les sociétés ont déployé de nouvelles politiques de mobilités. Selon le dernier baromètre des flottes de l’Arval Mobility Observatory, « elles sont 31 % à utiliser l’autopartage (+ 6 points par rapport à 2024), 25 % à recourir à une application permettant de réserver des solutions de mobilité et 18 % à développer la location ou le partage de vélos. » Les loueurs longue durée sont également dans le viseur des gestionnaires de parcs.
Des loueurs dans le viseur
Dans un article de L’automobile et l’entreprise publié le 10 juin 2024, les responsables de parc désespèrent de retrouver des niveaux de « prestations raisonnables » tant en termes de coûts que de qualité de service. Les entreprises pointent la forte hausse des loyers et une piètre qualité de service. « C'est catastrophique et très compliqué en termes de contacts avec les équipes, explique à L’automobile et l’entreprise Nicolas Terrien, global lead of carfleet chez Sanofi. Comme pour les constructeurs, les politiques semblent ici aussi orientées vers les marges.
La concentration des sociétés de location inquiète quant à la possibilité de faire jouer la concurrence. La création de Ayvens (fusion de ALD et LeasePlan) et de Leasys (Crédit Agricole Consumer Finance et Stellantis) en 2023 n’a en rien rassuré les gestionnaires de parcs qui ont désormais à faire à des mastodontes européens et mondiaux de la location longue durée. Difficile pour une entreprise de peser face à de telles superstructures.
La conjoncture actuelle n’est guère favorable au marché de l'automobile et des flottes, mais des raisons structurelles, dont les acteurs du secteur sont en partie responsables, semblent également plomber durablement le marché.
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