Maserati, de six soupapes par cylindre à l'électrique
Maserati entrevoit la nouvelle décennie dans un groupe résultant de la fusion de PSA et FCA. Hybridation et voitures électriques feront partie de l'avenir d'une marque qui s'est pourtant illustrée par sa capacité à penser différemment.
Il est devenu presque normal de ne parler que de Ferrari lorsqu'il s'agit de marques italiennes de prestige, mais le cheval cabré n'a pas une histoire aussi longue que celle de Maserati. Fondé dans un contexte compliqué (Première guerre mondiale) par Alfieri Maserati, spécialisé alors dans la fabrication de bougies d'allumage, ce constructeur s'est régulièrement illustré sur ses 107 ans d'existence par des innovations mécaniques.
Maserati l'artiste de la mécanique
Dès les années 30, alors que la concurrence mise sur des moteurs toujours plus gros, Maserati contient les cylindrées et cherche à obtenir plus de chevaux dans un format plus compact. Il fallait inévitablement trouver des solutions originales pour compenser le différentiel de "taille" avec les rivaux.
Multisoupapes par cylindre, allumage, Maserati mise sur des évolutions, voire des révolutions pour tirer le maximum de moteurs ne dépassant souvent pas les 2.0 litres. L'apothéose de cette politique arrive dans les années 50 avec l'arrivée d'un certain Gioacchino Colombo, à l'origine du V12 Ferrari des 250. C'est à cette période que Maserati sort l'A6G (pilotée par Juan-Manuel Fangio en course, avec les bons résultats que l'on connaît), et ses déclinaisons merveilleuses telles que l'A6G/54 : imaginez qu'à cette époque, Maserati sort un peu moins de 170 ch d'un six cylindres en ligne atmosphérique de seulement 2.0 de cylindrée, chapeauté par deux arbres à cames. En 1954 ! Une puissance spécifique encore d'actualité aujourd'hui : le 2.0 atmosphérique Mazda Skyactiv X développe 180 ch.
Six soupapes par cylindre
Maserati a toujours eu du mal à conserver une santé financière et une stabilité satisfaisantes. Durant les années 80, la marque au trident - symbole de la fameuse fontaine "Neptune" de Bologne - est la propriété d'un riche industriel argentin, un certain Alejandro De Tomaso. L'intéressé scelle par la suite un accord avec Chrysler qui monte doucement au capital, notamment pour exporter des véhicules vers les Etats-Unis avec des caractéristiques adaptées à ce marché plus gourmand de gros cubes que de petits moteurs pointus et compacts.
Mais l'ADN de Maserati est toujours là. En 1984, la marque dépose un brevet d'un étonnant prototype de moteur. Nous sommes en décembre 1984, et le constructeur de Modène annonce le "6:36 Hi-Tech". Sous ce nom barbare se cache un V6 biturbo, mais dans la plus pure tradition Maserati, il doit être compact, et à haut rendement. Il ne cube donc que deux litres, mais développe la bagatelle de 265 ch. Pourtant, les deux turbos, refroidis par eau, ne soufflent pas fort : 0,8 bar. Mais alors, d'où vient cette puissance totalement inédite pour un tel moteur ?
D'abord par un taux de compression très élevé, mais aussi en partie... par les six soupapes par cylindres ! Vous connaissiez peut-être déjà les cinq soupapes par cylindres (Moteur "8V" chez Audi, V8 de la Ferrari F355...), voici donc une prouesse mécanique signée Maserati. En effet, plus le nombre de soupapes est grand, plus les contraintes en matière de coûts, de développement et de production d'un moteur sont en accord. Alors imaginez avec six soupapes par cylindres...
Maserati avait trouvé une solution originale à un problème jugé impossible résoudre : comment commander un tel groupe de soupapes. Maserati a ainsi inventé une sorte de linguet sous la forme d'une plaque, capable de commander un groupe de trois soupapes, évidemment toutes ultra légères.
Meilleure combustion et mélange sous la forme d'un "tourbillon" améliorant les performances tout en réduisant les imbrûlés et les émissions de polluants nocifs, ce système était très ingénieux... mais n'a jamais vu le jour, puisque Maserati (probablement pour des raisons financières dans une période trouble) préfèrera un moteur plus simple et moins cher, à quatre soupapes.
Maserati et Stellantis
Après avoir été ballotté entre Fiat et Ferrari puis associé à Alfa Romeo, Maserati doit désormais affronter une nouvelle période, et un nouveau "propriétaire" même si, techniquement et administrativement, peu de choses vont changer pour Maserati. Le constructeur fait désormais partie de Stellantis, résultant de la fusion entre PSA et FCA. Pour l'heure, les deux groupes n'ont pas encore précisé quel sera l'avenir de chaque marque et produit, mais on a tout de même déjà des informations sur Fiat, entre autres. Pour Maserati, il s'agit de mettre en oeuvre ce qui est déjà prévu, avec le lancement de la MC20 (qui hérite de petites idées mécaniques comme la fameuse "pré chambre" de combustion), l'arrivée d'un SUV (le Grecale), et surtout le renouvellement des GranTurismo et GranCabrio en électrique.
Certains rêvent déjà d'une époque où Citroën et Maserati avaient accouché de la SM. De l'eau a coulé sous les ponts, et ce serait aujourd'hui DS qui remplirait ce rôle en collaborant avec Maserati, laquelle est au final la seule marque de luxe de Stellantis (Ferrari est indépendant, rappelons-le). DS avait d'ailleurs invité le public à voter en début d'année pour le design d'une nouvelle SM... affaire à suivre ?
Il n'empêche : Maserati peut-il rester Maserati sans la mécanique ? Si, à terme, tous les modèles passent à l'électrique, le constructeur italien perdra en grande partie ce qui a fait sa renommée. S'illustrer avec des pièces métalliques en mouvement est plus facile qu'avec un moteur à aimants permanents. L'automobile est au final un peu comme le monde de l'horlogerie : il y a la montre à mécanisme automatique, et puis les montres connectées. Et en matière de luxe, les premières font certainement plus rêver que les secondes.
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