Journal de la rédaction n° 4 : quel bilan tirer de ce salon 2022
En raison du Covid, il a fallu attendre 4 ans pour de nouveau se rendre au Mondial de l'Auto à Paris. Dans un contexte difficile pour les salons européens (Genève délocalisé à Doha, Francfort à Munich), Paris a-t-il réussi son come-back alors que de nombreux constructeurs étaient absents ? Au regard de l'affluence, oui, sans nul doute. Les 400 000 visiteurs annoncés en témoignent. Mais une question subsiste : ont-ils été conquis par le salon? Échange avec Serge Gachot, le patron du Mondial.
Dans un communiqué de presse du samedi 22, les organisateurs du salon ont annoncé pouvoir comptabiliser 400 000 visiteurs d'ici la fin du salon. En six jours de salon, cela fait environ 66 000 visiteurs par jour. En 2018, le Mondial avait accueilli 1 000 000 de visiteurs en 11 jours, soit 90 000 par jour. Alors, est-ce un bon chiffre ? Oui probablement car ce salon n'est pas directement comparable à celui de 2018. Pour plusieurs raisons : il y avait beaucoup moins de constructeurs cette année, la version 2022 a succédé au covid et de manière générale, le contexte est moins favorable aux autos. Moins de visiteurs/jours qu'en 2018 et pourtant, une sensation de foule ressentie dans les allées du salon en raison de la diminution du nombre de pavillons consacrés au salon.
Malgré ce bilan plutôt positif, une partie de la presse, notamment spécialisée, a été plutôt sévère avec les organisateurs, leur reprochant de ne pas avoir investi le célèbre hall 1, de ne pas avoir recouvert de moquette les allées, de ne pas avoir facilité la circulation du public entre les trois pavillons de l'exposition.
À Caradisiac, nous pensons que ces griefs ne sont pas si importants. Plus ennuyeux est l'absence d'un grand nombre de constructeurs, plus d'une vingtaine. Nous avons réalisé un micro-trottoir qui certes n'a pas de valeur statistique, mais qui permet de comprendre qu'a priori, les visiteurs auraient préféré voir les modèles d'un plus grand nombre de marques. Ajoutons que malgré ces absences, les visiteurs interviewés n'ont pas regretté d'être venus. Surtout, est-ce la faute de Hopscotch si des constructeurs importants ont décidé de ne pas venir ? A priori non car cette désertification a commencé il y a plusieurs années et il manquait déjà des constructeurs à l'appel en 2018, même s'ils étaient moins nombreux à avoir décliné l'invitation. Nous évoquions même déjà le sujet en 2016.
Principale faiblesse de l'édition 2022, l'absence d'une vingtaine de constructeurs, mais l'organisateur n'est pas responsable
Dans ces conditions et au regard du nombre de visiteurs, et d'un contexte singulier déjà évoqué, on pourrait considérer que le pari est gagné. Et les organisateurs n'ont pas hésité à forcer le trait. Dans leur communiqué de presse de samedi, ils ont tellement mis en valeur un bilan qu'ils souhaitaient absolument positif, évoquant même des détails rarement évoqués dans ce type de document, qu'il reflétait plutôt une certaine crainte de ne pas avoir été à la hauteur. L'enjeu, sans doute...
Au-delà des polémiques qui ont un peu agité cette semaine le petit monde de l'automobile, que peut-on en dire à Caradisiac ? Tout d'abord et c'est une excellente nouvelle pour tous les acteurs de l'automobile, ce salon nous aura permis de nous rendre compte que l'automobile, et cela malgré une forme d'autophobie latente, est toujours plébiscitée par le public.
Personne ne sait si les 400 000 visiteurs ont été satisfaits
On aime toujours l'auto en France, ce qu'elle représente, la liberté qu'elle procure, les sensations qu'elles génèrent, et cela, qu'elle soit thermique ou électrique. C'est pour cette raison-là que 400 000 automobilistes ont fait le déplacement. Mais, il y a selon nous une question essentielle pour l'avenir que les organisateurs ne doivent pas traiter à la légère : les visiteurs sont-ils repartis satisfaits? À défaut d'un sondage, nul ne peut le savoir aujourd'hui.
Les visiteurs n'ont pas décidé de venir visiter la multitude de petits stands du hall 3, ceux qui vendent de la recharge électrique, ceux qui vendent du Rétrofit etc. Ils ne sont pas non plus venus pour voir des marques chinoises et vietnamiennes dont ils ne connaissaient même pas l'existence avant de venir. Ils sont venus par habitude, comme ils le font depuis des décennies. Et ils ont découvert un nouvel univers rendu notamment moins flamboyant par l'absence de marques qui, elles, font rêver depuis longtemps.
Les organisateurs auraient donc tort d'afficher une sorte de satisfaction absolue, d'imaginer que 400 000 visiteurs sont venus parce qu'ils savaient ce qu'ils allaient voir et qu'ils en sont repartis conquis. Pour avoir beaucoup échangé avec les organisateurs pendant le salon, nous avons compris qu'ils sont très B2B, c’est-à-dire très proches des préoccupations de ceux qui ont payé leurs stands. C'est sans doute une qualité pour pouvoir convaincre les entreprises de s'engager. Mais leurs véritables clients sont ceux qui payent l'entrée, les visiteurs, vous-mêmes, nos lecteurs, les 8 millions de Français qui chaque mois viennent visiter Caradisiac.
Ce sont bien les automobilistes qui font exister les salons, et non les constructeurs. Cette édition 2022 en apporte la preuve. Beaucoup de constructeurs ne sont pas venus, et pourtant les visiteurs ont répondu présent. Donc le salon continue. Si tous les constructeurs avaient été présents et si les visiteurs avaient boudé le salon, c'était la fin du Mondial de Paris.
L'auto n'est pas morte, le salon n'est pas mort
En conclusion, nous n'avons aucun conseil à donner à Hopscotch, l'organisateur, pour la prochaine édition qui aura lieu en 2024. Bien sûr, il s'agira et ce ne sera pas simple de réussir à convaincre les constructeurs absents cette année de revenir. Et ceux-là auraient tort de continuer de bouder. Les Français les attendent. Ce salon l'a prouvé. Mais il s'agira aussi pour les organisateurs d'être sans doute un peu plus B2C dans l'âme, pour vous permettre à vous tous dans deux ans de découvrir tous les nouveaux modèles de tous les constructeurs dans les meilleures conditions. L'un et l'autre étant bien sûr lié.
Finalement, 2022 a surfé sur le manque après quatre ans d'absence, et sur l'acquis de toutes les éditions antérieures des salons de l'auto parisiens. Les plus anciens automobilistes, un brin nostalgiques devront accepter qu'il y aura eu les salons pré et post-covid et qu'ils seront différents. Et il faudra faire preuve d'empathie à l'égard des plus jeunes, ces nouveaux visiteurs pour qu'ils reviennent tous les deux ans, en 2024, en 2026, 2028 et pour cela, les surprendre, les émerveiller, leur donner sans doute plus que cette année, leur créer des souvenirs. Rude tâche, mais tâche passionnante.
Quoi qu'il en soit, et ce salon l'aura montré, l'auto n'est pas morte, le salon de Paris n'est pas mort. Et Caradisiac aura contribué à cette sorte de résurrection en étant parmi les médias celui qui vous aura le plus permis de découvrir le salon en restant dans votre salon. Pour cela, nous vous avons donné à lire et à voir plus de 150 articles et 60 vidéos).
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