France/Allemagne : deux pays, deux cultures de la route…
Il y a des clichés qui ont la vie dure : en Allemagne, on roulerait plus vite et en plus grande sécurité qu’en France. Us et coutumes autour de la conduite, parc automobile, Caradisiac vous dit tout sur les différences entre l’Hexagone et le premier marché automobile en Europe et sa façon de vivre l’auto. C’est parti pour un voyage entre autoroute et Autobahn !
1 - Les habitudes sur « Autobahn » : roule-t-on plus vite sur les autoroutes allemandes ?
Commençons par la spécificité allemande la plus connue, les fameuses Autobahn : ces autoroutes sont bizarrement le seul endroit où les Allemands peuvent se montrer agressifs au volant, probablement grisés par leur "Überholungsmacht", littéralement "pouvoir de doubler", incarné par les calandres typiques des marques les plus respectées qui grossissent à grande vitesse dans le rétroviseur. Allemandes, bien sûr. Attention à bien surveiller ses arrières, les différences de vitesse peuvent être considérables, même à 200 ! Et toujours rouler sur la file de droite et se rabattre rapidement après avoir doublé.
Nous parlons ici bien entendu des célèbres zones sans limites de vitesse (seulement une vitesse conseillée…), uniques au monde et complètement inimaginables en France ! Mais elles ne sont pas si nombreuses qu’on le croit et surtout, elles sont souvent impraticables raisonnablement à plus de 180/200 km/h à cause de la densité de leur trafic. Car les autoroutes allemandes ont un maillage très serré et elles sont gratuites, autant dire qu’elles sont fort fréquentées. De plus, elles comportent nombre de chaussées anciennes en plaques de béton très inconfortables, qui demandent beaucoup de travaux pour les refaire, ce qui crée quantité de bouchons. Là, on prendra son mal en patience et on en profitera pour noter que, souvent, les motos resteront bien sagement dans les files, voire les remonteront très prudemment, ce qui n’est pas toujours le cas en France.
Les zones limitées en vitesse sont donc très nombreuses, avec des durées parfois très longues, parfois très courtes, parfois modulables selon les heures pour épargner les riverains la nuit. Des discussions reviennent toujours sur l'introduction d'une limite de vitesse générale à 120 km/h sur les autoroutes, défendue notamment par le parti social-démocrate SPD, mais les tentatives sont à chaque fois rejetées. Dans les zones limitées, le respect de la vitesse est assez aléatoire : 93 % des conducteurs allemands admettent dépasser les limitations de vitesse indiquées selon une étude de la fondation Vinci Autoroutes, ce qui représente un des plus gros taux d’Europe (mais avec 91 %, les Français ne sont pas bien loin derrière…). De quoi écorcher certains préjugés… Mais attention aux radars (voir plus bas).
Enfin, si les autoroutes sont gratuites, les toilettes des stations-service ne le sont pas et les aires de ravitaillement sont beaucoup plus espacées qu’en France. Attention à la consommation à haute vitesse ! Vous pourrez y choisir de l’essence SP 100 et du Power-diesel : pur marketing ou effet réel, peu importe, celui qui veut le carburant le plus performant le trouvera. Mais il sera encore plus cher, alors que l'essence coûte parfois jusqu’à 10 cents de plus qu'en France. Il y a même des conducteurs qui choisissent leur jour pour ravitailler à la pompe afin de profiter de micro-variations de tarifs. Notons au passage que s’il n’y a pas de stations dans les supermarchés comme dans l’Hexagone, on trouve près des sorties d’autoroutes des stations discount.
Sur certaines aires, vous serez probablement surpris de trouver des petites chapelles, ce sont les Autobahnkirche. L'Allemagne est un pays où la religion est prise très au sérieux. Et d’ailleurs, on appelle les « Anges jaunes » les agents d’intervention en cas de panne, mandatés par le puissant automobile club ADAC… Une précision en cas d'accident : il faut dans tous les cas appeler la police pour faire le constat, même juste pour de petits dégâts matériels.
LE MATCH FRANCE/ALLEMAGNE "AUTOROUTES" . Nos autoroutes sont en meilleur état et mieux construites, elles comportent plus d’aires de service et de stations, mais elles se parcourent à un train de sénateur en comparaison de l’Allemagne. Elles font aussi payer leur usage alors que les Autobahn sont gratuites, occasionnant des bouchons récurrents. Match nul car les avantages de confort et sécurité de la France s’opposent à la gratuité et à la liberté de rouler vite, chacun ayant ses attraits.
2 - Les habitudes urbaines : les automobilistes allemands sont-ils plus civilisés en ville ?
Passons en ville, non sans rappeler que sur les routes secondaires, généralement, la vitesse est limitée à 100 km/h, loin des 80 km/h que la France vient d’adopter. L’accès au centre des grandes villes est soumis à des zones environnementales : l’accès y est limité aux véhicules affichant sur leur pare-brise une plaquette verte (essence catalysée norme Euro 4 minimum, diesel avec filtre à particules…), un système comparable à nos vignettes Crit’air. Attention, les véhicules immatriculés à l'étranger doivent elles aussi se procurer le macaron. Heureusement, les voitures anciennes locales (plaques "H" pour historique) ont droit de cité.
Pour se garer dans la rue, les usages sont bien différents de ce que l’on peut observer à Paris. Ici, pas question de toucher les pare-chocs des autres voitures. Si on a un passager, il aidera pour les manœuvres et si on est seul, il n'est pas rare que quelqu'un s'arrête pour guider. Et si on se gare "à la parisienne", attention, il n'est pas impossible que quelqu'un passe un coup de fil à la police ou mette une note sur l'autre voiture avec votre immatriculation…
En revanche, la voiture, grosse, belle et en état parfait est un "status symbol" toujours aussi important, mais qui ne suscite pas de jalousie ou de coup de clés vengeurs. Enfin, dans les grandes villes, le stationnement est payant bien plus tard qu’en France, parfois jusqu'à 23h00, voire 1h00 du matin et les tarifs sont prohibitifs (souvent 3 €/h).
C’est peut-être ce qui explique le grand succès de l’auto-partage, avec Flinkster (Deustsche Bahn), Cambio, Car2Go (Mercedes-Smart), DriveNow (BMW-Mini), etc. Des voitures en « free floating » (sans places attribuées) pour ces deux derniers qui viennent de former une alliance pour mieux se développer. Peut-être les verra-t-on bientôt dans les rues de notre capitale aux côtés des projets de Renault et PSA récemment dévoilés. Pour cela, il faudra cependant que leur offre électrique soit plus vaste. Car aujourd’hui, mis à part quelques BMW i3, il s’agit de voitures thermiques, de la Smart Fortwo (26 cts/minute) à la BMW Série 2 Cabriolet par exemple (36 cts/min), ces tarifs incluant le carburant, l’assurance et le stationnement sur n’importe quelle place autorisée. La réservation se fait facilement via une application géolocalisée et les autos sont toujours en excellent état et incomparablement plus propres que ne l’étaient les Autolib' parisiennes. Un exemple à suivre.
LE MATCH FRANCE/ALLEMAGNE "EN VILLE". Plus respectueux, moins agressifs, les Allemands se comportent mieux en ville et laisseront libre un carrefour embouteillé par exemple, au lieu de s’y engouffrer… Ils se garent aussi, disons, plus délicatement ! Et surtout, ils sont prêts à utiliser le vélo plutôt que l’auto.
3 - Le parc auto : les conducteurs allemands roulent-ils plus en premium ?
L’industrie automobile allemande représente plus de 422 milliards d’euros de chiffre d’affaires dont 271 milliards à l’export selon le VDA, association des constructeurs allemands. Cela veut dire que les Allemands sont, comme les Français, friands de leur production nationale. Il suffit de voir le top des ventes pour s’en convaincre et remarquer au passage comme les best-sellers sont une gamme au-dessus par rapport à l’Hexagone : quand chez nous une Renault Clio ou une Peugeot 208 squatte la tête des ventes des mois entiers, c’est la Volkswagen Golf et non la Polo qui tient ce rôle outre-Rhin.
Si les couleurs les plus vendues sont également des gris et blanc, on note toujours un certain goût pour les tons criards ou pastels, incarnés de la façon la plus étrange par la série de Polo Harlekin des années 90. Une manière de personnaliser son auto est aussi d’y apposer des autocollants. Vous l'avez peut-être remarqué sur les voitures en plaques allemandes export rouges qui roulent parfois en France, on trouve souvent des autocollants sur les voitures teutonnes, mais contrairement aux USA, on n'essaie pas d'être drôle, plutôt de dire quelque chose : Bitte ein Bit (publicité pour une bière populaire il y a des années), forme du circuit du Nürburgring pour les fans, poisson stylisé pour les protestants, année du bac pour les jeunes (ABI 2013…), drapeau gay, chacun y va de son symbole… On peut aussi, moyennant un petit supplément, personnaliser une partie des chiffres et lettres de sa plaque d’immatriculation.
Dans un autre genre, on voit aussi des voitures américaines non importées, complètement exotiques en Europe, avec des plaques spéciales pour les troupes US encore stationnées an Allemagne, certains soldats emmenant leur Buick ou Mercury dans leurs bagages.
Une chose est sûre, là où on ne peut envier nos voisins, c’est pour ce qui concerne les taxes. Une voiture, c'est imposable directement, chaque année (comme l’était notre vignette), selon un montant dépendant d'un calcul savant à partir de différents critères. Des taxes réduites pour les quelque 400 000 voitures anciennes qui roulent en Allemagne avec des plaques se terminant par « H » pour historique, avec une moyenne de 42 ans d’âge selon le VDA. Parmi elles, la star est la Coccinelle avec pas moins de 36 248 exemplaires en « H ». Les véhicules doivent avoir 30 ans minimum pour avoir droit à ces plaques qui donnent, en plus de taxes automobiles inférieures, une assurance avantageuse et un accès sans limite aux zones sujettes aux plaquettes environnementales (indiquant le niveau de pollution, comme les vignettes Crit’air), en centre-ville.
LE MATCH FRANCE/ALLEMAGNE "PARC AUTOMOBILE". Le niveau est plus élevé chez nos voisins, il n’y a pas photo. L’état des voitures est également meilleur. Reste les coloris parfois douteux, mais ce n’est jamais qu’une question de goûts…
4 - La sécurité : les routes allemandes sont-elles plus sûres ?
Comme la France, l’Allemagne est parsemée de nombreux radars automatiques fixes qui égrènent les villes (vitesse et feux) et les routes de campagne. Moins agressif pour les yeux, leur flash est rouge, mais cela n’empêche pas de produire d’excellentes photos que l’on reçoit d'office, contrairement à nous. Sur autoroute, on trouve des radars cachés dans les portiques de panneaux de vitesse surplombant la route, des contrôles mobiles notamment dans les zones de travaux et des radars mesurant la distance de sécurité entre véhicules. La grande différence avec la France, c’est que les barèmes des tarifs de dépassement de vitesse sont bien inférieurs pour les plus petites infractions (jusqu'à + 20 km/h hors agglomération, 20 à 35 € et pas de points). A propos, en Allemagne, on "gagne" des points, on n'en perd pas, mais une fois arrivé à 18 points, plus de permis. Avant d'en arriver là, on peut faire des stages, voire recevoir un suivi psychologique spécifique !
On ne plaisante pas avec l’alcool au volant et généralement, si la bière coule à flots, il y a toujours une personne qui reste au jus de pomme pour ramener ses amis. En cas de contrôle, le passage à l’éthylomètre n’est pas forcément systématique comme en France, on pourra vous demander simplement si vous avez bu. Si vous dites non (et avez l'air sobre) on vous laissera probablement partir. Si vous dites, oui, un verre il y a 3 heures par exemple, vous soufflerez. La limite de 0,5 g/l est la même qu'en France.
En ville, les feux piétons rouges sont respectés, surtout si des enfants sont dans les parages pour ne pas donner de mauvais exemple et traverser lorsque c’est interdit, et même en pleine nuit. Et les voitures s'arrêtent systématiquement pour laisser passer les piétons sur les passages zébrés. Toujours. Voilà qui change de nos habitudes parfois peu compréhensives envers les piétons.
En voiture, on s’arrête aussi au feu orange. Et on y redémarre : les feux repassent à l'orange avant de revenir au vert. En amont de certains feux, pour éviter les accidents ou fluidifier la circulation, des feux orange clignotent (feu à venir au rouge) ou restent éteints (feu à venir au vert), bien pratique pour anticiper sa conduite.
Les pistes cyclables sont légion et les vélos ont une place importante dans la circulation, respectée par les voitures (bien regarder à chaque fois que l'on tourne à droite) et par les piétons (en danger s'ils sont sur la partie réservée aux cycles sur le trottoir !). Une infraction au code de la route ? C'est le permis de conduire du cycliste qui en fera les frais, tout comme s'il était au volant.
L’usage du klaxon marque aussi une grande différence avec nos (mauvaises) habitudes. En Allemagne, il s’agit bien d’un avertisseur d'urgence utile en cas de danger imminent. Mais certainement pas d’un moyen de communication de son humeur ou d’un rappel que le feu est déjà passé au vert depuis… au moins une demi-seconde ! D'ailleurs, un comportement jugé agressif ou dangereux peut être rapporté à la police. Mais surtout, l'agressivité n'est pas de mise, alors aucune raison de se démarquer.
Enfin, en prévision de l’arrivée de la mauvaise saison, tout le monde passe aux pneus hiver dès octobre. L'Allemagne n'est pas la Sibérie, les pneus hiver ne sont obligatoires qu'en cas de neige ou de verglas, mais tout le monde a deux jeux de pneus. C’est en effet une sage initiative, fortement encouragée d’ailleurs par les compagnies d’assurance qui regarderont l’équipement des autos impliquées dans un accident en hiver et seront plus enclines à rembourser ceux qui ont les bonnes gommes. En France, aucun gouvernement n’a voulu prendre le risque d’imposer cette mesure sensée, mais onéreuse pour l’automobiliste, donc impopulaire…
LE MATCH FRANCE/ALLEMAGNE "SECURITE". La sécurité est prise au sérieux en Allemagne, et les comportements de chacun y participent, avec des attitudes souvent respectueuses et prudentes. L’état et le gabarit des autos aident également, et n’oublions pas que les radars sont fréquents, mais avec des tarifs moins prohibitifs pour les petits excès. De quoi préférer l’aspect sécurité allemand, d’autant que les résultats sont là : 3 206 morts en 2016 pour 3 469 dans l’Hexagone, alors que la France compte 14 millions d’habitants de moins que sa voisine.
5 - L'automobile du futur : les Allemands croient-ils en la voiture autonome ?
Et demain ? À l’idée de céder le volant à un système de conduite autonome, nos voisins ont des réactions parfois très proches de nous, parfois éloignées, selon une étude de l’institut Ipsos. Ainsi, nous pensons des deux côtés du Rhin à une courte majorité que la conduite autonome sera plus détendue et plus facile. Nous sommes aussi tous deux relativement sceptiques à l’idée qu’elle sera plus rapide (environs un tiers seulement des personnes interrogées) ou plus sûre que maintenant. En revanche, les Allemands sont plus convaincus de l’aspect confort (64 % contre 52 % des Français).
Rappelons que les constructeurs teutons, surtout premium, sont parmi les premiers pour les fonctions d’aides à la conduite avancées, prémices de la conduite autonome. Mais rappelons aussi que les marques insistent souvent sur le fait que, du moins pour les prochains niveaux d’autonomie (3 et 4), le conducteur pourra choisir de reprendre la main et le plaisir de conduite ne sera pas laissé de côté. Et une bonne virée à haute vitesse sur l’Autobahn n’est pas près de se faire en mode autonome.
LE MATCH FRANCE/ALLEMAGNE "AUTOMOBILE DU FUTUR". Devant le grand point d’interrogation qu’est la conduite autonome, nous sommes des deux côtés du Rhin tout aussi curieux et que dubitatifs. L’avenir dira qui s’y adapte le mieux…
France/Allemagne : le bilan
L’Allemagne est une terre de paradoxes automobiles, très policée et en même temps, très ouverte… Mais globalement – c’est sans surprises – les règles y sont plus volontiers suivies, quoique, lorsqu’il s’agit de rouler plus vite, tout le monde ne se pose pas de cas conscience. En France, nous nous arrangeons plus volontiers avec les règles, mais nous aurions des leçons à recevoir en termes de civilité. Bref, l’Allemagne est certainement moins stressante au volant, alors qu’en France, le caractère latin reprend le dessus.
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