Faut-il renoncer aux toutes petites voitures ?
Nous sommes en 2021 après Jésus-Christ. Toutes les petites voitures sont rayées des gammes des constructeurs… Toutes ? Non ! Une citadine appréciée des irréductibles Gaulois résiste encore et toujours au contrôleur de gestion.
La petite voiture qui résiste aux vents contraires, c’est la Toyota Aygo. Ou plutôt sa descendante car, contrairement à PSA qui ne renouvellera pas ses cousines 108 et C1, Renault sa Twingo, Volkswagen sa Up! (et conséquemment Skoda sa Citygo et Seat sa Mii), le géant japonais vient d’annoncer qu’il persistera lui, dans le segment A, celui des toutes petites voitures d’entrée de gamme. La future Aygo reposera sur la plate-forme de l’actuelle Yaris.
Cette nouvelle m’a mis du baume au cœur.
La veille au soir, je rendais à mon carrossier sa petite Peugeot 108 « de courtoisie » et regrettais déjà son extraordinaire maniabilité, la sonorité « porschienne » de son 3 cylindres, l’ergonomie simplissime de son équipement, et plus généralement les plaisirs tout en désinvolture de sa conduite.
C’est que j’aime les petites zautos.
La GT de 400 ou 1000 chevaux ou la berline de luxe, ce n’est pas ma came.
Mon graal à moi, c’est la bagnole de trois mètres cinquante avec un petit moteur et une planche de bord façon Mickey. Au Mondial de l’auto, vous me voyez passer au large des stands Porsche ou Ferrari, et un peu plus loin, lever le court capot d’une modeste chose, plier ma carcasse à ses places arrière ou admirer le design souvent original de sa planche de bord en pur et dur plastoc garanti sans mousse.
Aucun ascétisme là-dedans, j’ai aussi des goûts de luxe : la première Mini Cooper moderne me ravit, la Fiat 500 m’émoustille, la Smart m’amuse et si un jour je m’offre un cabriolet, j’hésiterai entre une Daihatsu Copen et une Smart Roadster. Vous noterez que plus aucune de ces voitures n’est disponible au catalogue, du moins en version thermique.
Paris – Le Cap en voiturette
Au risque de passer pour un grand pervers, je confesse qu’un de mes plus beaux voyages automobile fut un Paris - Le Cap (d’Agde) par les départementales et les vicinales, au volant d’une voiturette dont j’ai oublié la marque, mais pas le bicylindre diesel ni le variateur aimablement débridés. Avec 25 ans d’avance sur la réglementation, je pointais à un bon 80 km/h dans le vrombissement du twin à mazout dont le bruit évoquait irrésistiblement le flat d’une 2CV à l’agonie dans une descente. Sauf qu’à l’agonie, je ne l’étais pas et à l’oreille comme à l’orteil, on sentait bien qu’un autre coup de tournevis bien placé lui aurait fait passer le mur des cent à l’heure.
A la réflexion, ce devait être une Ligier avec des morceaux de Formule 1 dans le châssis vu comment la chignole tenait le parquet sur ses petits pneus, mettant la misère aux locaux en 4L et R5 dès que ça tournait un peu.
Bref, je me suis bien amusé et même régalé, perdu dans des paysages qui ne voient jamais de touristes, évitant les 4 voies qui m’étaient interdites en prenant des routes avec de la mousse au milieu.
La décroissance n’est pas dans l’air du temps
Où je veux en venir ?
Pas à l’éloge de la voiturette quand même…
Simplement répéter (d’accord, rabâcher…) que le plaisir automobile n’attend pas le nombre des kilos et des chevaux et que la compacité et la légèreté en sont l’essence même.
Et surtout m’étonner, pour en revenir à ma petite Peugeot, qu’à l’heure où l’on nous parle de réfréner nos appétits automobiles, quand il devient de plus en plus évident que l’énergie, quelles que soient sa forme et son origine, deviendra plus rare et chère et sera toujours polluante, que tous les constructeurs occidentaux renoncent à ce qu’ils avaient de plus sobre dans leurs gammes. Jusqu’aux Américains qui enterrent leurs berlines au profit des SUV.
Dans une récente interview, Jean-Marc Jancovici, ingénieur spécialiste de l’énergie et du climat, affirmait que pour réduire de 50 % les émissions de C02 du parc automobile, nul besoin de révolution énergétique, il suffisait de diviser le poids des voitures par deux et de limiter leur vitesse à 110 km/h. Une méthode qui éviterait de passer par l’électrification massive et tout ce qu’elle implique sur le plan environnemental, social, économique, géostratégique… ou qui permettrait d’en limiter les dégâts.
L’industrie prend le chemin inverse et de plus en plus de scientifiques doutent que nous puissions parer aux urgences environnementales en remplaçant les goulottes de remplissage de nos voitures par des prises de courant. Ne faudrait-il pas d’abord les ramener à de plus justes proportions ? Et avant de tout réinventer, exploiter déjà ce que nous avons sous la main ?
A 800 kilos sans aluminium ni fibre de carbone, la triplette de Peugeot et Toyota comme celle de Volkswagen cochaient déjà toutes les cases.
On m’objectera que ces toutes petites voitures se vendent de moins en moins bien, argument imparable.
Un petit break familial d’une tonne
En rendant ma 108 à son propriétaire et en me demandant pourquoi je n’en avais jamais acheté une, je repensais au gamin de la publicité Finger (la barre chocolatée) des années 90 et me disais « elle est super ta 108 Monsieur Peugeot, mais tu pourrais pas la faire un petit peu plus longue ?»
C’est vrai quoi ? Vingt-cinq centimètres de plus sur l’empattement et quinze sur le porte-à-faux arrière - ou l’inverse - et on aurait un vrai petit break familial d’à peine une tonne capable de rendre le même service qu’une compacte mais pour 10 000 € et 400 kg de moins, et pour une consommation inférieure de quasiment deux litres.
Cet étirement ne serait pas techniquement délirant : c’est ainsi que Mini a fait de sa petite une vraie petite familiale avec le break Clubman (photo ci-dessus), et Dacia de la Logan, son break MCV qui tutoyait par sa soute ceux de Volvo.
Mais ni Mini ni Dacia n’avaient alors de SUV à vendre…
Déposer un commentaire
Alerte de modération
Alerte de modération