Ecologie - La voiture électrique à pile à combustible est-elle l’avenir de l’automobile ?
La transition écologique favorise la voiture électrique, mais les performances techniques et environnementales de la génération actuelle sont compromises par ses batteries. D’ici à 2030, une technologie permettrait de concilier écologie, avantages de l’électrique et du thermique : la pile à combustible.
Les pertes énergétiques d’un moteur électrique sont quasi-nulles et permettent d’obtenir un rendement de 90 % (contre moins de 40 % pour un moteur thermique). Son couple maximal immédiat, son silence et l’absence d’émissions polluantes sont plébiscités. Le véhicule électrique n’aurait que des vertus si l’on occultait les contraintes techniques, économiques et écologiques imposées par son imposant pack de batteries.
Ces accumulateurs sont composés d’importantes quantités de métaux rares (cobalt, lithium, cadmium, etc.) dont la production convoitée est source de pollution et de conflits géopolitiques. Le surpoids réduit les performances, en particulier l’autonomie. Augmenter leur capacité alourdit l’engin, donc sa consommation. Et contrairement à un réservoir de carburant, quand la batterie se vide, son poids ne diminue pas…
La nécessité de disposer d’infrastructures de recharge est aussi un inconvénient majeur. Le réseau électrique délivre une tension alternative quand les batteries fonctionnent en continu. Le processus de charge doit donc « redresser » la tension. Et selon que ce redresseur soit incorporé au véhicule ou bien à la borne, les pertes liées à l’échauffement par effet joule sont répercutées sur le propriétaire de l’un ou de l’autre. Au final, le rendement global chute pour s’établir à 50 %.
De l’électricité avec de la vapeur d’eau
La « pile à combustible » (PAC) est un générateur électrochimique qui convertit un combustible chimique en énergie électrique. Elle est composée de 2 électrodes intercalées par une membrane « électrolyte » spéciale qui laisse passer les ions (atomes polarisés) mais bloque les électrons libres. Lorsque le combustible entre en contact avec la 1re électrode (anode) et que la 2e (cathode) est alimentée en air, une réaction chimique « d’oxydoréduction » libère des électrons vers ces électrodes, ce qui génère un courant électrique.
Dans le cas du combustible hydrogène, la réaction est la suivante : Oxygène (O₂) + Hydrogène (2H₂) = Électrons (4e⁻) + Eau (2H₂O) + Chaleur
Aucune pollution : les seules émissions sont de la vapeur d’eau ! L’oxygène est prélevé dans l’air, l’hydrogène est présent partout et son recyclage est idéal. Une PAC peut fonctionner avec différents combustibles dont la formule comporte de l’hydrogène. Et dans le cas où on utiliserait du gaz naturel à la place de l’hydrogène, moins de 20g/km de CO2 seraient rejetés avec la vapeur d’eau.
Cette pile produit l’électricité au moment précis où le moteur la sollicite (seule une minuscule batterie « tampon » est nécessaire) et la chaleur dégagée est réutilisée selon la saison vers le circuit de chauffage ou vers l’évaporateur de climatisation sans effondrer l’autonomie !
Les composants critiques d’une PAC sont en quantité bien moindre que dans les batteries. Le rendement atteint 60 % à 80 % selon la technologie et plusieurs combustibles gazeux ou liquides peuvent être utilisés. Il existe une vingtaine de versions différentes de PAC dont les coûts ne cessent de baisser.
Deux technologies de piles actuelles vont révolutionner le transport
La PEMFC « pile à membrane solide échangeuse de protons H⁺ » est compacte et offre un « démarrage pleine puissance » (1W-250KW) très rapide. Le combustible peut être de l’hydrogène ou du bioéthanol (variante DEFC « Direct Ethanol Fuel Cell »).
La SOFC « pile à membrane solide céramique oxyde » n’utilise aucun métal précieux et fournit une grande plage de puissance (1KW-2MW). Les plus anciennes étaient à architecture cylindrique, les plus récentes sont planes. Elles sont compatibles avec l’hydrogène, le bioéthanol, le méthane, le propane et le butane. Elles acceptent même l’essence et le biodiesel, ce qui permettrait aussi de les utiliser en hybridation sur un véhicule thermique !
Une version plus récente est encore en phase expérimentale et s’annonce très séduisante avec un coût de fabrication en nette baisse, une meilleure durée de vie et un rendement record de 98 % ! Il s’agit de la PCFC « pile à membrane solide céramique protonante », sorte de mix entre la PEMFC et la SOFC qui conjuguera toutes leurs qualités respectives.
Des piles à combustible pour tous les carburants
Côté combustible, le bioéthanol faciliterait une adoption immédiate de la PAC par l’ensemble du transport routier : densité énergétique forte, production facile, réseau de distribution déjà en place, mini-réservoir classique, et une autonomie réelle de 600 kms pour seulement 30 litres (l’hydrogène pour sa part doit être stocké « liquide » donc sous pression dans un réservoir renforcé, ou bien « solide » grâce aux propriétés de l’hydrure de magnésium qui peut l’absorber et le libérer).
Une fois cette généralisation de la PAC « bioéthanol » effectuée, d’autres combustibles pourraient progressivement venir s’ajouter. Des procédés plus écologiques sont testés pour en produire à « bas carbone » ou à partir de « renouvelables » :
- Gazéification de biomasse
- Décomposition thermochimique ou photoélectrolytique de l’eau
- Électrolyse du CO₂ en acide formique puis catalyse
- Synthèse biologique par bactéries ou micro-algues
- etc.
Fig1&3 : Station d’hydrogène solaire autonome Honda - Fig2 : Station d’hydrogène Hyundaï - Fig4 : Station autonome de recharge électrique « l’Ombrière » développée lors du Vendée Globe 2008-09. Ce concept pourrait être adapté en station autonome de production de combustible hydrogène ou méthane pour PAC.
20 ans pour rendre nos voitures actuelles obsolètes
Actuellement, moins de 10 000 voitures à pile à combustible ont été vendues dans le monde : situation logique au regard du réseau de stations-service encore inexistant et d’un prix de vente élevé comparable à une « Tesla » (environ 70 000 € en 2018).
Cependant, tout cela devrait évoluer beaucoup plus favorablement d’ici 2030, avec d’une part la mise en place d’un réseau de distribution (bioéthanol, hydrogène) et d’autre part avec une baisse de prix notable liée à l’amélioration de l’offre de véhicules proposés aux clients.
Ainsi, à l’horizon 2040, les PAC rendront obsolètes toutes les autres technologies de transport routier. Leurs améliorations successives réduiront les batteries embarquées à des dimensions minimales et à des usages très spécifiques. Seuls les modes de déplacement aux distances très courtes pourront encore éventuellement employer des packs de batteries traditionnelles de faible capacité. Pour tous les autres usages, la pile à combustible sera plus écologique et plus compétitive.
L'ensemble du territoire sera alors équipé en stations autonomes de production de combustible « vert ». La tête dans les nuages de vapeur, les utilisateurs de véhicule électrique à pile à combustible y feront alors « le plein » pour 1000 kilomètres...
…en moins de 5 minutes.
LA PILE A COMBUSTIBLE (PAC) EN 10 DATES CLES
1839 - Découverte en Allemagne du principe physicochimique de la PAC.
1953 - Construction en Angleterre du 1er prototype de pile.
1961- Utilisation de générateurs électriques à pile de type AFC « Alcaline Fuel Cell » dans le programme spatial américain « Apollo ».
2008 - Delphi présente un prototype fonctionnel de poids lourd hybride à moteur thermique équipé d’une motorisation auxiliaire à pile de type SOFC.
2014 - Commercialisation de la 1re voiture particulière à PAC hydrogène : la « Toyota Miraï ».
2016 - Tests sur route en conditions réelles d’un prototype « Nissan e-nv200 » (pile de type SOFC bioéthanol).
2016 - Commercialisation de la « Honda clarity Fuel Cell » (pile de type PEMFC hydrogène)
2019 - Commercialisation du « Hyundaï Nexo » (PAC hydrogène)
2030 - Baisse du prix de vente des véhicules électriques à PAC au niveau de leurs homologues thermiques et électriques à batteries
2040 - Adoption généralisée de la PAC par l’ensemble du transport routier
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