Balade d’été en Citroën 2CV retrofitée (reportage vidéo)
Prendre le volant d’un véhicule mythique qui a participé à l’histoire automobile de la France est toujours un moment particulier. La 2CV n’est ainsi pas l’auto la plus rare sur nos routes, mais elle distille toujours un plaisir à monter à son bord : c’est un voyage dans le temps en termes de design, de motorisation, de confort moelleux, et de style de conduite. Mais la 2CV essayée aujourd’hui a une différence notable sous son capot, puisqu’elle a troqué son bloc thermique contre un moteur électrique.
Récemment, nous avons essayé la Renault 5 Alpine Turbo, autre véhicule emblématique de la production tricolore. Autant dire que nous changeons ici radicalement d’ambiance, puisque d’un moteur pétaradant nous passons à une utilisation silencieuse, où le bruit le plus reconnaissable risque d’être celui de quelques dents qui grincent.
La disparition du moteur d’origine n’est souvent que peu appréciée des amateurs de véhicules anciens. Cependant cette transformation prend lentement son essor suite à son autorisation et son encadrement.
Pour notre 2CV comme pour tous véhicules rétrofités, des règles sont dictées par l’arrêté du 13 mars 2020, publié au Journal officiel en avril de la même année. Ainsi, entre-autres obligations, la puissance de l’auto modifiée devra être comprise entre 65 et 100 % de celle du moteur d’origine. Le poids à vide sera compris entre plus ou moins 20% celui d’origine, pareil pour le poids à vide entre les essieux, avec une marge de plus ou moins 10%, et aucune modification des dimensions, ou de la masse maximale du véhicule et des charges par essieu.
Une réglementation complexe, qui nécessite de faire appel à un professionnel habilité. Ces règles concernent le rétrofit en France, et ne sont pas identiques dans toute l’Europe.
Pour le véhicule d’un particulier, le rétrofit ouvre le droit à des aides allant de 2500 à 5 000 € pour une auto, selon le revenu fiscal du demandeur. Il faudra cependant posséder l’auto depuis plus d’un an, ne pas la revendre avant 6 mois, et avoir parcouru au moins 6 000 km avec. Des aides régionales peuvent aussi s’ajouter.
Mais revenons à notre voyage dans le temps. Extérieurement, notre 2CV ne diffère pas d’une de ses semblables thermiques. Les différences se vont jour lorsque l’on ouvre le coffre, qui aura été sensiblement empiété par le pack de batterie. À bord également, rien ne change. On retrouve même sur notre version la jauge à essence, qui sert désormais à connaître le niveau de charge de l’auto.
Pour faire le plein d’énergie, il faudra compter 3h30 sur une prise standard, permettant d’obtenir une autonomie de 90 km (une vitesse appelée à diminuer sensiblement avec un nouveau chargeur à venir). Ici, ne comptez pas sur l’ordinateur de bord pour vous indiquer votre consommation, ou pour vous conseiller un arrêt. Il faudra le faire à l’instinct. De toute façon, avez-vous vraiment l’intention de faire un Paris-Cassis avec l’auto ?
La boite de vitesse se contrôle « à l’ancienne ». Il faut d’ailleurs un peu d’habitude pour comprendre comment enclencher la marche avant et la marche arrière. Après quelques essais infructueux, cela devient enfin naturel.
Les rapports de boite sont normalement respectés. Mais soyons honnêtes, une fois que l’on a trouvé comment enclencher la marche avant, on ne touchera plus au levier de vitesse. L’auto ne peut pas caler, et le flou existant sur le rapport enclenché fait que l’on préfère oublier cet aspect.
Notre 2CV s’élance donc dans un silence relatif. En effet, le moteur électrique émet un bruit distinctif, mais moins lissé, moins feutré que sur une auto de grande production. Ce que l’on entend bien par contre, ce sont tous les bruits de carrosserie de notre 2CV qui ne sont cette fois pas couverts par le moteur d’origine.
C’est un peu déstabilisant au début. Le confort n’est toutefois pas ce que l’on attend de ce voyage. On oublie le moindre élément moderne, et la journée plutôt chaude au moment de l’essai nous fera regretter la moins efficace des climatisations. Ici c’est simple, il faut tourner une molette qui ouvre une trappe sur le capot pour faire entrer directement l’air extérieur.
À l’heure où le 30 km s’impose dans la moindre agglomération, notre 2CV s’avère à son aise. Le compteur peu précis gigote, les dos-d'âne sont pris avec le moelleux d’époque, et les variations de vitesse se font sans difficulté. En sortie de village, une belle côte limitée à 70 km/h permet d’appuyer sur le champignon, et de constater ainsi qu’une électrique ne bénéficie pas forcément d’une accélération fulgurante ! La vitesse va monter lentement, très lentement, et l’on apprécie de n’avoir personne derrière à rendre fou. Cela laisse le temps de profiter du paysage, le coude à la portière.
Le temps d’un arrêt sur une place réservée aux autos électriques permettra de discuter et de constater des opinions contrastées. En elle-même, la 2CV fait l’unanimité, et notre version décorée de façon voyante attirera beaucoup de sympathie.
Un groupe de personnes retraitées viendra me raconter leurs aventures en 2CV (et il peut arriver beaucoup de choses avec cette auto), s’amusant du côté électrique de la mienne. Une autre personne viendra la prendre en photo pour faire enrager un membre de sa famille anti-rétrofit. Quelle que soit l’opinion, la cote d’amour de la 2CV ressortira toujours gagnante permettant des échanges agréables et apaisés.
L’utilité de faire rétrofiter une 2CV sera bien sûr un point de débat pour nombre de d’amoureux des voitures anciennes. Stéphane Wimez, le directeur de R-Fit mais également du 2CV Méhari Club Cassis nous expliquera que cela permet de faire vivre les autos, tout en respectant les attentes des nouvelles générations pour qui l’électrique est souvent une évidence.
Si un particulier peut se montrer intéressé par le rétrofit, le regard se tournera surtout vers les entreprises pouvant exploiter une 2CV commercialement : pour des visites guidées en véhicules anciens, pour des vendeurs sur des stands et salons, il pourra y avoir un intérêt économique et en termes d’image.
À l’heure de ramener le véhicule à son garage, on pourra se faire la remarque que la balade était agréable, mais qu’il peut manquer un petit supplément d’âme. Il me revient alors en mémoire l’essai de la Renault 4L qui permettait de faire le plein de sensations.
Mais on ne va pas se mentir, c’est aussi car on touche ici à la fibre nostalgique, à des souvenirs que l’on aime retrouver. Le rétrofit touche un autre public, et sauvera bien quelques carcasses dormant en fond de grange. Et d’autres continueront à pétarader joyeusement.
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