Achat d'un véhicule d'occasion : de quelles garanties disposez-vous ?
Beaucoup d'acheteurs de véhicules d'occasion pensent encore qu'un tel achat ne donne droit à aucune garantie autre qu'une éventuelle garantie contractuelle. Rien n'est plus faux. Caradisiac vous explique ce à quoi vous avez droit.
"T'es tombé en panne avec l'occase que tu viens d'acheter ? Pas de chance, t'as que les yeux pour pleurer..."
"Je t'avais dit d'acheter dans un garage. Au moins tu aurais pu te retourner contre le vendeur !"
"Tu sais, après 2 ans et 30 000 km parcourus, faut plus rien espérer..."
Ces réflexions vous disent quelque chose ? Vous les avez entendues, lors d'un dîner de famille, entre collègues, au mariage du cousin ? Probablement.
Car de nombreuses personnes restent persuadées qu'en cas d'achat d'un véhicule d'occasion, ils n'ont aucun recours si un problème survient après l'achat. Sauf si bien sûr la voiture a été achetée chez un professionnel avec une garantie. Et encore, vous vous dites que les exclusions sont tellement nombreuses que bon, c'est peine perdue (pas forcément faux dans ce dernier cas...).
Et pourtant... Oui, pourtant la loi protège les acheteurs, et plutôt bien. Oui, on est rarement complètement démuni. Que le vendeur soit un professionnel ou un particulier, il existe des recours en cas de panne ou de dysfonctionnements.
Il faut distinguer trois cas de figure. La garantie contractuelle (ou commerciale), et deux garanties dites légales (c’est-à-dire imposées par la loi) : la garantie de conformité et la garantie contre les vices cachés.
La garantie contractuelle
Non obligatoire, elle est pourtant proposée par presque 100 % des professionnels, et par quelques particuliers. Sur les occasions récentes, les professionnels proposent en général entre 6 et 24 mois de garantie. Sur les plus anciennes, cela se bornera à la fameuse garantie MBP (Moteur, boîte, pont), de 3 mois, que l'on appelle dans le milieu du journalisme automobile la "garantie jusqu'au bout de la rue".
En effet, elle ne concerne que ces trois éléments (et parfois même seulement le moteur et la boîte), et seulement les pièces internes lubrifiées. Autant dire qu'elle ne sert, sauf exception, pratiquement à rien.
Mais les garanties 6 à 24 mois sont plus intéressantes. Leur étendue est variable, il faut donc lire attentivement les éléments couverts, ou au contraire les exclusions pour celles de type "tout sauf...". En général, les pièces d'usure (freins, suspensions, embrayage, etc) sont exclues du champ de ces garanties. Tout comme un défaut d'utilisation ou d'entretien la rend caduque.
Le professionnel n'a pas obligation de vous fournir le contrat stipulant les pièces couvertes, mais a obligation de vous le fournir à votre première demande.
Ces garanties sont le plus souvent offertes, et incluses dans le prix de la voiture, sauf si vous souhaitez bénéficier d'une durée plus longue, dans ce cas cela devient payant et s'appelle "extension de garantie".
Les particuliers sont plus rares à proposer ce type d'offre. Ils font appel pour ce faire à des entreprises privées spécialisées. Et cela fonctionne ensuite comme pour les professionnels.
Bon à savoir :
- Ces garanties ne sont pas subordonnées à l'entretien dans le garage ou le réseau qui vous l'a proposé, mais la réparation, oui. Il faut simplement respecter les préconisations d'entretien du constructeur.
- Toute immobilisation de la voiture de plus de 7 jours consécutifs prolonge d'autant la garantie.
Pour finir, les garanties contractuelles sont faciles à mettre en œuvre. Pour un élément couvert, l'acheteur n'a aucune preuve à apporter quant à l'origine de la panne. Cela évite les discussions.
La garantie légale de conformité
Ici, seuls les vendeurs professionnels sont concernés. Si vous avez acheté à un particulier, vous ne pourrez invoquer cette garantie. Elle est limitée dans le temps, soit 2 ans à partir de la date de vente. Et évidemment, le défaut de conformité ne doit pas être connu au jour de la vente.
Selon l'article L. 211-4 du code de la consommation, "le vendeur est tenu de livrer un bien conforme au contrat et répond des défauts de conformité existant lors de la délivrance".
La loi donne des indications pour aider à déterminer si le bien est conforme ou non. Ainsi, le bien doit "correspondre à la description donnée par le vendeur et posséder les qualités que celui-ci a présentées sous forme d'échantillon ou de modèle".
En termes automobiles, la conformité s'apprécie par rapport au fait que la voiture vendue est bien conforme à la petite annonce passée, par exemple, ou qu'elle n’a pas subi de transformation. Un kilométrage différent d'annoncé, un millésime plus ancien, une finition erronée (moins équipée, car dans l'autre sens, se plaindre n'aurait aucun sens), une première main mise en avant alors que c'est une seconde main, des équipements annoncés et non présents, mais aussi une grosse réparation déguisée en simple tôle froissée sont à considérer comme des défauts de conformité.
Il est à ce titre fort utile, donc, de conserver une copie de l'annonce, ou une capture d'écran. Pour ensuite pouvoir prouver le préjudice.
Si un défaut de conformité est invoqué, c'est à l'acheteur d'en apporter la preuve, sauf si moins de six mois se sont écoulés. Dans ce cas, le défaut est présumé exister au moment de la vente.
L'acheteur peut demander la réparation ou le remplacement de la voiture, voire la résolution de la vente (sauf en cas de défaut mineur). Mais le vendeur professionnel peut refuser l'une des solutions, surtout si les frais à engager sont manifestement disproportionnés par rapport à l'autre.
La garantie légale contre les vices cachés
Contrairement à la garantie de conformité, et contrairement aussi à ce que pensent nombre d'acheteurs, la garantie légale contre les vices cachés est opposable à un vendeur particulier, aussi bien qu'à un vendeur professionnel.
Elle est illimitée dans le temps et le kilométrage. Et vous avez deux ans pour l'invoquer à partir du moment où vous découvrez ledit vice caché. Les articles de loi qui s'y rapportent sont les 1641 et suivants du code civil.
L'article 1641 stipule que "le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminue tellement cet usage que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus".
Il est toujours assez difficile de définir si un problème est assimilable à un vice caché. Par définition, bien sûr, il doit être non visible et existant au moment de la vente.
La jurisprudence des tribunaux donne quelques exemples de vices cachés, mais la plupart restent à l'appréciation des juges... Ainsi, des défauts sur le système de freinage, ou affectant la tenue de route, ont été reconnus comme vice caché, un bruit parasite n'empêchant pas la voiture de rouler mais très fatigant à la longue aussi. Des réparations effectuées à la va-vite après un accident, et pas dans les règles de l'art sont évidemment assimilables au vice caché. Par ailleurs, les usures prématurées d'organes capitaux d'une voiture (un moteur qui casse à 100 000 km, un turbo qui rend l'âme à 80 000 km, des disques qui sont à remplacer au bout de 20 000 km seulement) sont toutes assimilables à un vice caché, car l'acheteur, s'il avait eu connaissance de cela, n'aurait pas acquis la voiture, ou en aurait donné un prix moindre.
Dans tous les cas, c'est à l'acheteur d'apporter la preuve de la présence du vice caché. Par tout moyen, dit la loi. Donc, des devis de garage ou de réparation devraient suffire. En pratique, seule une expertise (contradictoire, c’est-à-dire en présence du vendeur) sera recevable devant un tribunal.
L'acheteur peut demander une baisse du prix de la voiture (action estimatoire) ou l'annulation de la vente (action rédhibitoire). Ce choix appartient à l'acheteur, le vendeur sera obligé de s'y plier, même si l'autre solution lui avait mieux convenu.
Les dommages et intérêts
L'application de la garantie contractuelle (commerciale) ne permet pas l'obtention de dommages et intérêts. Par contre, les garanties de conformité et contre les vices cachés, oui. Il faut donc garder toutes les factures prouvant les frais engagés, afin de demander au vendeur leur remboursement. Frais de gardiennage, coût de la location obligatoire d'une voiture pour palier les dysfonctionnements de la vôtre, honoraires de l'expert, etc.
Par contre, l'obtention de dommages et intérêts envers un particulier est rare. Car contrairement à un professionnel, il est présumé de bonne foi. Pour en obtenir il faut donc en plus prouver qu'il était au courant. Le professionnel, lui, même s'il est de bonne, est présumé de mauvaise, en sa qualité de spécialiste de l'automobile.
Les façons d'agir
Il est toujours préférable de commencer par une procédure amiable, un bon arrangement valant toujours mieux qu'un mauvais procès. Mais si le vendeur ne veut entendre raison, à tort ou à raison, il faudra saisir les juridictions compétentes.
Les tribunaux de proximité n'existant plus depuis le 1er juillet 2017, il faut saisir le Tribunal d'Instance pour les litiges portant sur moins de 10 000 €, et le Tribunal de Grande Instance pour ceux portant sur plus de 10 000 €.
Dans tous les cas, que ce soit à l'amiable ou au tribunal, les échanges de courrier doivent se faire en recommandé avec accusé de réception.
BILAN
Vous le voyez, rien n'est perdu face à un souci survenant après l'achat d'une occasion. Malheureusement, décrire les possibilités ne suffit pas à obtenir gain de cause. La plupart du temps, les vendeurs traînent des pieds, sont de mauvaise foi. Certains acteurs aussi évidemment. La plupart du temps les procédures sont longues et coûteuses. Il faut donc peser le pour et le contre et mesurer si le jeu en vaut la chandelle.
Mais en tout état de cause, la loi protège tout de même l'acheteur contre les indélicatesses, voulues ou non, de tout type de vendeur.
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