Radars mobiles : pas si redoutables que cela !

A première vue, on pourrait presque se demander d'où sortent les chiffres obtenus par Le Figaro ce mercredi, à propos des radars mobiles nouvelle génération (RMNG) ! Car ils semblent n'avoir rien à voir avec ceux publiés en exclusivité par L'Express, il y a presque deux semaines, et que Caradisiac a pu également consulter. Quand le quotidien annonce ainsi que « 300 000 automobilistes ont été flashés lors de ces 12 derniers mois par ces appareils au nombre de 99 à ce jour », l'hebdomadaire, sur son site Internet VotreArgent.fr, précise lui que les 77 RMNG en service en 2013, ont « comptabilisé un total de 178 464 messages d'infractions (Mifs), dont "seulement" 101 316 ont pu être convertis en contraventions »... Autant dire une goutte d'eau dans un océan, quand on sait que les radars automatiques (tous types confondus) ont enregistré un total de 19 millions de flashs et 11 millions de PV, l'an dernier !

Certes, la période considérée diffère d'une publication à une autre... Mais il n'en demeure pas moins qu'il y a de quoi s'interroger. Si, au final, il semblerait bien que l'on puisse établir une moyenne mensuelle semblable, de l'ordre d'un peu plus de 250 flashs par radar de ce nouveau genre (voire notre tableau ci-dessous), le taux de conversion de ces clichés en avis de contravention est en revanche bien différent, en passant de 56 à 66 %, avec seulement trois mois de changés !

Des performances bien en-dessous des radars fixes

Les 56 % transformés en PV de l'année 2013 correspondent en fait aux neuf premiers mois où ces RMNG ont été mis en service, puisqu'ils ont commencé à apparaître sur nos routes seulement à partir de mars de l'an dernier. Tandis que le décompte de la délégation interministérielle à la Sécurité routière (DISR), rapporté par Le Figaro, vise bien pour sa part les douze mois glissants de leur première année complète d'activité. Mais il n'empêche : annoncé que le « taux d’exploitation des clichés obtenus par le biais de ces appareils est de 66 % quand il est de 60 % avec les autres radars » n'en reste pas moins des plus surprenants !

On est d'autant plus étonné par cet enthousiasme que les statistiques 2013 tendent plutôt à démontrer que les nouveaux mobiles-mobiles font grandement moins bien que les autres types de radars de vitesse en général, et que les radars embarqués - ancienne génération – en particulier. Alors même qu'ils ont pour vocation de remplacer ces derniers ! L'an dernier, il y avait encore 912 embarqués en service (contre 933 début 2012). Et à la fin de l'année 2014, ils ne devraient plus être que 625, notamment renouvelés par 200 RMNG, si l'on en croit une annexe du dernier projet de loi de Finances. Avec quelque 5 millions de flashs en 2013, les embarqués ont d'ailleurs d'ores et déjà commencé à reculer, puisque c'est presque 18 % de Mifs en moins qu'en 2012. Maintenant, 77 % des clichés ont bien été convertis en contraventions. C'est bien simple, aucun autre type de radars ne fait aussi bien !

Les petits excès de vitesse dans le collimateur aussi !

Et pour en revenir au nombre d'infractions relevées par les nouveaux radars mobiles, on reste de toute façon loin des performances des anciennes générations. En 2013, si l'on peut établir qu'en moyenne, un RMNG a enregistré quelque 257 excès de vitesse par mois, un embarqué, qui pour sa part ne peut donc être utilisé qu'à poste fixe, et non en roulant dans le flot de la circulation, en a comptabilisé plus de 455 (comme décrit dans notre tableau ci-dessus). Concernant enfin la nature des dépassements repérés (voir notre tableau ci-dessous) : comme les autres radars, les RMNG ont surtout enregistré des excès de moins de 20 km/h... Dans une moindre mesure certes, mais les écarts ne sont pas si spectaculaires !

Source : ministère de l'Intérieur

Officiellement, pourtant, ces nouveaux radars, baptisés également « mobiles-mobiles », ont bien pour vocation de pister les plus gros excès de vitesse. Et mieux vaut se méfier du discours officiel à ce propos ! Si les petits dépassements ont certes moins de chance d'être pris entre les mailles de leur filet, dès qu'un conducteur roule à un seul kilomètre-heure au-dessus de la, vitesse limite, il court bel et bien le risque d'être verbalisé.

En « mode mouvement », précise le certificat d'homologation de ces nouveautés, « il est nécessaire que la différence de vitesse entre les véhicules cible et porteur soit supérieure à 20 km/h pour qu'un message d'infraction soit émis. » Mais rien n'empêche le véhicule porteur de circuler sous la vitesse limite... Enfin, concernant la marge technique à retrancher de la vitesse enregistrée, plus grande que pour les appareils à poste fixe, elle ne veut pas dire non plus que les petits excès seront forcément épargnés !

Démonstration :

A moins de 100 km/h, 10 km/h (contre 5 km/h pour les radars classiques) doivent donc être soustraits, puis au-dessus de 100 km/h, 10 % (au lieu de 5 %). Et les RMNG ne seraient donc paramétrés que pour flasher des véhicules uniquement « détectés à » :

- 146 km/h ou plus sur une autoroute limitée à 130,

- 124 km/h ou plus sur une voie express limitée à 110,

- 102 km/h ou plus sur une route limitée à 90 ou bien encore,

- 81 km/h ou plus quand elle est limitée à 70 puis,

- 61 km/h ou plus en ville où la vitesse limite est de 50.

Mais « détectés à » signifie qu'il s'agit de la vitesse lue par les radars, laquelle ne correspond pas toujours exactement à la vitesse réelle ! Prenons l'exemple concret d'un cas sur une route limitée à 70 km/h. Pour une vitesse réelle de 71 km/h, ces nouveaux mobiles ont certes « le droit » de la percevoir à 61 km/h (-10 km/h), mais aussi à 81 km/h (+10 km/h)... Or, à 81, ils sont bien, comme dit plus haut, paramétrés pour se déclencher ! Pourtant, si l'on ne considère que la vitesse réelle, le véhicule pouvait bien rouler à 71 km/h, soit à 1 km/h de trop « seulement » !