Royal Enfield : zoom sur la situation actuelle et future
Qui n'a pas peur des conséquences financières du Coronavirus, fabrique une moto toutes les 40 secondes, a doublé le nombre de ses ventes hors marché local et est plein de projets pour la décennie à venir ? Royal Enfield. Comment le savons-nous ? Nous avons assisté à un seminaire virtuel de plus d'1h30 en compagnie de Vinod K Dasari (PDG), Siddartha Lal (MD&CEO), B Govindarajan (Head sourcing & Logistic) et Arun Gopal (Head of International Business). Les têtes pensantes de la marque.
Le télétravail, cela peut avoir du bon, et provoquer de beaux moments. Pour preuve, cette rencontre avec le directoire de la marque Royal Enfield, ayant pour but de préciser les projets d'avenir de la marque, mais aussi de revenir sur une histoire riche et quelque peu chaotique. Voici un petit compte rendu de ce que nous avons retenu.
Il y a 20 ans, le plus important pour Royal Enfield, c'était de survivre, de ne pas fermer, plutôt que de jouer sur l’image de la marque. Surtout à une époque ou de nombreux concurrents collaboraient avec le Japon, acquérant des technologies remarquables au prix de gros investissements.
Rouler en Royal Enfield, c'était déjà se démarquer. Rachetée en 1990 et redevenue Royal Enfield en 1994, mais une Royal Enfield Indien et non plus anglais, la marque n'a depuis eu de cesse d'appliquer une politique marketing et commerciale à contre-courant des tendances. À l’inverse des grandes marques européennes reprises par de grands groupes chinois, Indian Motorcycle n'a jamais cessé de vivre en Inde et de s'y développer.
Comme il nous l'a été rappelé lors des interventions, Royal Enfield était très petit en comparaison de ses concurrents, mais pour vivre sur la durée, la marque devait faire différemment. La décision a alors été prise de focaliser sur la communauté, le loisir, et le déplacement, sans tenir compte des effets de mode, de la course à la puissance ou à la cylindrée. D'ailleurs, Royal Enfield ne disposait pas de gros cubes, et ce n'a jamais été l'une de ses priorités. Depuis 2017, la marque investit le créneau des moyennes cylindrées, au travers des Interceptor et Continental GT 650, dotées du premier bicylindre moderne de la marque.
Royal Enfield assure croire dur comme fer en cette catégorie des "middle size". Une catégorie collant à l'image actuelle de la marque et reflétant aussi bien le besoin de montée en gamme dans les pays dits émergents ou sur le marché local de la marque (l'Inde), que la possibilité de répondre à un besoin sur le vieux continent ou aux Etats Unis. "Nous pensons qu'il y a un potentiel énorme dans les cylindrées moyennes. Nous voulons y aller, investir le segment, nous y croyons pour la prochaine décennie !". Pour ce faire, une fois encore, les bases sont étayées et l'image travaillée naturellement.
Pour Royal Enfield, la conquête de son public se fait de manière solide et naturelle. Tout passe par une acceptation de la marque et de ses modèles, avant que n'arrive une montée en puissance. Un pas à pas qui fait ses preuves et ne passe pas par une revendication farouche de conquête de nouveaux territoires, de nouveaux pays. La stratégie d'une entrée mesurée sur un marché, c'est un acte volontaire : il ne sert à rien de planter un drapeau partout si l'on ne peut assumer par la suite. Ainsi, le Brésil ne disposait au départ que d'un seul point de vente à São Polo. Le réseau se fait comme les motos, de manière organique.
Convaincus que de nombreux utilisateurs du quotidien aiment la moto, conscients du fait que le vivier de millions de commuters grandit chaque année (pas forcément en France…), les dirigeants estiment que ceux-ci veulent quelque chose d'unique, de plus identifiable et de plus exploitable que Royal Enfield est en mesure de leur proposer. Selon eux toujours, pays en voie de développement et pays développés se rejoignent sur ce besoin. Pour Royal Enfield, "Rester soi-même, c'est être original".
L'après Covid-19
Le présent n'est pas tendre avec les marques moto, et l'économie est au cœur des préoccupations en cette période de Covid-19. Pour autant, aucune inquiétude du côté de l'Inde. C'est même avec grand optimisme et avec un sourire grave (le sujet n'est pas pris à la légère), que la bonne santé financière du groupe nous a été confirmée, notamment en prenant contact avec les fournisseurs et avec les distributeurs, afin de les assurer de leur indéfectible soutien. La priorité ? Ne pas réagir à/dans l'urgence ou d'une manière qui influerait sur le long terme. "Nous pouvons continuer à saisir les grandes opportunités, mais nous pouvons aussi tenir avec de faibles revenus". La sagesse a parlé.
Aux dires de la direction, la société est en fonds et elle honore aussi bien ses fournisseurs que ses employés. Des employés dont les conditions de travail ont été adaptées au contexte actuel afin de garantir leur sécurité. Quant à l'avenir, le verre plein est de rigueur ! Clairement, la stratégie maison ne va pas changer. Mieux encore, le développement de certains nouveaux modèles aurait été accéléré, sans passer par une industrialisation ni une mécanisation patente des opérations. Toujours avec un niveau de qualité et d'exigence en hausse, la marque avance. Chaque faiblesse identifiée est corrigée, et c'est une véritable course de fond. Et d''affirmer qu'après cette période, les gens devraient avoir envie d'être seuls lors de leurs déplacements, privilégiant la moto. Si seulement ! Nous ne pouvons qu'encourager cette pensée des plus positive.
Un avenir électrique ?
À propos de mobilité, justement, Royal Enfield se tournera-t-elle vers le marché des 125 cm3 ? Il n'en est pas question, d'autres le font tellement bien et depuis tellement longtemps sur le marché Indien que la marque considère cela comme non pertinent, privilégiant les cylindrées allant de 250 à 750 cm3. Produire un 125 pour le marché européen ne serait donc pas pertinent. Par cotre, se lancer dans l'électrique est un axe non négligeable et déjà exploré par Royal Enfield semble-t-il. Reste à voir ce qu'il en sera des modèles présentés lors de l'EICMA de Milan en 2019 et peut-être lors de l'édition 2020, dont on espère qu'elle se tiendra bien. Royal Enfield semble en tout cas sur une bonne dynamique et avoir les moyens de ses ambitions. À l'heure où d'autres leaders chercheront leur souffle après l'épisode Covid-19, l'Inde semble respirer et vouloir faire souffler un vent Indien sur les marchés.
Déposer un commentaire
Alerte de modération
Alerte de modération