Route de nuit - Le Brésil, l’autre pays de Volkswagen
Pays fermé à l’importation de véhicules à partir de 1953, et ce, pour plus de 40 ans, le Brésil a incité Volkswagen à y développer spécifiquement plusieurs modèles, en plus de modifier sensiblement ceux conçus en Europe.
Cinquième pays le plus grand du monde, le Brésil profite, et on le sait peu, d’une riche histoire automobile. On croit souvent qu’il n’a pas de production locale, ou au mieux, qu’on y fabrique que des voitures sous licence. En fait, même si cela a été vrai, le Brésil a conçu et produit ses propres modèles, sous des blasons étrangers. A commencer par Volkswagen.
Celui-ci y écoule sa Coccinelle, surnommée là-bas « Fusca », depuis 1950, puis, à partir de 1953, la produit localement en CKD à partir d’éléments envoyés d’Allemagne. En 1959, la fabrication devient principalement brésilienne, et la Fusca évolue de façon propre, donc différente de celle du modèle européen. Les vitrages ont vite différé, la version brésilienne ne bénéficiant par exemple jamais du pare-brise bombé introduit en Allemagne sur la 1303 dans les années 70. Et quand la production cesse à Wolfsburg en 1979, elle continue au Brésil, la Fusca évoluant jusqu’à son retrait, en 1986. Elle se vend encore bien, mais VW souhaite faire de la place dans ses usines pour des modèles plus rentables.
Ce n’est qu’un au-revoir ! Pourquoi ? Parce qu’à la demande du président Itamar Franco qui souhaitait renforcer l’offre en voitures peu chères au Brésil, le coléoptère motorisé revient en 1993, pour disparaître pour de bon en 1996. Plus de 3 millions d’exemplaires ont été produits dans ce pays, qui les a presque tous absorbés.
Le Type 2, ou Combi, a connu au Brésil (où il s’appelle Kombi) une destinée encore plus spécifique que celle de la Cox puisqu’il n’a reçu l’évolution T2 qu’en 1976 et encore, partiellement : il a conservé les 12 vitres latérales du modèle d’avant jusqu’en 1996. En Allemagne, le restyling complet est intervenu en 1967, le T2a, devenu T2b en 1972… De plus, le Kombi brésilien a carrément eu droit, à partir de 2006, à un moteur refroidi non plus par air mais par eau. Il n’a quitté la scène qu’en 2013 !
Plus intéressant encore, VW do Brasil a pu développer ses propres modèles, pour résister à une concurrence locale de plus en plus forte (les importations étaient interdites). Cela a commencé par la 1600 L en 1968, qui n’est autre que la première VW à 4 portes. Basée sur la Type 3 allemande (apparue en 1961), elle n’a pas convaincu du tout, par la faute d’une ligne que la clientèle locale a rapidement comparée à un cercueil. Elle quitte la scène en 1970, mais ses déclinaisons Variant, un break, et 1600 TL, une 1600 fastback différente de celle produite en Allemagne, dureront jusqu’en 1975, étant modernisées en 1971.
L’antenne locale du constructeur allemand ne s’est pas avouée vaincue. Ainsi, elle a récidivé en matière de création avec la Brasilia, un étonnant petit break de chasse, lui aussi établi sur le châssis de la 1600 et animé par un flat-four 1,6 l arrière. Moderne de lignes, cette trois-portes pratique est présentée en 1972, produite à partir de 1973 et rencontre un grand succès : plus d’un million d’exemplaires seront produits jusqu’en 1982.
Sur la même base, on développe un modèle bien plus aguicheur mais moins pratique : la SP2. Destiné à remplacer la Karmann-Ghia, ce coupé lancé en 1972 se pare de lignes sportives, modernes et très réussies. Malheureusement, lui aussi reprend la base de la Type 3 et se contente d’un flat-four certes poussé à 1,7 l mais ne dépassant pas les 65 ch. Trop peu vu la vocation de l’engin ! Une version SP1, reprenant le 1,6 l 54 ch de la Brasilia a aussi été proposé, ne rencontrant aucun succès. En tout, la SP2 s’est écoulée à un peu plus de 11 000 unités jusqu’en 1976.
La base de la 1600 a décidément beaucoup inspiré les Brésiliens, puisque c’est sur cette base qu’ils ont conçu la Variant II, lancée en 1977. C’est d’ailleurs la dernière voiture à moteur refroidi par air développée par Volkswagen. Ce break aux lignes tendues évoque une grande Brasilia, mais sa suspension diffère sensiblement.
En effet, elle troque les barres de torsion contre des jambes McPherson à l’avant, tandis qu’à l’arrière, on trouve des bras obliques et des demi-arbres de transmission à double cardan. Voilà qui rappelle beaucoup les liaisons au sol de la Porsche 924 ! Seulement, la Variant II, malgré ses bonnes qualités routières et son volume de chargement élevé (1 240 l), ne connaîtra guère le succès, et passera à la trappe dès 1982.
VW do Brasil a conçu une auto encore plus spécifique : la Gol. Comme son nom le laisse supposer, elle est d’un gabarit similaire à celui de la Golf. Mais techniquement, elle n’a strictement rien à voir. En effet, il s’agit de la seule VW à placer à l’avant le moteur de… la Coccinelle. Etablie sur une plate-forme raccourcie d’Audi 80/Passat, cette 3-portes se sert du fameux flat-four, d’abord un 1,3 l de 42 ch, pour animer ses roues avant. Lancée en 1980, elle rencontre un grand succès, et évolue largement. Cylindrée portée à1,6 l en 1981, moteurs en ligne refroidis par eau en 1985, restylage pour 1987. Des variantes à 3 volumes Voyage et break Parati en ont été dérivées, et même exportées aux USA.
Restylée encore en 1991, la Gol durera jusqu’en 1996, où une deuxième génération apparaît, sur la même plate-forme, ou presque, qui sera produite jusqu’en 2006. L’appellation Gol est toujours utilisée, le modèle en étant à sa 7ème génération. Une institution au Brésil où elle occupe souvent la première place sur le marché !
Volkswagen do Brasil exportera jusqu’en Europe un modèle de son cru : la Fox, vendue en France à partir de 2006, en remplacement de la Lupo. Quoique spacieuse et peu chère, elle ne rencontrera guère le succès, sa qualité de fabrication n’étant pas celle à laquelle VW avait alors habitué sa clientèle européenne. Il faut dire que les attentes du marché brésilien ne sont pas les mêmes : là-bas, on a moins de pouvoir d’achat et on s’attache plus au rapport prix/praticité qu’ici. D’ailleurs, la gamme actuelle de VW au Brésil demeure très différente de la nôtre : Virtus, Nivus, ou Saveiro, ça vous dit quelque chose ? Non ? Alors, jetez un œil ici : www.vw.com.br.
La démarche de Volkswagen au Brésil ne lui est pas spécifique : Fiat a procédé de façon similaire avec au moins autant de succès, mais nous en parlerons une autre fois.
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