Renault Vel Satis V6 3.5 vs VW Phaeton V6 3.2, le luxe autrement
Quand les généralistes s’essaient au prestige, cela donne les Renault Vel Satis V6 3.5 et Volkswagen Phaeton V6 3.2. Bizarrerie novatrice d’un côté, classicisme extrême de l’autre, chacune adopte une stratégie qui lui est propre… Sans succès. Restent deux excellentes autos de luxe à prix dérisoire.
Les forces en présence
Renault Vel Satis 3.5 V6 (2001-2009) : berline 5 portes, 5 places, 6 cylindres en V, 3,5 l essence, 245 ch, 1 720 kg, 235 km/h, à partir de 4 500 €.
Volkswagen Phaeton V6 3.2 (2002-2009) : berline 5 portes, 5 places, 6 cylindres en V, 3,2 l essence, 241 ch, 2 035 kg, 242 km/h, à partir de 5 500 €.
Les généralistes jouent leur va-tout au début du 21e siècle pour sauver leur haut de gamme, plus que jamais mis en danger par des constructeurs premiums bien installés. Audi, BMW, ou Mercedes pour ne citer qu’eux. Renault, fort d’une décennie à succès avec des autos à l’architecture originale propose dès 2001 son étrange Vel Satis, qui défraie la chronique par son allure mais rallie tous les suffrages par son confort. Au sommet de la gamme, la 3.5 V6 de 245 ch, au moteur Nissan, rassure la clientèle.
En Allemagne, VW dégaine une immense Phaeton, plus folle encore par son niveau de gamme, mais au look trompeusement sage, voire banal En entrée de gamme, elle bénéficie de l’excellent VR6 3,2 l de 241 ch, animant ses roues avant. Chics, ces deux vaisseaux au nom roturier s’offrent pourtant à des prix très bas.
Présentation : la folie des grandeurs
Le haut de gamme original, c’est un peu une des marques de fabrique de Renault. Les R16, R20/30 et R25 sont des bicorps quand la concurrence propose plutôt des tricorps. Avec l’arrivée de Patrick Le Quément à la tête du design en 1987, on passe la vitesse supérieure : chaque nouveau modèle sortant sera un évènement esthétique. Et ça fonctionne très bien, de la Twingo à la Mégane II, toutes au design fort et plébiscitées à leur sortie. Mais, à la fin des années 90, rien ne va plus. Le Quément, à qui on a aussi confié la direction de la qualité, ne peut plus chapeauter le design d'aussi près qu’avant, tant il est harassé de travail.
Pour remplacer la Safrane, au look trop sage (gelé avant l’arrivée de Le Quément), on s’attend à quelque chose de génial, après les très réussis concepts Initiale (1995) et Vel Satis (1998). Seulement, on est déçu quand le nouvel haut de gamme est dévoilé en 2001. Dénommé Vel Satis, comme le dernier proto, il recycle bien des éléments des deux concepts mais a l’air d’avoir été dessiné par trois équipes qui ne s’entendent pas. C’est presque ce qui a eu lieu ! Heureusement, l’habitacle se révèle somptueux, par son dessin, sa réalisation et son espace. Car on a joué sur la hauteur pour maximiser ce dernier.
Quant au coffre, il bénéficie d’un hayon, la voiture étant une bicorps. La clientèle adhère pourtant, attirée par le confort et le châssis, doté d’un bel essieu arrière multibras. Elle ne sait malheureusement pas que Renault cherche à comprimer les frais de développement, en digitalisant les tests d’endurance, ce qui revient bien moins cher que de faire parcourir des millions de kilomètres réels à des prototypes.
Surtout si on demande aux ingénieurs de les abréger au maximum ! Et là, ça va casser. Mais n’anticipons pas. La Vel Satis séduit par son habitacle et ses qualités routières, tout en bénéficiant d’une gamme riche, surtout en diesel, la motorisation alors en vogue. En essence, le haut de gamme n’est autre que le V6 3,5 l à quatre arbres et 24 soupapes équipant déjà la Nissan 350Z.
Il se décline en deux finitions riches : Privilège (ESP, régulateur de vitesse, clim bizone, feux automatiques, 8 airbags, radar de recul, sièges électriques chauffants, projecteurs au xénon, le chargeur CD, Alcantara) et Initiale (offrant en plus le cuir, les parements en bois, les jantes de 18, et les rétros photosensibles notamment). Les prix sont en conséquence : 42 100 € en Privilège et 46 700 € en Initiale, soit respectivement 59 800 € et 66 300 € actuels selon l’Insee. Boum !
Néanmoins, les ventes partent bien mais, patatras, les soucis de fiabilité, qu’on croyait appartenir au passé, rattrapent la Vel Satis, surtout en diesel. Les ventes chutent, malgré un rappel en 2003, et le léger restylage de 2005 ne parviendra pas à les relancer. La Vel Satis, pourtant corrigée, est discrètement retirée en 2009 et pas remplacée.
De l’autre côté du Rhin, pour la marque du peuple, Volkswagen, qu’il dirige, le terrible Ferdinand Piëch a des ambitions démesurées. Il veut la doter d’une berline de luxe, capable de rivaliser avec la référence en la matière : la Mercedes Classe S. Le but est qu’elle joue le rôle d’une locomotive tirant le reste de la gamme vers le haut, afin de la vendre plus cher ! Dès 1999, un concept D apparaît au salon de Francfort, une grande bicorps dotée de raffinements impressionnants : moteur V10 TDI, suspension pneumatique pilotée, transmission intégrale…
Piëch stipule que le modèle final devra pouvoir rouler à 300 km/h toute une journée par une température ambiante de 50 °C tout en maintenant 22 °C dans l’habitacle. Certainement pour plaire aux marchés allemand (vitesse) et américain (chaleur). Sacré pari ! Les ingénieurs se retroussent les manches et ont accès à des technologies inédites chez VW. En effet, la future Phaeton partagera sa plateforme avec la Bentley Continental GT. Quand elle sort en mars 2002, la Phaeton reçoit un accueil un peu frais.
Pas à cause de ses caractéristiques : elle bénéficie de moteurs incroyables : un W12 de 6,0 l et 420 ch, un V8 4,2 l, voire un petit V6 3,2 l de 241 ch. Les tarifs donnent le tournis : 110 525 € pour la W12, mais en entrée de gamme, la V6 se limite à 71 650 €, soit 101 700 € actuels. L’équipement est pléthorique : sièges en cuir électriques, hifi, amortissement piloté, GPS… Ce n’est qu’une traction, mais pesant déjà 2 040 kg, ce qui limite sa vitesse maxi à 241 km/h.
La V6 3.2 est la seule à donner le choix entre boîtes 6 manuelle et 5 automatique, cette dernière demeurant la seule possibilité en 2004. Comme le reste de la gamme, la V6 bénéficiera d’un léger restylage en 2007, avant de disparaître en 2010 à l’occasion d’une seconde mise à jour. La carrière de la Phaeton s’étirera jusqu’en 2016, ce qui ne l’empêchera pas de rester loin de ses objectifs de ventes initiaux, 20 000 unités par an…
Entretien fiabilité : moteurs solides, accessoires volages
Dans la Renault Vel Satis, le V6 a été rappelée en 2003 pour un changement des capteurs moteur, puis en 2006 pour une reprogrammation du boîtier d’injection. Cela ne remet pas en question la solidité de ce bloc, qui bénéficie d’une distribution par chaîne, simplifiant la maintenance. On l’a dit, avant 2005, la fiabilité des accessoires électriques est aléatoire, mais les ennuis ont logiquement été résolus depuis. Cela va bien mieux après 2005, mais assurez-vous que tout fonctionne, surtout la carte de démarrage, le frein de parking, les vitres électriques et la clim. Pas de gros ennuis côté boîte, si les vidanges ont été régulières.
La VW Phaeton a connu bien moins de soucis électriques que la Vel Satis, et son V6 3,2 l, éprouvé, se révèle très solide. Lui aussi a droit à une chaîne facilitant la maintenance. Pas de souci particulier non plus côté boîte, si les vidanges ont été régulièrement effectuées. Sinon, les ennuis vont voler en escadrille. On surveillera tout de même les fonctions électriques, car l’auto est âgée et susceptible de défaillances. Or, sa fabrication, très complexe, ne facilite pas les réparations. Autre source d’ennuis : la suspension pneumatique, qui finit par fuir. Attention, chaque jambe de force coûte environ 1 000 € ! A méditer…
Avantage : Egalité. La VW Phaeton pose globalement moins de soucis que la Vel Satis, mais chaque opération coûte plus cher, surtout en matière de suspension.
Vie à bord : palaces sur roues
La Renault propose une atmosphère chic et apaisante. Très belle finition, matériaux bien choisis, tableau de bord élégant, sièges amples, profonds et réglables dans tous les sens : cet habitacle au design original et soigné est un havre de paix. Les passagers profitent d’un confort très recherché, surtout à l’avant où même les ceintures sont conçues pour qu’on ne les sente pas. Et les rangements cachés derrière les baguettes de bois ravissent par leur soin.
Que ce soit en Privilège ou en Initiale, l’équipement satisfera les plus exigeants. Cela dit, la modularité demeure basique. La Renault propose une belle habitabilité, surtout en largeur et en hauteur, alors que l’équipement apparaît, là aussi, complet. Le coffre, assez spacieux, se révèle pratique grâce à son hayon, mais son seuil trop haut et ses formes peu régulières déçoivent.
Dans la Phaeton, c’est un peu l’inverse. Initialement, l’ambiance impressionne peu à cause d’un design banal et de plastiques gris, certains n’étant d’ailleurs pas de première qualité. Cela dit, on apprécie l’assemblage quasi-parfait et les belles boiseries. Un ensemble qui, de surcroît, résiste vaillamment à l’usure. L’espace utile se révèle des plus conséquents, et les passagers arrière se réjouiront de leur clim bizone.
Toutefois, les sièges se révèlent moins souples que ceux de la Vel Satis et les ceintures se ressentent. D’un autre côté, l’espace aux jambes semble encore supérieur à l’arrière, ce que les passagers apprécieront. Et ils resteront bien au chaud quand on ouvrira le coffre, puisqu’il est séparé de l’habitacle. Revers de la médaille, l’habitacle n’est pas transformable.
Avantage : Egalité. Plus douillette et chaleureuse que la Phaeton, la Renault se révèle aussi plus pratique, mais elle reste un poil moins spacieuse et sa finition vieillit moins bien.
Sur la route : vive française, lourde allemande
Dans la Renault, on est émerveillé par le confort des sièges, et on apprécie la position un peu surélevée qu’elle prodigue face aux autres berlines. Choyé, on n’en goûte que mieux la souplesse et l’onctuosité du V6 qui, s’il n’a pas la vivacité qu’on lui connaît dans la 350Z, apparaît tout de même mélodieux, vif dans les tours et efficace en reprise. Elle marche bien, cette française au cœur japonais !
La boîte auto lui est idéalement adaptée, car très douce, sinon réellement rapide. Côté confort de suspension, la Vel Satis filtre tout sans prendre de roulis outre-mesure, un vrai plaisir. La Renault étant par ailleurs extrêmement bien insonorisée, laissant seulement filtrer le lointain feulement du V6, elle autorise les plus longs voyages sans fatigue. Cela n’a pas lieu aux dépens de la tenue de route, très sécurisante.
La Renault profite de qualités routières de haut niveau, sans pâtir de mouvements de caisse tellement marqués. Son train arrière sait se placer à l’occasion, mais elle reste tout de même relativement pataude. Mais elle freine bien.
Dans la Phaeton, on se trouve initialement assis un peu haut sur un siège un peu ferme, mais rapidement, on oublie totalement ces deux traits. Le V6 est étouffé par le poids de la VW, aussi ne lui reconnait-on pas la verve dont il fait preuve dans la Golf VR6. Normal, avec 2 tonnes à emmener ! Cela dit, il demeure très doux et musical, tout en montrant une certaine appétence pour les hauts régimes. Mais pour les chronos, on repassera.
On se console avec l’excellent confort de la suspension pneumatique, allié à un contrôle efficace des mouvements de caisse. Seulement, de temps à autre, on subit une trépidation, le système ayant du mal à contenir le poids de la voiture. On peut la régler au plus souple, mais là, ça ballote, jusqu’au plus dire, où la filtration est très amoindrie. Mieux vaut la laisser en mode auto. Il n’empêche que l’ambiance à bord demeure très sereine, l’insonorisation étant au moins aussi poussée que dans la Vel Satis.
La tenue de route semble imperturbable, mais rien ne communique vraiment. La direction précise rend l’auto assez maniable dans le sinueux, mais le poids est très sensible. Son vrai domaine, c’est l’autoroute, où elle semble sur un rail. Cela dit, le freinage est un poil faiblard à grande vitesse.
Avantage : Renault. Plus vive et prévenante que la Phaeton, la Renault rafle la victoire, même si sa rivale ne démérite absolument pas.
Budget : pas assez chère, mon fils !
Etrangement, le prix des Vel Satis a tendance à monter. Désormais, une belle V6 3.5 réclame un minimum de 4 500 €, avec un kilométrage avoisinant les 200 000 km. Ajoutez 1 500 € pour une auto de 150 000 km environ, et on en voit déjà flirter avec les 15 000 € en affichant moins de 50 000 km. Est-ce qu’elles se vendent à ce montant… Face à la pompe, comptez une moyenne de 12 l/100 km.
A condition égale, une VW Phaeton V6 réclamera 1 000 € supplémentaires par rapport à une Renault Vel Satis, et surtout, avalera en moyenne 13,5 l/100 km. Prévoir un bon budget carburant pour les vacances, ou passer à l’éthanol…
Avantage : Renault. Moins chère et moins vorace que la Phaeton, la Renault remporte ici la victoire.
Verdict : une Renault à redécouvrir
A moins d’être fétichiste de la technologie, on choisira au terme de ce duel la Renault. En effet, Elle surpasse la VW par son confort, ses performances, sa praticité tout en préservant mieux le portefeuille. Elle profite d’une mécanique au moins aussi solide, et si son électricité est plus facétieuse, les réparations apportées à sa suspension ne vous ruineront pas.
La VW contre par un cockpit mieux fini dans les détails et vieillissant mieux, un comportement encore plus serein sur autoroute et une ligne plus classe. Sans oublier une technologie plus élevée, même si, en fin de compte, ça ne sert pas à grand-chose.
Thème | Avantage |
Fiabilité/entretien | Egalité |
Vie à bord | Egalité |
Sur la route | Renault |
Budget | Renault |
Avantage | Renault |
Pour trouver des annonces, rendez-vous sur le site de La Centrale : Renault Vel Satis, Volkswagen Phaeton.
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