Pourquoi le Renault Koleos ne change pas de nom

On pensera ce qu’on voudra du nouveau Renault Koleos, et l’avis acéré de Pierre Desjardins sur le sujet est mitigé. En revanche, et quelles que soient les qualités de ce SUV, l’on peut s’interroger sur son nom. Et sur le fait de le conserver pour cette seconde version. Car l’héritage est quelque peu lourd à trimbaler, ce qui, pour un gros SUV, est un doux euphémisme. Le Koleos premier du nom est, en France du moins, tombé sous le coup d’une triple peine. Sorti en 2006, il a d’emblée raté son entrée. La mode du SUV compact n’avait pas encore explosé, ce qu’elle fit un an plus tard avec l’avènement du Nissan Qashqai. En plus, son design plutôt curieux, dont on ne retiendra que le positif hayon à double ouverture, a fait fuir les familles qui de toute façon, à cette époque, ne juraient que par le Scénic.

Une vie mal entamée, une carrière malmenée

Le Koleos poursuivit donc son bonhomme de chemin sur les routes de l’indifférence et dans le tréfonds des ventes jusqu’en 2009 et jusqu’à ce que paraisse un article dans Fluide Glacial. Le magazine de BD, fondé par le regretté Marcel Gotlib, expliquait à l’époque que le Koleos, en grec ancien, désignait un testicule. Pas vraiment connu pour son sens de l’investigation, le journal a pourtant vu son info relayée par Presse-Citron, avant d’être repris par l’ensemble des médias et les conversations de bistrot. On vous épargnera les querelles d’universitaires spécialistes des langues mortes s’écharpant sur le sens exact du mot, mais en tout cas, l’affaire n’épargna pas le pauvre SUV déjà mal en point.

Le Losange a bien tenté de sauver la mise de son auto en redessinant sa calandre en 2011, rien n’y fit, alors que la mode des SUV compacts était bel et bien lancée. La vie du Koleos a continué de s’écouler ainsi, entre moquerie et indifférence générale, jusqu’en 2016, ou il s’en est allé, sur la pointe des pneus, sans que quiconque s’aperçoive de sa disparition.

Le Kadjar break restera Koleos

Le voilà donc qui ressurgit aujourd’hui, dans un dessin et une mécanique qui n’ont strictement rien à voir, puisque ce Koleos 2 est au Kadjar ce que le X-Trail est au Qashqai : une version break. Du coup, pourquoi donc persister à lui accoler ce nom pas vraiment symbole de réussite, alors que le successeur de la Laguna à la sinistre réputation a été rebaptisé Talisman pour conjurer le sort ? Xavier Cousin, directeur du marketing produit pour la France, défend ce choix pour son SUV. « Le premier Koleos ne s’est peut-être pas bien vendu, mais ceux qui l’ont acheté en sont super-satisfaits ». Alors autant ne pas changer une équipe qui n’a pas gagné, mais qui gagnerait à être connue.

Une star en Asie

Reste une autre explication, peut-être plus réaliste. Et si Renault tenait la France pour quantité négligeable dans la carrière de son auto ? Les dirigeants du groupe l’avouent : le Koleos 1 a cartonné en Corée (où il était fabriqué par la filiale Samsung) comme dans toute l’Asie du Sud-Est.

La seconde mouture, toujours assemblée au Pays du matin calme, sera évidemment commercialisée sur place mais aussi dans 80 pays dans le monde. Autant dire que les pauvres polémiques hexagonales sur l’origine testiculaire du nom de l’auto et le design approximatif de celle qui l’a précédée ne valent pas tripette.

La France pas prioritaire...

D’ailleurs, si Renault voulait vraiment s’imposer dans ce segment du SUV "D", il aurait très certainement doté son Koleos de strapontins en troisième rangée, comme son principal concurrent le Peugeot 5008. Mais il n’y a pas droit, histoire de ne pas faire d’ombre aux Renault Espace et Grand Scénic, deux modèles qui, quant à eux, sont disponibles en version 7 places et doivent coûte que coûte connaître une belle carrière par chez nous. Koleos le mouton noir de la gamme Renault en France ? Peut-être pas. Koleos priorité de la gamme Renault en France ? Sûrement pas.