Mercedes Classe S W126 V8 (1979-1991) : luxe, calme et… sobriété, dès 8 000 €
Summum automobile des années 80, la 126 détient le record de production des Classe S encore aujourd’hui, et cette abondance a empêché sa cote d’exploser. Mais attention, ses grandes qualités commencent à être reconnues, et ça change…
Les collectionnables, c’est quoi ?
Ce sont des autos revêtant un intérêt particulier, donc méritant d’être préservées. Pas forcément anciennes, elles existent pourtant en quantité définie, soit parce que le constructeur en a décidé ainsi, soit parce que leur production est arrêtée. Ensuite, elles profitent de particularités qui les rendent spécialement désirables : une motorisation, un châssis, un design, ou un concept. Enfin, elles sont susceptibles de voir leur cote augmenter. Un argument supplémentaire pour les collectionner avant tout le monde !
Pourquoi la Mercedes Classe S W126 est-elle collectionnable ?
Jalon dans l’histoire de Mercedes, la W126 marque brillamment son entrée dans les années 80 grâce à sa carrosserie aérodynamique. Celle-ci est aussi une merveille de finesse, qu’on n’a par la suite plus guère retrouvée chez ses descendantes. Surtout, cette Classe S s’avère remarquablement bien conçue, de sorte qu’elle conserve un confort, une sécurité et un agrément de conduite séduisants, le tout dans un style sobre et vintage. Enfin, même si elle détient un record de production, ce pur youngtimer se montre bien rare en parfait état.
On l’a vue partout, cette Classe S. Sur nos routes, dans les séries et films US, notamment Dallas… Il faut dire qu’elle était considérée comme la meilleure du monde dans sa catégorie. Une vraie Mercedes en somme. Sa conception débute en 1973, année où éclate la crise du pétrole. Aussi, d’emblée, et malgré son niveau de gamme, il est décidé de favoriser l’économie de carburant. C’est dire si la future W126 prend le contrepied de sa devancière, la W116, dessinée comme un coffre-fort chromé et armée d’un énorme V8 6,9 l dans sa version la plus huppée, la 450 SEL 6.9. L’équipe de designers dirigée par Bruno Sacco produit une ligne extraordinaire de sobriété, d’élégance et d’aérodynamique qui frappe les esprits quand l’auto sort au salon de Francfort, en 1979. Pour la 1re fois, une Mercedes adopte des boucliers en polyuréthane, tandis que la carrosserie parfaitement équilibrée profite d’un excellent Cx de 0,36, contre 0,41 à sa devancière. Une révolution esthétique ! Techniquement, la 126 reprend dans leurs grandes lignes les trains roulants de la 116, double triangulation à l’avant et essieu arrière à bras obliques. Mais elle se distingue par son étude contre les chocs encore plus poussée : en cas d’impact à 55 km/h sur un bloc indéformable percuté par la moitié de la face avant, l’habitacle ne se déforme pas. Un record à l’époque. Plus fort encore, malgré cette résistance accrue, la 126 se révèle plus légère que la 116 d’une cinquantaine de kilos, grâce à l’emploi de nouveaux alliages.
Sous le capot, les 6-cylindres 2,8 l (156 ch en carbu et 185 ch en injection) sont ceux de l’ancien modèle. En revanche, les deux V8 sont inédits dans la Classe S. Le 3,8 l de 218 ch équipant la 380 est inédit et dérive du 3,5 l de la précédente 350 SE, mais son bloc passe de la fonte à l’alliage. Pour sa part, le 5,0 l tout alliage de la 500 (240 ch) est déjà connu, puisqu’il équipe déjà la 450 SLC 5.0. Évidemment, les plus passionnés regrettent que la mythique 450 SEL 6.9 (286 ch) ne soit pas remplacée, mais plus légère et aérodynamique, la nouvelle 500 ne se révèle pas tellement moins performante (225 km/h au maxi). Surtout que sa boîte automatique compte 4 rapports, contre 3 à celle de la 6.9, permettant une meilleure exploitation de la mécanique.
En option, les 380 et 500 peuvent recevoir une suspension arrière hydropneumatique, magnifiant leur confort tout en ménageant une assiette constante. Exceptionnelles, ces Classe S ont un prix à leur démesure : une 380 SE revient à 166 000 F en 1980, contre 192 000 F à la 500 SE, soit respectivement 72 500 € et 83 700 €. Les versions longues SEL (+ 14 cm) sont commercialisées un an plus tard à près de 60 000 F supplémentaires ! Juste après, au salon de Genève 1981, la 126 voit apparaître au rayon options l’airbag conducteur, allié à des prétensionneurs de ceinture de sécurité, alors que fin 1981, au salon de Francfort, la splendide SEC, le coupé Classe S, est lancé (10 000 F de plus qu’une SEL). Uniquement disponible en 380 et 500, il inaugure les évolutions apportées aux V8, plus économiques et attelés à des boîtes plus longues. Au passage, le 3,8 l revient à 204 ch et 5,0 l à 231 ch, sans grandes conséquences sur les performances à cause du couple en hausse. À l’époque, on réduit la consommation des véhicules à cause du prix des carburants, en hausse après la crise de 1979, pas des émissions de CO2, mais le résultat est similaire.
Ça change lors du restylage de fin de 1985. Le 2,8 l est remplacé par le nouveau 6-cylindres de la W124, en 2,6 l (166 ch) et 3,0 l (188 ch), alors qu’en V8, le 3,8 l passe à 4,2 l (218 ch). Le 5,0 l demeure mais gagne 14 ch (245 ch au total), cependant qu’il se voit chapeauté par un bloc plus gros, puissant et… gourmand : un 5,6 l de 300 ch. Les 560 SEL et SEC frôlent désormais les 250 km/h ! Une version semi-dépolluée dite ECE de ce gros V8 existe aussi (272 ch), le catalyseur d’échappement étant disponible en sus sur certains marchés. La crise est passée et la 450 SEL 6.9 trouve enfin sa digne descendante ! Bien mieux équipées, les 560 ont en série le cuir, le toit ouvrant, les sièges et volant à réglages électriques… Et en option, tout ou presque existe, des sièges arrière indépendants chauffants, eux aussi réglables électriquement, à l’ordinateur de bord (remplaçant le compte-tours), en passant par le chauffage additionnel programmable. De surcroît, l’électronique apparaît sur le différentiel sous la forme d’un antipatinage dit ASR en 1987.
Esthétiquement, les 126 modifiées se signalent par l’aspect lisse et non plus strié des bas de caisse et boucliers, ceux-ci descendant plus bas, les jantes passant de 14 à 15 pouces tout en arborant un dessin inédit. Elles accueillent des disques de frein plus grands, donc procurent de meilleures qualités routières. Intérieurement, les Classe S arborent un équipement enrichi, les V8 disposant de l’airbag conducteur en série. Dès 1986, on peut aussi faire ajouter un airbag passager, ce qui supprime la boîte à gants ainsi que son parement en bois. En 1988, les 420 sont supprimées, cependant que les 500 se targuent de 265 ch, mais à partir 1989, le catalyseur équipe toutes les versions. En conséquence, les 560 régressent à 279 ch et les 500 à 252 ch. En 1991, tout ce joli monde quitte la production, l’énorme Classe S W140 ayant été présentée. La 126 a été fabriquée à quelque 818 105 unités en berline, et 74 060 en coupé : le record absolu dans cette catégorie ainsi que pour la Classe S, toutes générations confondues.
Combien ça coûte ?
Progressivement, la cote grimpe. En berline, comptez 6 500 € minimum pour une 380 SE parfaitement fonctionnelle, 7 500 pour une 420 et 8 500 € pour une 500. La 560 est bien plus chère, avec un minimum à 14 000 €. En coupé, il faudra débourser 10 000 € au bas mot pour une 380, 12 000 € pour une 420, 14 000 € pour une 500 et 18 000 € pour une 560. Des prix largement sujets à variations, en fonction de l’état, des options et surtout du kilométrage, les montants mentionnés concernant surtout des exemplaires dépassant les 200 000 km.
Quelle version choisir ?
Les plus agréables seront incontestablement les 560, principalement en 300 ch (carte grise de 40 CV, contre 37 aux autres). Mais les 500, nettement moins chères, constituent de bons choix car leurs performances sont déjà élevées, surtout en 265 ch.
Les versions collector
Toute 126 en parfait état d’origine et totalisant moins de 100 000 km sera un collector. Très difficiles à trouver ! Ensuite, ce seront les exemplaires les plus gorgés d’options, surtout en 560.
Que surveiller ?
Les 126 sont des autos remarquablement conçues et construites. Seulement, cela se sait, et la baisse de la cote aidant, elles sont tombées dans des mains parfois insuffisamment argentées pour leur assurer l’entretien qu’elles méritent. Or, ces grandes voitures sont très complexes et nécessitent une certaine maintenance. Et elles rouillent. Ainsi, on surveillera les ailes (les passages de roues sont exposés aux jets de gravillons), l’entourage des phares, le fond de coffre et la base de la lunette arrière.
Ensuite, les ensembles moteur/boîte enchaînent les centaines de milliers de kilomètres sans souci, à condition d’avoir été vidangés régulièrement, ce qui n’a pas toujours été fait. On examinera donc leur état avec suspicion : pas de fumée bleue à l’échappement ni de « mayonnaise » dans l’orifice de remplissage d’huile. Enfin, testez toutes les fonctions électriques, la clim (elle ne doit pas être à recharger) ainsi que la suspension, surtout hydraulique.
L’habitacle se montre très résistant, de sorte que même après 35 ans et 250 000 km, il peut encore très bien présenter. Par conséquent, la tentation est grande pour certains de trafiquer le compteur afin de réduire le kilométrage qu’il affiche : un carnet d’entretien rempli sera un gros plus !
Veillez à acheter l’exemplaire le plus sain possible, avant même de considérer le kilométrage, car les réparations et réfections coûtent très cher.
Au volant
J’ai pu conduire la superbe 560 SEL de Francis Michel, qui m’avait déjà prêté sa BMW 728i. L’historique de cette auto est intéressant car il illustre bien les ennuis qui vous attendent si vous en négligez l’inspection. Le propriétaire précédent l’avait payée peu cher, et en 9 ans, a eu pour plus de 30 000 € de frais, près de 7 000 € à cause de la rouille, environ 6 000 € des trains roulants, sans oublier les plus de 2 000 € pour refaire la clim… À l’intérieur, c’est un mélange de sobriété et de très grand luxe. Sièges avant et banquette arrière électriques, clim auto, boiseries… L’assise est curieuse : ferme sous les fesses mais souplement suspendue. Pour autant, je m’y trouve très bien.
Dans cette ambiance apaisante, bien loin des écrans omniprésents des Classe S actuelles, on se sent parfaitement disposé à se concentrer sur la route, avec au bout du capot la fameuse étoile. Silence de fonctionnement impressionnant, suspension filtrant superbement les inégalités, commandes douces… Un vrai pullman ! Pour autant, on n’est pas coupé du bitume, la direction remontant correctement les inégalités. Surtout, dès qu’on écrase l’accélérateur, cette merveille de douceur qu’est la 560 vous colle littéralement au siège. Quel punch, ce V8 ! Gorgé de couple, il se moque bien que la boîte, au demeurant rapide, ne compte que 4 rapports, et il catapulte l’auto quoi qu’il arrive. À la grande surprise des pilotes d’Audi modernes, qui ne soupçonnent pas qu’une auto aussi vintage puisse accélérer aussi fort. Ensuite, dynamiquement, elle se montre très saine et ne révèle aucune mauvaise surprise. L’agilité n’est certes pas son point fort, mais vu son confort, on lui pardonne bien volontiers. Ce sublime vaisseau autoroutier avale 14 l/100 km en moyenne, ce qui n’est pas délirant vu ses prestations.
L’alternative newtimer*
Mercedes-Benz Classe S W140 (1991-1998)
Si la Classe S W126 a duré 12 ans, c’est aussi parce que la conception de sa descendante a pris bien plus de temps que prévu. Codée W140, elle fait en effet le plein de technologie : essieu arrière multibras, suspension pilotée, équipement incroyable. Elle doit larguer toute la concurrence, Lexus en tête ! Démesurée (5,30 m de long en SEL) et très lourde (1,9 tonne minimum), elle s’équipe de portières à fermeture assistée, d’un double vitrage, voire d’une clim auto dotée d’un filtre à pollens. En haut de la gamme, la 600 SEL bénéficie d’un incroyable V12 de 408 ch, qui lui offre des performances de Porsche 911. Malheureusement, la bête est chère, tandis que son look mastoc lui vaut des quolibets. En 1992, un énorme coupé en est dérivé, tandis qu’en 1994, la Classe S bénéficie d’un léger restylage visant à la rendre moins massive esthétiquement. Surtout, elle inaugure une appellation encore en vigueur, où le S précède le chiffre de la cylindrée (ou de ce qui s’en approche). Ainsi, la 600 SE devient-elle S 600. En 1995, le coupé inaugure l’ESP (1re mondiale) et le GPS, puis d’autres douceurs technologiques débarquent : projecteurs au xénon, airbags latéraux, capteur de pluie… Dès 1998 toutefois, cette lignée de Classe S disparaît, remplacée par la W220, bien plus fine. 432 739 exemplaires ont été produits : à partir de 5 000 € en bon état.
Mercedes-Benz 560 SEL (1989), la fiche technique
- Moteur : 8 cylindres en V, 5 547 cm3
- Alimentation : injection électronique
- Suspension : double triangulation, ressorts hélicoïdaux, barre antiroulis (AV) ; bras obliques, ressorts hélicoïdaux, barre antiroulis (hydropneumatique en option) (AR)
- Transmission : boîte 4 automatique, propulsion
- Puissance : 279 ch à 5 200 tr/mn
- Couple : 432 Nm à 3 750 tr/mn
- Poids : 1 830 kg
- Vitesse maxi : 250 km/h (donnée constructeur)
- 0 à 100 km/h : 7,4 s (donnée constructeur)
> Pour trouver des annonces de Mercedes Classe S W126, rendez-vous sur le site de La Centrale.
* Les newtimers sont des véhicules iconiques ou sportifs plus récents que les youngtimers, mais dont la valeur monte. Plus fiables et faciles à utiliser au quotidien, ils doivent leur essor à des caractéristiques techniques souvent disparues, comme de gros moteurs atmosphériques. Les BMW Z3 à 6 cylindres, Porsche Boxster 986 et autre Renault Clio V6 représentent bien cette nouvelle tendance.
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