Maserati Quattroporte III (1979-1990) : un moteur de course dans un écrin de cuir, dès 19 000 €
Sous sa ligne anguleuse signée Giugiaro, cette grande italienne cache un V8 fabuleux, dont les origines remontent à la compétition des années 50. Une berline exclusive à la motorisation raffinée, mais qui demeure abordable !
Les collectionnables, c’est quoi ?
Ce sont des autos revêtant un intérêt particulier, donc méritant d’être préservées. Pas forcément anciennes, elles existent pourtant en quantité définie, soit parce que le constructeur en a décidé ainsi, soit parce que leur production est arrêtée. Ensuite, elles profitent de particularités qui les rendent spécialement désirables : une motorisation, un châssis, un design, ou un concept. Enfin, elles sont susceptibles de voir leur cote augmenter. Un argument supplémentaire pour les collectionner avant tout le monde !
Pourquoi la Maserati Quattroporte III est-elle collectionnable ?
Dernière dépositaire du traditionnel V8 Maserati, issu de la compétition, et équipant la 450S de course, voire la Ghibli ou encore l’Indy, la Quattroporte III est un authentique pur-sang. C’est aussi le modèle le moins cher permettant d’accéder à ce moteur au pedigree exceptionnel. Par son design, la Quattroporte se révèle également emblématique des productions de Giugiaro dans les années 70, alors que son châssis profite d’une rigueur jamais vue sur une berline frappée du trident. Comme de surcroît, elle a été très peu produite, elle ne peut que séduire les esthètes.
Alejandro de Tomaso a beau traîner une réputation sulfureuse, l’homme d’affaires argentin a tout de même sauvé Maserati. Quand ? En 1975, quand il a racheté le constructeur de Modène, lâchée par un Citroën exsangue. Auparavant, de Tomaso a créé une marque à son nom, qui a présenté en 1970 une grande berline, la Deauville. Celle-ci s’inspire ouvertement de la Jaguar XJ, tant par sa ligne (même si Tom Tjaarda qui l’a tracée s’en défend) que par sa technique. En effet, sa suspension arrière indépendante où les cardans jouent un rôle guidant semble calquée sur celle de l’anglaise.
La Deauville ne se vend que très confidentiellement, mais sa base, conçue par le spécialiste des barquettes de course Dallara, se révèle excellente, de sorte que de Tomaso a l’idée de la récupérer pour créer une nouvelle génération de Maserati Quattroporte.
La première, lancée en 1963, et dotée du V8 de la 450S de course, avait mis la marque au trident sur orbite. La seconde, une Citroën SM rallongée et carrossée façon Fiat 128 géante, s’est au contraire révélée un bouillon total ! Pour la troisième, les choses s’annoncent bien mieux avec une suspension moderne et surtout, le retour du V8 issu de la 450S. Un moteur de course donc, sérieusement conçu par Giulio Alfieri, ingénieur en chef de Maserati, et toujours dans le coup dans les années 70 grâce à ses 4 arbres à cames en tête.
L’auto part s’habiller chez Ital Design, par un Giugiaro qui s’inspire du design de ses concepts Medici de 1974 puis 1976. Maserati présente ainsi en octobre 1976 son vaisseau amiral, dénommé, bien sûr, Quattroporte. Seulement, sa mise au point n’est pas terminée, faute de moyens financiers. La grande italienne ne débarque ainsi sur le marché qu’en 1979, en deux cylindrées, 4,2 l et 4,9 l, seule la seconde étant importée en France. Elle est proposée à un tarif prohibitif : 289 500 F équipée de la boîte 5 ZF manuelle, soit 126 200 € actuels selon l’Insee.
Bizarrement, la boîte automatique Chrysler Torqueflite à 3 vitesses réduit le prix à 278 000 F. En face, une Mercedes 500 SEL revient à 200 000 F, et une Bentley T2 à 488 53 F. La belle de Modène a donc son mot à dire ! Elle séduit d’ailleurs des célébrités, de Luciano Pavarotti à Frédéric Dard.
Ils apprécient certainement son exclusivité, ainsi que son luxe, l’habitacle climatisé se tendant d’un cuir magnifique, alors que les vitres et les sièges s’opèrent de façon électrique. Compte tenu de sa production très artisanale, la Quattroporte se vend correctement, mais n’évoluera ensuite que très peu, gagnant un différentiel Sensitork en 1984 et une version très luxueuse, légèrement restylée, la Royale, fin 1986. La grande Maserati s’en va en 1990, produite à 2 025 unités en 4,9 l, 69 en 4,2 l et 51 en Royale. C’est bien plus que toutes ses devancières réunies !
Combien ça coûte ?
Une Quattroporte en très bon état se déniche dès 18 000 € en boîte automatique, la peu courante boîte mécanique (150 exemplaires environ) réclamant 3 000 € de plus. Pour un exemplaire vraiment impeccable, ajoutez 4 000 €. Quant à la Royale, difficile d’établir une valeur vu sa rareté, mais il semble qu’elle ne dépasse pas les 30 000 €.
Quelle version choisir ?
Ce sera une question de boîte de vitesses, la manuelle autorisant de meilleures performances que l’automatique. Mais vu la destination de la voiture - le confort - cela ne semble pas tellement crucial.
Les versions collector
D’abord et avant tout la rarissime Royale. Ensuite, une version manuelle faiblement kilométrée et en parfait état.
Que surveiller ?
Contrairement à l’image affectant les italiennes des années 70-80, et surtout les Maserati, la Quattroporte est une auto solidement construite et robuste. Elle résiste d’ailleurs fort bien à la corrosion, qui fera toutefois inéluctablement son apparition. Et là, si elle n’est pas traitée à temps, des frais importants sont à envisager. Mais la même chose vaut pour une Mercedes Classe S !
Par ailleurs, l’italienne nécessite un entretien rigoureux (vidange tous les 5 000 km maxi), de par sa suspension complexe, et son moteur de précision, dont les réglages (allumage, carburation, jeu aux soupapes), doivent être effectués par un spécialiste. Ce qui a un prix élevé. On fera aussi attention à l’état des accessoires électriques, même si la situation n’a rien de catastrophique. Néanmoins, vu le prix des pièces, optez pour une auto dans le meilleur état possible.
Au volant
J’ai pu conduire deux Quattroporte 4,9 l, une manuelle et une automatique. À bord, on est surpris d’abord par l’espace disponible, conséquent, ensuite par le luxe. Cuir opulent, boiseries, matériaux de qualité… Même l’assemblage est bon, même s’il n’atteint pas la précision de celui d’une Classe S. La position de conduite, grâce au volant réglable, se révèle agréable, tout comme la souplesse des sièges. On n’est pas dans une allemande ! Les commandes éparpillées nous le rappellent aussi… Surprise, le moteur apparaît remarquablement insonorisé, alors que la suspension filtre les aspérités avec une dextérité peu commune. En somme, la Quattroporte prodigue un immense confort.
Si elle tangue et roule fort peu pour une grande berline de son époque, et profite d’une direction à la fois précise, douce et informative, ce n’est toutefois pas une sportive. Son comportement routier, rappelant (et pour cause !), celui de la Jaguar XJ, se révèle rigoureux et équilibré, mais le poids et l’inertie de l’auto sont sensibles. Ensuite, si le moteur monte en régime de façon allègre, produisant ainsi un son magnifique, évocateur des courses classiques, il se satisfait très bien d’un usage tranquille, grâce à sa souplesse.
Accouplé à la boîte mécanique, il s’exprime librement et pousse gentiment, même si les 7 s annoncées sur le 0 à 100 km/h semblent optimistes. Si le levier séduit par son maniement doux et plaisant, il faut s’habituer à la grille inversée, plaçant la première en bas à gauche. Avec l’automatique, rien de ceci, mais la Maserati semble alors moins vive, surtout que la transmission, à trois rapports seulement, manque de réactivité, même si on onctuosité n’est pas à remettre en question. Enfin, le freinage se révèle efficace pour une auto de cette époque. En somme, la Quattroporte III est une formidable machine à voyager, dans un style eighties et exclusif, mais elle réclame son dû en avalant près de 18 l/100 km…
L’alternative newtimer*
Maserati Quattroporte V (2003-2012)
Avec sa robe signée Pininfarina et son V8 d’origine Ferrari, la Quattroporte V provoque stupeur et ravissement quand elle apparaît en 2003. Forte d’une plate-forme inédite, d’une répartition des masses idéale, grâce à sa boîte placée à l’arrière, et de trains roulants raffinés, elle avance de sérieux arguments dynamiques : jamais une berline de cette catégorie ne s’était montrée si vive et maniable !
Le tout, dans une sécurité magnifique et un confort étonnant. Sans oublier les performances de premier plan offertes par le 4,2 l de 405 ch ! Mais on peste contre la boîte robotisée DuoSelect, peu agréable en mode automatique, et l’assemblage perfectible. Des finitions plus luxueuses (Sport GT et Executive GT) sont lancées en 2005, alors qu’en 2006, une boîte auto ZF à 6 rapports rend l’usage plus agréable encore.
En 2008, la Quattroporte profite d’un habile restylage apportant un V8 4,7 l de 430 ch en S et 440 ch en GTS. Très aboutie, elle prodigue un plaisir intense, que sa remplaçante de 2012 ne pourra égaler. Produite à plus de 20 000 unités, la Quattroporte V se déniche dès 18 000 € en bon état.
Maserati Quattroporte III (1983) : la fiche technique
- Moteur : 8 cylindres en V, 4 930 cm3
- Alimentation : 4 carburateurs double corps Weber
- Suspension : trapèzes superposés, ressorts hélicoïdaux, amortisseurs, barre antiroulis (AV), bras longitudinaux et transversaux, cardans à effet guidant, ressorts hélicoïdaux, amortisseurs, barre antiroulis (AR)
- Transmission : boîte 5 manuelle ou 3 automatique, propulsion
- Puissance : 280 ch à 5 600 tr/mn
- Couple : 392 Nm à 3 000 tr/mn
- Poids : 1 950 kg
- Vitesse maxi : 230 km/h (donnée constructeur)
- 0 à 100 km/h : 7 secondes (donnée constructeur)
> Pour trouver des annonces de Maserati Quattroporte, rendez-vous sur le site de La Centrale.
* Les newtimers sont des véhicules iconiques ou sportifs plus récents que les youngtimers, mais dont la valeur monte. Plus fiables et faciles à utiliser au quotidien, ils doivent leur essor à des caractéristiques techniques souvent disparues, comme de gros moteurs atmosphériques.
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