La première Audi moderne a été conçue en secret !
Quand Volkswagen a racheté Audi à Mercedes, son intention n’était pas d’en faire un spécialiste du haut de gamme mais juste d’en récupérer l’usine. Seulement, un homme, Ludwig Kraus, a inversé les plans initiaux…
Sans Mercedes, point d’Audi. Comme je vous l’ai déjà narré ici, la première Audi moderne, la 60, commercialisée en 1965, n’est une autre qu’une DKW F103, soit une F102 restylée, rebadgée et dotée d’un moteur conçu par Mercedes. Initialement, Volkswagen a racheté le groupe Auto-Union, comportant les quatre blasons Audi, DKW, Horch et Wanderer (d’où le logo aux quatre anneaux) surtout pour son usine d’Ingolstadt, afin d’y produire des Coccinelle.
La F103 étant prête lors du rachat, VW a compris l’intérêt de la commercialiser, ce qui ne signifiait pour autant pas la pérennisation de la marque qui l’a conçue. D’ailleurs, Heinrich Nordhoff, le grand patron de VW n’a au départ aucunement l’intention de laisser les ingénieurs d’Auto-Union devenu Audi développer un nouveau modèle. Il le leur a même interdit.
Mais voilà, au sein du groupe racheté se trouve l’ingénieur Ludwig Kraus, qui est bien conscient des desseins de Norhoff : se débarrasser de quelque 150 ingénieurs Audi pour ne développer que des Volkswagen. La solution pour assurer l’avenir des anneaux ? Mettre au point fissa et en loucedé une voiture puis mettre Nordhoff devant le fait accompli. Un vrai coup de poker ! Seulement, Kraus profite d’une solide expérience en matière de conception, étant l’auteur de bien des autos de course estampillées Mercedes. De plus, il sait se servir de l’outil informatique alors balbutiant, ce qui lui permet de raccourcir les délais de développement.
Ainsi, au moment même où Volkswagen finalise le rachat d’Auto-Union auprès de Mercedes, il lance en catimini la genèse de celle qui deviendra l’Audi 100. Toutefois, le projet secret est découvert accidentellement par Rudolf Leiding, placé en 1965 à la tête d’Auto-Union AG… par Norhoff ! Seulement, Leiding a oublié d’être idiot et, impressionné par la voiture en cours de conception, décide avec Kraus de la présenter au grand patron de VW. Les deux hommes n’ont pas dû en mener large quand celui-ci a examiné la future grande berline. A leur grand soulagement, Nordhoff apprécie grandement ce qu’il voit et montre qu’il n’aurait jamais été un bon général : il se rend. A l’évidence. La voiture s’annonce brillante, donc il donne son feu vert à la mise en production.
L’Audi 100 sort en octobre 1968 et séduit immédiatement. Spacieuse et très légère (merci à l’expérience en course de Kraus), cette traction dotée de moteurs inédits profite d’un rendement remarquable, conciliant belles performances et consommation réduite. Elle défie sans vergogne la Mercedes W115/114 présentée la même année et se vend par paquets de mille. D'ailleurs, dès 1969, on lance le développement de la 80. Le pari de Kraus est réussi et l’avenir d’Audi assuré. Le succès est tel que l’usine d’Ingolstadt ne peut satisfaire la demande : il faut donc produire la 100 sur une nouvelle chaîne… à Wolfsburg, chez Volkswagen dont la Coccinelle vieillissante voit ses ventes baisser. Douce ironie.
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