La Lamborghini Miura atteignait 300 km/h. Vraiment ?
le chef-d’œuvre de Sant'Agata Bolognese est l'une des plus belles autos au monde. Mais celle qui, sur le papier, affichait une vitesse de pointe de 300 km/h avait-elle réellement les moyens de ses ambitions ? Vrai ou pas, on lui pardonnera.
Les grandes œuvres ne sont pas forcément parfaites. Parfois, leurs défauts éclairent leurs qualités pour les transformer en chefs-d’œuvre. En témoigne la Lamborghini Miura, celle sur qui on a déjà tout dit et tout écrit. Celle qui a tout inventé. Première supercar, première auto de série à moteur central (et transversal) arrière, c'est aussi la première qui a réellement tenté de rivaliser avec l’insubmersible Ferrari. Elle était aussi la plus rapide au monde, annoncée pour 300 km/h. Mais a-t-elle réellement atteint cette vitesse un jour ?
Trois fées pour la créer
Pour sa naissance, trois fées se sont penchées sur son berceau. Marcello Gandini, jeune designer de 27 ans embrigadé chez Bertone, Gianpaolo Dallara, l’ingénieur qui ne rêve que de course auto et Paolo Stanzani qui tente de coordonner les fantasmes des deux premiers. Sans oublier Bob Wallace, pilote d’essai et metteur au point néo-zélandais. Tous travaillent sous l’œil un tant soit peu inquisiteur de Ferrucio Lammborghini qui veut faire oublier le semi-échec de la première auto d’Automobili Lamborghini sortie en 1965 : la 350 GT.
Deux ans plus tard, au salon de Genève, la Miura est dévoilée. Les lignes de Gandini sont à couper le souffle. Le génial Italien, qui négligeait l’aérodynamique, se souvenant simplement des bouts de laine collés sur le prototype et filmées pour vérifier, légèrement, le bien-fondé de ses choix, a tracé des traits d’une fluidité visuelle jamais vu.
Une improvisation ? L’auto a été conçue en quatre mois seulement, et techniquement, si elle est révolutionnaire, elle n’est pas totalement au point. Le V12 de 350 ch est bien au rendez-vous, mais l’auto est inconfortable, mal ventilée, et la visibilité à bord est quasi nulle sauf à l’avant. Quant au châssis TP 400, il fait son délicat. Pourtant, elle est donnée pour atteindre 280 km/h dans sa première version. Par qui ? Par quelle homologation ? Personne n’en sait rien et ne compte que la parole de Ferrucio. Le magazine français Sport Auto va pourtant la tester et la chronométrer en cette année 1967. Mais elle n’atteint que 268 km/h. C’est énorme pour l’époque, mais pas au niveau des affirmations italiennes.
Pas grave, à Sant’Agata on concocte une évolution de l’engin : une Miura S plus puissante, de 370 ch, avec des freins renforcés et un châssis revu et corrigé. Ainsi amélioré, le chef-d’œuvre italien devrait atteindre les 300 km/h, c'est sûr. On est en 1968 et ça tombe à pic : Sport Auto prépare son numéro 100 et le fait d’afficher en Une la belle auto mesurée à cette vitesse ça claque. Direction une autoroute italienne pour le test ultime.
José Rozinski, l’essayeur star du journal prend le volant. Il fait beau, mais un vent agaçant se lève. Rozinski écrira « après avoir atteint 288,6 km/h à 7 800 t/mn, je m’en suis tenu là par prudence, car la Miura S devenait pointue à tenir. » Et quand le pilote et journaliste, qui a également commenté les Grands Prix de F1 pour TF1 explique que la Miura est « pointue à tenir », on le croit sur parole, car cela signifie qu’elle est tout simplement impossible à "tenir" pour un conducteur lambda.
Pas grave, Sport Auto titrera en couverture de son numéro 100 : Miura 288 km/h. Et personne n’en voudra à la belle Italienne d’avoir un peu triché. On pardonne tout aux stars, même quand elles jouent les divas.
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