Endurance : Le team 18 des sapeurs pompiers termine 4e à Oschersleben
Après l'abandon du Mans à quelques heures de l'arrivée, Yannick Bureau et toute son équipe avaient à cœur de conjurer le sort et de faire un bon résultat sur un circuit tout nouveau pour eux : l'année d'Oschersleben en Allemagne. Au final, c'est sur la 4e place que les pilotes et les mécaniciens ont réussi à faire monter la Suzuki rouge du team 18. Yannick Bureau nous explique en détail le week-end.
Comment s'est passé l'arrivée sur un circuit tout nouveau ?
Effectivement, nous ne connaissions pas du tout ce circuit. Seul, David Brière y avait roulé en 2005 avec le team endurance moto 45. Il s'agit d'un circuit que l'on décrivait comme un Carole bis avec beaucoup de virages. Finalement il s'est révélé être un circuit très agréable et très ludique. L'environnement est super, tu vois la piste de tous les coins, ce sont de belles installations. Nous avons donc consacré le mercredi à l'installation du stand et dès le jeudi, nous avons commencé les roulages libres.
Comment se sont-ils passés ?
Nous avons malheureusement chuté au bout de 15 minutes de la toute première séance. Ca a mis le doute à toute l'équipe avec le spectre du Mans qui planait à ce moment là. Fort heureusement, il n'y avait pas de dégât sur la moto. Et puis finalement, de jour en jour, toute l'équipe, les pilotes, le staff technique a bien pris la mesure. On a réussi à bien travailler.
Côté météo, nous avons eu de bonnes conditions pour découvrir le circuit. Elle était donnée au départ pour être pluvieuse toute la semaine mais au final, nous n'avons eu qu'un orage le samedi soir et la tempête qui a mis fin à la course.
Comment les pilotes ont-ils trouvé le circuit ?
Les premiers tours ont été une découverte complète car nous n'avons pas pu travailler sur la vidéo. Le circuit est bosselé à certains endroits, et c'est d'ailleurs ce qui a provoqué la chute. Il y a beaucoup de virages et malgré tout, ils l'ont apprivoisé et même adopté jusqu'à ce que Stéphane dise que c'était un circuit super sympa au contraire de Carole. Et puis sur place, il y a une super organisation pour les teams. Des grands stands, des attractions le soir avec un lieu de convivialité sous un chapiteau dans lequel les équipes pouvaient se retrouver avec des spectacles. On a vraiment apprécié car ça permet de bien décompresser.
Sur la grille de départ, vous êtes 9e. Quel a été le parcours ?
Nous avons fait toutes les séances de qualif en pneu de course ce qui nous a permis de valider des réglages pour la course. On savait que l'on serait au départ car on connaît la valeur de nos pilotes. Au final, nous avons été agréablement surpris de l'admission en Superpôle avec la 10e place car nous n'avons rien fait pour ça.
Dans la Superpôle, Jérôme a roulé en 29''392 (au lieu de 30''732 en temps cumulé) et on a gagné une place. De toute façon, le seul enjeu pour une équipe comme nous dans la Superpôle, c'est le risque de tout casser sur un tour. Mis à part la visibilité qui reste faible sur ces épreuves (d'autant qu'elle n'a pas été retransmise à la télé), il y a un risque maximal de chuter. Disons que nous ne cherchions vraiment pas à y accéder mais nous avons fait notre boulot.
En partant 9e, quel était l'objectif ?
Lors du briefing avec les pilotes, j'ai dis aux pilotes que la chute était interdite. Revenir d'Oschersleben avec un 2e abandon, ça ne l'aurait pas fait pour le moral de toute l'équipe et je savais que même en terminant dernier des EWC, on marquait des points. Il était donc hors de question de chuter car nous avions une bonne carte à jouer et on devait faire dans les 10. Nous sommes donc partis dans cet esprit là. On savait aussi que la météo annonçait quelque chose de pas très sympa. Même si l'heure de l'arrivée de la pluie a reculé toute la semaine, pour le jour de la course, elle était prévue autour de 18 h.
Quelle était la stratégie pour obtenir ce résultat ?
J'ai décidé d'appliquer une stratégie très agressive sur le plan des ravitaillements. Je voulais absolument faire un arrêt de moins que certaine équipe. Nous sommes donc allés jusqu'au bout du bout du réservoir en faisant beaucoup de calcul, en utilisant les données recueillies dans la semaine. J'ai beaucoup fait travailler les essenciers dans la semaine là-dessus. Au fil des tours, on a pu voir qu'on avait un coup à jouer notamment quand ont s'est retrouvé entre la 4e et la 6e place. Moi j'avais la certitude mathématique qu'on allait rentrer dans les 3 si la course continuait comme ça, c'est-à-dire sur le sec, sans interruption, sans safety-car.
Mais dans une vraie course d'endurance, il se passe toujours des choses ?
Oui effectivement. Il y a eu d'abord un safety car en milieu de course qui a eu comme conséquence de nous décaler d'un demi tour par rapport à nos adversaires directs. En effet, il y a 2 safety-car qui sortent lors d'une interruption et ils sont espacés d'un demi-tour. Nous n'avions que 25 s de retard et nous sommes passés à 1'30 ce qui n'est plus la même chose.
Et puis il y a eu l'arrivée de l'orage.
Et ce n'est pas peu dire. En fait, on a vu arriver une espèce de cataclysme. On a vu arriver un vrai front orageux. D'un côté il faisait bleu, de l'autre tout noir. Pour faire un parallèle avec le cinéma, c'est un peu comme dans Indépendance Day avec les nuages qui arrivent. On a eu la même densité et la même vitesse de déroulement des nuages. On voyait le rideau d'eau devant qui progressait. Nous avons donc préparé les pneus pluie.
Je pense que c'est l'ampleur du phénomène météo qui a, je pense, fait peur au Directeur de course, ou qui lui a fait prendre sa décision de sortir le drapeau rouge immédiat, Cela peut surprendre car en général, lors d'orage, on voit sortir les safety car qui tournent pendant un petit moment quitte à prendre une décision. Mais pas là.
Avez-vous tout de même roulé sous la pluie ou pas du tout ?
Quand les premières gouttes sont tombées, on a cru que c'était de la grêle tellement c'était énorme. Stéphane est rentré tout de suite car il a fait une virgule dans le premier tour humide. Le team Bolliger que l'on avait doublé au ravitaillement nous a repassé parce que leur changement de pneu est tombé juste au moment de leur ravitaillement alors que nous, nous l'avions fait 7 tours avant. J'étais un peu agacé. Et puis au bout de 5 minutes, on entendait passer les motos dans la ligne droite des stands avec les roues qui patinaient. Les pneus pluie n'arrivaient plus à motricer. Devant les stands, il y avait une énorme flaque de 2m de large sur toute la longueur des stands. A ce moment, là, on était confiants car on s'est dit que le plus gros de l'orage était passé et qu'ensuite, on aurait une pluie normale. On savait que les Dunlop sont de très bons pneus sous la pluie et devant nous, nous avions 2 équipes chaussées de pneus concurrents souvent moins performants dans ces conditions. Et effectivement, nous sommes remontés très vite sur Bolliger puis nous les avons doublés très fort et nous tenions une très bonne cadence.
Qui était au guidon à ce moment là ?
C'est Stéphane qui était sous l'eau et je me suis dit que vu l'expérience qu'il a eu au Mans, il ne prendrait pas de risque. Il allait savoir gérer et allait avoir à cœur de se rattraper par rapport au Mans. En plus, nous n'aurions sûrement pas fait de ravitaillement avant la fin car j'avais remis de l'essence au moment de chausser les pneus pluie.
Ca redevenait très intéressant pour la stratégie.
Oui mais malheureusement ou heureusement, ça dépend de quel point de vue on se place, la Direction de course à décidé de sortir le drapeau rouge. Ma première inquiétude a été de voir quand nous avions doublé le Team Bolliger car en cas d'interruption, ils prennent le classement à l'avant dernier tour. On termine donc à moins d'une minute de la 3e place. Les gens de Dunlop étaient un peu déçus par la décision de la Direction de course. Ils étaient dans notre stand car nous étions la première équipe chaussée en Dunlop. 10 ou 15 minutes après l'arrêt complet, la pluie est devenue normale.
Quel bilan tires-tu de cette course ?
Au final, nous sommes très très satisfaits. L'équipe à montrer son gros potentiel et nous avions besoin d'un résultat pour le démontrer, pour recoller au championnat du monde mais surtout pour rassurer toute l'équipe. Au championnat, nous sommes 8e avec 16 points. Nous sommes dans le bon paquet. C'est sûr que le manque de point du Mans va peser lourd mais ça fait partie du jeu et ce n'est pas fini. Si on peut terminer dans le top 5, je serais très heureux. Mais même si on fini le championnat en 7 ou 8e position, ça m'irait très bien. Un top 10 la première année en tant que permanent, ce serait pas mal du tout.
Que penses-tu de cette décision ?
Nous, dans les stands, nous n'avons pas tous les éléments. La Direction de course dispose de prévision météo que nous n'avons pas, ils ont la vision des commissaires tout autour du circuit. Et puis, il y a le risque de foudre qu'il faut prendre en compte. Il ne faudrait pas qu'il arrive un drame sur un circuit. Au moment où ils ont sorti le drapeau rouge, c'était vraiment l'apocalypse. Mais c'est vrai que s'ils avaient fait sortir les safety car, ça aurait pu passer après 20 minutes. Ca faisait 10 tours de safety car, ce qui n'est pas énorme. Ils nous ont expliqué que les prévisions qui avaient été très pessimistes et qu'un nouvel épisode comme celui que nous avions eu pouvait se reproduire. Je peux complètement comprendre et je ne critiquerai pas la décision parce que, moi je dis ça après coup, mais quand ils ont sorti le drapeau rouge, je n'ai pas crié au scandale, c'était chaud.
Cela fait donc une belle course sans incident sur la moto.
Oui effectivement, nous n'avons eu aucun souci. Heureusement car c'était extrêmement serré. J'ai été très surpris et j'ai compris très vite qu'il fallait que rien ne nous arrivent. Les écarts à l'arrivée sont très faibles. A part le premier qui a 4 tours d'avance, il y a 1 tour entre le 2e et le 4e . Ce sont des écarts qui sont fait après des ravitaillements et des pneus pluie, mais c'était encore plus serré avant ces changements. Par exemple, la 110 a eu juste un problème de platine de repose pied et sans chuter, il termine 7e alors qu'ils étaient 2 quand ils ont eu le problème avec une réparation qui a dû leur prendre 2 ou 3 minutes tout au plus. Il faut se rappeler qu'un tour, c'est 1'30, donc les écarts sont très serrés. A 2 tours, tu n'as que 3 minutes de retard. A part le YART qui domine comme le SERT le faisait les années précédentes, les écarts sont minimes.
C'est aussi l'intérêt des courses d'endurance ?
Effectivement, c'est ce qui me plait en endurance. Il y a beaucoup plus de paramètre à intégrer et à maitriser qu'en vitesse pour être devant et ce, surtout en course. C'est une discipline vraiment à part dans la moto. Tu as beau mettre d'anciens pilotes de GP ou de Superbike sur une machine, tu te fais tordre par le Team 18. En endurance, pour des petites équipes, le top 10 n'est pas un fantasme pour peu que l'on travaille sur d'autre aspect que le pilotage. Chez nous, on sait que l'on a une limite en termes de pilotage et que l'on n'a pas le budget pour avoir des pilotes professionnels et ce n'est pas la logique de l'équipe. Par contre on travaille avec les pilotes en essayant de leur donner la meilleure machine possible en fonction de notre budget et on essaye de leur faire une équipe de ravitaillement la meilleure possible également. Au bout du compte, ça paye. 4e, c'est super, c'est quand même un championnat du monde. Et puis il y a aussi des wild-card qui roulent très fort. La 92 par exemple, ça envoyait du bois
Rendez-vous est donc donné à Albacete sur le podium ?
Ca va sûrement être la marche plus difficile à franchir. L'Espagne, cela fait 2 ans que nous n'y sommes pas allé et cela a pu évoluer dans le sens que j'ai pu observer en Allemagne. Maintenant, les courses d'endurance, c'est du Superbike à grande longueur. Le premier relai, c'était une course de chiffonniers, tout le monde roulait presque plus vite qu'en qualif, le 2e relai, même chose et après, les écarts sont très serrés au bout de 6 h.
L'Espagne, nous a toujours réussi. On y a gagné 2 fois la superproduction. Un top 5 est envisageable. Top 10 minimum. Au-delà, je serais déçu. Maintenant, j'ai vraiment la confirmation du niveau de l'équipe 2009 et je pense que notre place elle est là.
Si on fait un top 5, c'est que l'on aura bien su gérer les faits de courses et je pèse mes mots.
Dans quel sens ?
Avant, on profitait des faits de courses, maintenant, le Team 18 les gère. C'est la grosse évolution de l'équipe. On ne bénéficie pas uniquement de la chute ou de la casse mécanique des autres. On les observe, on les analyse et on regarde à quel moment ça va nous permettre de passer devant. Et puis on gère aussi les gens de derrière en panneautant les pilotes. En Espagne, si rien ne se passe, notre place est dans le top 10, preuve en est, la Superpôle en Allemagne. Au delà, ça veut dire qu'il nous sera arrivé quelque chose, donc ça m'aura déçu car ce n'est jamais marrant d'avoir des pépins.
Avez-vous commencé à travailler sur la moto 2009 ?
Non pas du tout. On commence à émettre des hypothèses mais nous avons une problématique pour adapter les systèmes de changement de roue sur le bras oscillant arrière. Suzuki a changé la technologie de conception des bras oscillants. Les anciens étaient soudés alors qu'ils sont forgés maintenant. On ne peut donc plus adapter notre système de changement de roue en dessoudant le cadre. Il va falloir que l'on regarde cela de plus près. Mais au Bol d'Or, il n'y en aura pas tant que ça des modèles 2009. Il y a beaucoup d'adaptation à faire sur les 2009 donc cela fait de grosses dépenses et puis revendre des motos maintenant c'est chaud.
Merci beaucoup Yannick et rendez-vous à Albacete
Photos : team 18
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