Carburant : la France bientôt à sec ?
Pierre-Olivier Marie , mis à jour
Les grèves qui touchent les raffineries Total Energies provoquent d’immenses embouteillages aux stations-services et font craindre un risque de pénurie. Faut-il réellement s’inquiéter ?
Quelle folie les amis ! Alors que les files d’attente s’allongent aux stations-services et que les tensions s’exacerbent entre automobilistes excédés, de nombreuses interrogations se posent encore quant à la pénurie de carburant qui se profile pour le week-end.
Pourquoi ces pénuries ?
Comme expliqué hier sur Caradisiac, tout est né d’un mouvement de grève en cours dans trois des cinq raffineries de Total Energies. En cause, un désaccord opposant direction et CGT concernant des augmentations de salaires. La première accorde 3,5% quand les salariés réclament 10%. Et pour le moment, c’est le statu quo : «c'est une grève qui s'ancre dans le temps», a averti ce matin un représentant CGT du comité d'entreprise européen de TotalEnergies sur RMC.
Or, si Total, qui pratique actuellement des tarifs de carburant réduits grâce à une ristourne de 50 centimes par litre (30 centimes pour le gouvernement et 20 pour le distributeur, et ce jusqu’au 30 octobre), ne peut assurer une fourniture suffisante dans son réseau de 4 200 stations-services (soit un peu plus du tiers des points de distribution de l’Hexagone), cela crée une forme de panique chez les automobilistes qui se ruent à la pompe, entraînant une angoisse généralisée par effet boule de neige.
Quelles sont les zones les plus touchées ?
Outre la Normandie, c’est la moitié est de la France, Ile-de-France incluse, qui concentre le plus de difficultés en matière d’approvisionnement en carburant depuis le début de la semaine.
Dans le détail, ce sont les départements du Nord qui sont les plus touchés, contraignant certaines préfectures à prendre des mesures pour endiguer le phénomène, à commencer par l’interdiction d’achat et de vente de carburant dans des récipients type jerrycan.
Des stations y sont aussi réservées aux véhicules prioritaires (secours, forces de l’ordre, pompiers, véhicules médicaux, etc.), et le préfet du nord a aussi précisé que les réserves stratégiques seraient mises à contribution de façon à rétablir la situation.
En vertu d’une directive européenne de 2009, tous les Etats membres de l’Union disposent en effet de stocks stratégiques équivalant à 60 jours de consommation intérieure moyenne.
Quelles perspectives ce week-end?
Jeudi soir, la ministre de la Transition énergétique Agnès Pannier-Runacher se voulait pourtant rassurante : «Nous sommes en train d'améliorer la situation, ça va prendre deux ou trois jours a priori. Sur la base de ce que les pétroliers peuvent rapatrier depuis la Belgique et depuis Rouen, et pour faciliter les choses nous libérons une partie de nos stocks stratégiques. »
Ce vendredi, on apprend d’ailleurs que les pouvoirs publics ont accordé une dérogation aux transporteurs routiers pour que les chauffeurs puissent circuler demain samedi et assurer ainsi la distribution de carburant dans les stations.
Mais Francis Pousse, Président de la branche stations-services et énergies nouvelles du syndicat professionnel Mobilians, avertit ce matin : « il faut déjà que les 200 dépôts de France soient ouverts, mais il faut pour cela que le personnel soit présent et que ces dépôts aient bien du carburant dans leurs cuves. Le carburant est présent sur le sol français, il arrive par bateau massivement, mais le reroutage de ces carburants est plus long. Toute la filière est mobilisée, les pipelines vont fonctionner 24h/24 et 7/7, mais il faut que les vannes puissent être ouvertes. »
Au dernier pointage du gouvernement 15% des stations sont vides ou en partie vide, avec comme précisé plus haut de véritables disparités régionales. Et si l’on peut imaginer / espérer que les choses s’arrangent d’ici lundi, c’est bien le spectre d’une véritable pénurie qui se profile pour ce week-end.
Le témoignage d'un automobiliste recueilli jeudi soir (images Manuel Cailliot/Caradisiac):
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