Audi, Mercedes, BMW : avis de gros temps sur le premium allemand
Mercedes est à la baisse et rien ne sourit plus à Audi et à Mini. Quant à BMW, il semble bien seul à être enchanté. Un problème qui dépasse le rayon premium car lorsque le haut de gamme tousse, c’est l’ensemble de l’industrie automobile qui est enrhumé. Explications.
On le pressentait dès l’an passé. La baisse de la croissance chinoise, les derniers soubresauts du dieselgate et les rodomontades du président américain aux airs de menace inquiétaient Stuttgart, Ingolstadt et Munich. Mais depuis le début de cette année, les inquiétudes se sont transformées en mauvais résultats pour Mercedes et Audi. Seul BMW est épargné, alors que sa filiale Mini recule.
Dieselgate, croissance chinoise en berne et taxes américaines
Bien sûr, les causes de la chute sont clairement identifiées, même si elles diffèrent d’une marque à l’autre. Pour la firme à l’étoile, les lourdes amendes dont elle a écopé, liées à ses logiciels farceurs, n’arrangent pas les comptes. Pour Audi, c’est la fin d’un cycle, d’une mode, de l’engouement pour son design sage telle que la marque d’Ingolstadt en a usé et abusé pendant une décennie. Et ces deux marques souffrent ensemble du même mal à l’international, entre un marché chinois en baisse et des menaces de taxes qui pourraient freiner leurs exportations vers les États-Unis.
Pourtant, ces motifs divers ne suffisent pas à expliquer leurs gros soucis du moment. Mercedes a essuyé ses premières pertes depuis 10 ans au deuxième trimestre 2019, licencie plus de 1 000 personnes et gèle le salaire de ses 300 000 salariés allemands. Du côté d’Audi, la baisse est continue depuis plus d’un an et s’est soldée par une chute des ventes de 4,5 % rien qu’au premier trimestre.
Pourtant, en cas de crise durable, et on l’a vu dans les années qui ont suivi celle de 2008, les marques premium s’en tirent généralement honnêtement. On le sait, un marché en crise est comparable à celui d’un pays pauvre dans lequel ce sont les classes moyennes qui sont le plus touchées. Ainsi, dans l’automobile, ce sont les constructeurs généralistes qui sont en baisse, alors que le premium et le low cost s’en tirent honorablement. Or, rien de tel ces temps-ci.
Quand les finances sont en baisse, la R & D trinque
Alors que se passe-t-il pour la triplette allemande qui domine habituellement de ces larges épaules le haut de gamme mondial ? C’est qu’on lui en demande beaucoup. Étant donné que les modèles des trois marques génèrent de fortes marges, par beau temps, ce sont elles qui investissent le plus en recherche & développement. L’électrique, l’autonome et les milliards que ces technos engloutissent sont pour leur pomme. Alors, du coup, quand les marges ne coulent plus à flot, les additions deviennent plus difficiles à régler.
Problème : les avancées technologiques, surtout en matière d’autonomie, sont réclamées par les clients du premium très soucieux d’être à la pointe. Et c’est là où le serpent (monétaire) se mord la queue. Les marques sont confrontées à un dilemme : si l’on vend moins d’autos, on dispose de moins de cash pour payer de nouvelles technos. Et si l’on présente moins de techno à nos futurs clients, on vendra encore moins d’autos. Kafkaïen.
Un problème d’autant plus primordial qu’il dépasse le rayon premium. Car les marques haut de gamme, principalement allemandes, sont le laboratoire de l’innovation de l’industrie automobile européenne et même mondiale, à l’exception des Japonais et Coréens. Une nouvelle techno est généralement proposée en première exclusivité sur les modèles premium car leur surcoût est absorbé par le prix déjà élevé des modèles. Les investissements nécessaires à leur développement, par les constructeurs parfois et les équipementiers souvent, sont ainsi amortis et peuvent être utilisés par les constructeurs généralistes dans un second temps.
Des conséquences qui peuvent être dramatiques
Or, si le premium n’investit plus, c’est toute la chaîne de l’innovation qui est rompue. Car s'il est un domaine où le ruissellement fonctionne, c'est bien celui de l'automobile. Le premium innove et amortit les investissements, puis les marques généralistes démocratisent les nouvelles technologies. Une recherche & développement du haut de gamme en panne, au moment même de la grande mutation de l’automobile du thermique vers l’électrique peut donc avoir des conséquences plus que fâcheuses : elles peuvent être dramatiques.
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