La nouvelle est tombée comme un couperet pour les écologistes : le ministère de l'Ecologie a confirmé le projet de construction de l'autoroute A65 (un tronçon de 147 kilomètres prévu entre Langon (Gironde) et Pau (Pyrénées-Atlantiques)).
Pour justifier cette décision, il a mis en avant les arguments suivants : "Le projet initial de l’A65, engagé avant le Grenelle Environnement par un contrat de concession signé en décembre 2006, a fait l’objet de nombreuses améliorations pour éviter les zones sensibles et répondre aux exigences nouvelles du Grenelle Environnement. De plus, pour compenser les impacts résiduels, des espaces naturels seront pris en gestion par le concessionnaire à une échelle sans précédent pour reconstituer des habitats propices au développement des espèces protégées, notamment le vison d’Europe, les chiroptères, l’écrevisse à pattes blanches ou le fadet des laîches. Ces approches ont finalement été pleinement prises en compte par le concessionnaire de cette autoroute et ce dossier servira donc de référence pour le futur."
Toujours d'après le ministère, les projets qui n'ont pas été retenus ne correspondaient plus aux nouveaux enjeux de développement durable : ils privilégiaient la mobilité automobile, dans un contexte de pétrole cher et non renouvelable, l’utilisation non raisonnée de l’espace, notamment par l’étalement urbain préjudiciable à la biodiversité. Il a affirmé : "Conformément aux orientations fixées par le président de la République à l’issue du Grenelle Environnement et reprises par le projet de loi Grenelle, les nouvelles infrastructures routières, ferroviaires ou fluviales, devront désormais comprendre des mesures garantissant une vraie neutralité par rapport aux enjeux environnementaux des territoires traversés."
Si je comprends bien, le gouvernement considère que le projet d'autoroute A65 n'est pas néfaste pour l'environnement. Mais jusqu'à présent, j'ai entendu un autre son de cloche de la part de plusieurs organisations écologistes qui, ces derniers mois, ont lutté contre lui.
Rappel des faits
La Fédération SEPANSO et des associations (l’A.R.L.P., les Amis de la Terre, Greenpeace) ont réclamé la réévaluation de ce projet en fonction des nouveaux critères énoncés lors du Grenelle de l’Environnement : elles ont adressé un courrier au ministre de l’Ecologie Jean-Louis Borloo en novembre 2007 à ce sujet (voir article).
En janvier 2008, la SEPANSO Aquitaine a déposé plainte à la gendarmerie de Bazas (Gironde) pour "destruction d’espèces animales non domestiques et protégées" et "destruction du milieu particulier d’espèces animales non domestiques et protégées". Elle a expliqué avoir constaté à Escaudes (33840), sur le tracé du projet autoroutier A65 Langon Lescar, des atteintes illicites à des espèces et à des habitats d’espèces protégées à forte valeur patrimoniale. La SEPANSO, qui avait préalablement adressé un courrier au Préfet de Région pour l’informer de ces délits, a souhaité se constituer partie civile. Elle a souligné qu'elle en ferait de même pour toutes les autres destructions d’espèces et d’habitats qui se feraient sur le chantier en dehors des règles strictes imposées par le code de l’environnement (voir article).
Le 21 mai 2008, le Conseil d'Etat a rejeté deux requêtes contre le projet. 26 élus d'Aquitaine (dont François Bayrou, Alain Juppé et Henri Emmanuelli) étaient favorables à cette future autoroute et l'ont fait savoir au Premier ministre et au ministère de l'Ecologie. Le Conseil National de la Protection de la Nature, qui a émis un avis défavorable contre ce projet le 19 mars 2008, a finalement donné un avis favorable le 20 mai 2008. Des coups durs successifs pour les environnementalistes !
Et le 24 mai 2008, une centaine de personnes originaires des Pyrénées-Atlantiques, des Landes et de Gironde ont replanté des arbres à Bazas sur la zone défrichée du tracé (noisetiers, pins, châtaigniers, chênes). Bernadette Labourdette, de l'association Alternative régionale Langon-Pau, a alors affirmé : "Nous ne baissons pas les bras. Ce projet démesuré et fou n'a pas de raison d'être."
Dans cette affaire, c'est donc le pot de terre contre le pot de fer : les amoureux de la Nature contre les défenseurs du développement économique d'une région... Une précision : le ministère de l'Ecologie a annoncé l'abandon des contournements autoroutiers de Toulouse ou de Bordeaux et du projet autoroutier entre Pau et Oloron.
(Source : ministère de l'Ecologie Photo : société A'LIÉNOR)
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