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3 193 morts, mais tout va bien

Dans Pratique / Sécurité

Jean Savary

Le nombre de tués sur nos routes ne diminue plus depuis 2018, malgré les progrès techniques de nos voitures et la sophistication des radars. Et ça n’a l’air d’ennuyer personne.

3 193 morts, mais tout va bien

La semaine dernière, j’ai été surpris par ce communiqué : "Pour la seconde année consécutive, le nombre de personnes tuées sur les routes reste sous la barre des 3 200 morts.(…) Ces résultats sont à porter au crédit de tous les usagers de la route qui respectent les règles, et de tous les professionnels engagés pour garantir leur sécurité et entretenir les routes, parfois au péril de leur vie"

Surpris par sa provenance d’abord, un certain François-Noël Buffet dont le titre, ministre auprès du ministre de l’Intérieur, me plonge dans des abîmes de perplexité. Je connaissais les ministres délégués, les délégués interministériels, les secrétaires d’État ayant (ou pas) rang de ministre, mais pas les ministres auprès du ministre. Ni pour être honnête, l’existence de ce monsieur ; j’ai dû louper un épisode de la deuxième saison de Dissolution et conséquences. Pour ma défense, il y a tellement de changement de personnages, tant de discours et dialogues et si peu d’action que je m’endors devant l’écran.

3 193 morts, mais tout va bien

Mais c’est sur le fond surtout que cette déclaration me surprend. Depuis trente-cinq ans que je m’intéresse à la Sécurité routière, avec ou sans majuscule, je n’ai jamais lu ou entendu un officiel se féliciter que le nombre de tués sur la route n’ait, non pas diminué, mais légèrement augmenté, précisément de 0,8 %, soit même pas une trentaine de morts en plus, la moitié d’un autocar, bravo les gars, continuez comme ça !

Il est vrai qu’on s’attendait à pire et je n’étais pas le seul à redouter que le non-retrait, depuis janvier, d’un point du permis pour les excès de vitesse de moins de 5 km/h se solde par une remontée de quelques pour-cent de la courbe des décès.

Je suis ravi de m’être -presque- trompé.

Trois jours de guerre en Ukraine

Pour autant, ce misérable satisfecit contraste tristement avec la volonté jusqu’alors exprimée de diviser par deux la mortalité routière et le nombre de blessés graves dans la décennie 2020-2030 conformément à l’objectif énoncé par l’ONU.

Et je ne parle même pas de l’engagement « zéro décès et zéro blessé » grave à l'horizon 2050 signé en 2020 à Stockholm dans le cadre de l’Europe, une blague.

Il reste que 3 200 morts, c’est encore beaucoup et le fait que ça ne diminue plus depuis une huitaine d’années devrait inquiéter ou au moins interroger.

Vous me répliquerez – ça ne manque jamais – que 3 432 morts (en incluant l'outre-mer), ce n’est pas énorme, que c’est le quart de ce qu’on déplorait dans les années soixante-dix, même pas la moitié d’un bilan du début des années 2000, trois jours de guerre en Ukraine, le sixième du nombre de victimes d’accident domestique et un échantillon au regard des décès du cancer et autres pathologies.

Et comme d’habitude ça va m’énerver. On ne compare pas des morts violentes à des maladies ni les routes à un champ de bataille, et pour le reste, dites-moi si vous voulez instaurer un Contrôle technique des escabeaux, un permis de manier le taille-haie et une police du bricolage avec brigades d’intervention rapide pour les changements d’ampoule.

3 193 morts, mais tout va bien

S’il faut mettre en rapport le nombre des victimes de la route avec un autre, c’est avec celui des homicides : 980 l’an passé. En France, le risque de perdre la vie en se déplaçant est donc trois fois et demie supérieur à celui de se faire trucider par autrui.

Vous remarquerez que l’on parle infiniment plus souvent des victimes du couteau, de la Kalach et de la machette que de celles de l’auto, de la moto ou du vélo…

La sécurité routière, c’est comme l’écologie, ça n’intéresse plus personne. Même pas le ministre auprès du ministre.

Des produits stupéfiants

3 193 morts, mais tout va bien

C’est pourtant passionnant ce rapport – parfois mortel – entre l’homme et la machine.
J’ai longtemps pensé et écris que les progrès de cette dernière en termes de sécurité (ABS, airbags, ESP…) étaient partiellement annulés par le relâchement des comportements que ces équipements induisent. Le sentiment de sécurité – voire d’invulnérabilité - est un puissant désinhibiteur. Les spécialistes nomment ce phénomène « homéostasie du risque » : chaque humain adapte son action au niveau de risque qu’il considère comme acceptable. Dans une voiture perçue comme dangereuse, il conduit plus prudemment que dans une voiture ressentie comme sûre.

Ce qui expliquait que les considérables améliorations apportées tout au long des années quatre-vingt-dix n’aient eu pour effet qu’une très lente descente de la courbe des tués. Celle-ci n’a été brisée, au début des années 2000, que par l’avènement du radar automatique qui faisait apparaître un tout autre risque, celui de perdre son permis.

Sur ce point, je n’ai pas changé d’avis et pourtant, je commence à voir les choses sous une perspective légèrement différente.

Et si c’était désormais les voitures qui s’adaptent à nos comportements, et non plus l’inverse ? Dans une société où les deux grands produits stupéfiants que sont le smartphone et le tandem cannabis-cocaïne ne cessent d’étendre leur emprise et dont les adeptes se comptent désormais par dizaines de millions, on n’assiste pas, comme on pourrait s’y attendre, à une montée en flèche du nombre de victimes de la route.

Grâce aux ADAS qui rattrapent nos écarts et dérapages, nous remettent dans la voie et freinent à notre place ?

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